Ces dernières années, les studios s’activent à ressortir leurs vieilles cartouches et à les porter ou à leur offrir un coup de neuf. Si on pensera notamment à Capcom et Konami qui ont recyclé pas mal de leurs catalogues dans des compilations, SNK n’est pas en reste aussi bien en termes de compilations que de coups de neuf comme l’ont prouvé coup sur coup SNK 40th Anniversary Collection et Samurai Shodown avec le reboot de la franchise apparu l’an dernier sur PlayStation 4, Xbox One et PC.
Malgré ses défauts, il a su profiter de l’absence de jeux de combat forts pour se hisser dans les charts et conquis les joueurs et les critiques en manque. Alors, maintenant qu’il est porté sur Switch, maintient-il la barre ou sombre-t-il ? Le manque de puissance de la console porte-t-il le coup de grâce au soft ? C’est ce qu’on va voir !
(Test de Samurai Shodown réalisé sur Switch à partir d’une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Un jeu de coupes et d’épées
Les années 90 étaient un véritable vivier pour les jeux de combat. Après le succès largement mérité de Street Fighter II, de nombreux éditeurs se sont lancés dans la brèche, chacun lançant un soft dans la même veine avec plus ou moins de succès. Forcément, ce fut également le cas de SNK sauf que, à la différence de miser sur du 1 vs 1 en MMA plongé dans un monde contemporain, celui-ci privilégie les combats à l’arme blanche au Japon féodal. Le résultat ? Samurai Shodown, un jeu de combat ultra-compétitif où plutôt que de pousser son assaillant pour prendre l’avantage et le maintenir, consiste à jouer méthodiquement et à calculer ses mouvements pour punir son adversaire.
Fast-forward en juin de l’an 2019 et nous découvrons un titre fort qui semble s’être bonifié avec le temps comme un bon saké. Tout y est comme on l’a laissé dans le temps et il n’a rien perdu de sa finesse d’antan, bien au contraire. Pour peu que vous ayez déjà posé vos mains sur un jeu de la famille, vous vous sentirez à nouveau chez vous avec quelques additions en plus pour remettre un peu de piment à ce plat qui ne manque pourtant pas d’épices. Vous êtes débutant ? Ce n’est franchement pas un problème.
Le premier point fort de Samurai Shodown, c’est sa prise en main. Pour vous défendre, trois coups de lame plus ou moins forts et un coup de pied pour remettre un peu de plomb dans la caboche d’un ennemi trop pressant. Les coups spéciaux, des quarts de cercle, tout simplement. Tout est mis en œuvre pour que vous puissiez apprécier l’autre aspect important du jeu : le frisson de savoir qu’un camp ou l’autre peut remporter le combat en quelques coups bien placés.
Effectivement, comme autrefois, un match peut se terminer en une poignée de coups. Pas de combats à rallonge, pas de combos infinis, comme un combat réel à l’arme blanche. Les affrontements souvent très courts peuvent se terminer de manière extrêmement brutale et punitive. Avec des coups surpuissants à la portée de chacun de vos doigts et aucun combo à retenir, il vous faut juste apprendre le rythme de votre adversaire, étudier ses placements et provoquer puis punir ses erreurs. C’est ce frisson qui vous poussera au combat et c’est vraiment l’essence de Samurai Shodown.
Et ce frisson ne se voit que renforcé par les quelques ajouts que sont les super frappes ou le sacrifice de la jauge de rage qui décuplent ainsi vos forces à la pression de quelques boutons et accessibles de tous. Après, ça ne veut pas dire que l’apprentissage s’arrête là. Si le plaisir est instantané, le joueur plus à l’aise prendra le temps nécessaire pour apprendre les différentes gardes, esquives et ou à désarmer ses opposants pour les rendre plus vulnérables à ses assauts plus violents.
SOS fantômes ?
Si le titre brille par son gameplay qui aura su se magnifier durant ces longues années d’absence, côté mode de jeu, c’est un peu moins brillant. Au contraire, le titre joue le minimum syndical et nous sert ici une liste d’options de jeu générique au possible. Au côté d’un mode arcade anecdotique (qui offre toutefois quelques très jolies cinématiques), on retrouvera forcément le mode online (indispensable à tout logiciel moderne), des modes entraînement et tutoriel et un dernier assez spécial et « asynchrone », mot étrange pour dire que vous affrontez ici des fantômes d’autres joueurs contrôlés par la console.
Ce dernier vous offre d’ailleurs deux sous-modes, un mode survie qui consiste donc à enchaîner les victoires jusqu’à votre défaite et un mode « Hécatombe » qui consiste à affronter une série de 10, 20 ou 100 adversaires si le cœur vous en dit. Pour ce dernier, on a clairement affaire à du remplissage d’ailleurs vu que l’intérêt global de l’exercice ne consiste qu’à débloquer une poignée de titres pour votre carte de joueur ou des pistes audio à écouter dans les galeries. On a vu mieux…
Oui, les fantômes justement, parlons-en. Il s’agit de l’addition de ce nouvel épisode. SNK a voulu créer ici un système ingénieux qui apprend de la façon dont vous jouez. Ainsi, en observant la manière dont vous vous battez, il crée ensuite un fantôme de votre méthode et il le fait pour chacun des joueurs vous permettant donc d’affronter des copies d’autres joueurs sans que vous ayez à prendre part à des matchs en ligne. Si sur le papier l’idée ne manque pas d’un certain génie, dans les faits, on est loin d’un constat aussi brillant. Les fantômes sont en général plutôt faibles et passent (pour la plupart d’entre eux) leur temps dans le coin opposé de l’écran à frapper les atomes d’oxygène de l’arène comme autant d’apprentis kendoka dans un dojo…
Dans tous les cas, que vous décidiez de jouer contre des fantômes, des ordinateurs ou des gens bel et bien vivants, qu’ils soient à vos côtés ou loin de vous, le casting, pourtant maigre, devrait vous apporter satisfaction. Effectivement, s’il n’y a que 17 personnages quand vous sortez la cartouche de son écrin, ils se démarquent assez les uns des autres pour vous donner envie de leur laisser leur chance.
Sur ce roster basique, on retrouve par ailleurs aux côtés de 14 combattants issus de précédentes itérations, 3 personnages inédits. Ces derniers sont d’ailleurs très réussis et parviennent à briller même face à un Haohmaru qui pète la classe ! Ajoutons que ce casting peut être allongé grâce à l’achat d’un pass saisonnier allongeant la liste à 22 pugilistes (seulement, il allongera lui aussi la note de 20€ auquel vous pouvez ajouter 20€ supplémentaires pour les 4 autres qui rejoindront le titre dans l’année).
Écran en main ?
Sinon, vous avez vu ces bande-annonces sublimes ? Ce style japonisant, ce cell-shading sublime, ces personnages hauts en couleur et dont les armes semblent trancher les décors autant que les adversaires ? Eh bien, vous serez probablement déçu d’apprendre que sur Switch, le résultat n’est pas aussi fin, bien au contraire. Oui, c’était à prévoir, la mouture pour console nomade ne s’est pas faite sans heurts.
Si on retrouve bien l’intégralité des éléments qui font le bonheur des joueurs sur les consoles concurrentes, les modèles tranchent franchement avec le décor (en plus d’être relativement grossiers, mais ça, c’était déjà le cas sur les autres supports).
Le prix à payer pour que Samurai Shodown conserve sa fluidité sur l’hybride… La fluidité en revanche, on la perd dans les décors… S’ils sont toujours relativement beaux, les personnages et animaux qui le composent ont perdu quelques frames d’animation sur le chemin. Ce n’est pas insurmontable, mais bon, ça fait un peu de la peine à voir, un peu comme dans Super Street Fighter IV sur 3DS. On pourra toujours se consoler en regardant les cinématiques et animations entre les combats qui sont, elles, toujours sublimes.
Ces défauts évoqués plus haut prennent une toute autre dimension une fois la Switch en train de faire la chose pour laquelle elle a été conçue de prime abord, jouer en nomade. Parce que là, en plus de perdre en résolution (jusque-là, rien d’imprévu), l’aliasing devient omniprésent. En résulte une surcouche floue sur une technique déjà en deçà de ce qui se fait aujourd’hui. Pas folichon…
En revanche, si les yeux finissent par s’habituer, le framerate qui a le hoquet de temps en temps ainsi que les temps de chargement franchement longs ne rendent pas le moment très agréables en solo. On n’évoquera que très brièvement les combats aux JoyCons qui, s’ils offrent la possibilité de se friter avec un pote loin d’une TV avec une manette chacun, sont toujours aussi imprécis et par conséquent, un peu frustrants.
Samurai Shodown sur Switch n’est pas le succès attendu sans pourtant devenir un naufrage. S’il ne brille pas sur le plan technique (du tout), il reste appréciable en mode TV et propose l’intégralité du contenu disponible sur les versions concurrentes (enfin, sauf les DLC, ça va de soi).
Malheureusement, le mode Off-TV, lui, n’est vraiment pas une réussite et ne saurait être conseillé. Donc, pour quiconque appréciant les bons jeux de baston, et pour les fans de Samurai Shodown qui ne possèdent qu’une Switch et surtout prêts à faire des concessions, ce titre est une valeur sûre que nous recommandons assez chaudement.En revanche, si vous attendiez de voir si vous deviez prendre le jeu sur Switch ou sur un autre support, nous vous suggérons de passer votre chemin et de le prendre ailleurs, au moins, ce sera moins cher.