Adaptation vidéoludique de la licence cinématographique Sans un Bruit, A Quiet Place: The Road Ahead est développé par nul autre que Stormind Games qui s’est déjà illustré sur du jeu d’horreur avec la saga Remothored. Si l’intention de base est de surfer sur la vague de succès rencontré par les films, leur potentiel ludique étant sur le papier incontestable, le studio italien n’a pas pris ce projet à la légère et compte bien nous offrir une œuvre aussi effrayante que stressante, tout en étant fidèle au matériel de base.
Et si l’on voyait au départ cette adaptation d’un œil plutôt méfiant, notre périple nous aura rassuré, car loin d’être parfait, ou de pouvoir être considéré comme un grand jeu, A Quiet Place: The Road Ahead est une sympathique petite expérience horrifique qui fait son petit effet les quelques heures qu’elle dure (et c’est déjà pas mal).
(Test de A Quiet Place: The Road Ahead sur PlayStation 5 réalisé avec une version fournie par l’éditeur)
L’histoire. L’histoire n’a pas grande importance tant elle est finalement d’une banalité assourdissante. On incarne Alex Taylor, adolescente et survivante du fameux day-one qui a vu de terribles créatures venues d’ailleurs débarquer sur Terre et massacrer toute âme qui y réside.
La particularité étant, comme vous le savez probablement, que ces monstres sont aveugles, mais dotés d’une ouïe qui leur permet d’entendre la moindre mouche voler à des centaines de mètres. Au jour 119 de l’invasion, notre héroïne, asthmatique, ce qui aura une incidence par la suite, apprend qu’elle est enceinte, et décide, avec l’aide de ses proches, de prendre la route pour rejoindre un abri potentiellement géré par la garde national des États-Unis.
Sans un sursaut narratif
L’un des premiers reproches que l’on pourrait faire au jeu, c’est qu’il n’a aucune réelle ambition narrative. Le scénario est cousu de fils blancs et s’achèvent comme on l’imaginait. En soit, Alex n’est pas un personnage irritant ou même inintéressant, c’est juste que le coup de la grossesse, on nous l’a déjà fait dans le premier long métrage et que cela rend la chose bien moins impactante.
De même que si des flashbacks sont bien au programme pour découvrir ce qui l’a amené là où elle en est, on peine à s’attacher aux autres personnages tant leur temps d’antenne est réduit. De fait, on se sent peu impliqué dans ce qui nous est conté ici et cela rend l’expérience un chouïa moins marquante.
Notons néanmoins, que de gros efforts ont été faits sur la narration visuelle, qui, au travers de messages écrits sur les murs, de vestiges d’attaques passées dans les différents lieux que l’on traverse, témoignent du chaos ambiant. Chaque décor est le testament d’une vie révolue et en cela, A Quiet Place: The Road Ahead est une franche réussite. De même que l’on appréciera la lecture de quelques journaux et notes de survivants que l’on dénichera ici et là et qui nous narrent ce qui s’est déroulé pour leur personne. Intéressant, parfois triste, surtout lorsque l’on se rend compte que beaucoup n’ont pas survécu.
Mais tout ceci renforce avant tout l’immersion, et non le scénario, qui, on le répète, manque d’originalité et de personnages forts capables de porter un récit, Alex ne suffisant pas, même si son parcours l’endurcie et qu’elle devient plus forte à mesure des épreuves qu’elle traverse.
Sans un bruit
C’est plutôt du côté du gameplay que nous allons aller chercher ce qui est très satisfaisant. A Quiet Place: The Road Ahead n’est pas un jeu d’action, pas d’armes (ou presque) ici, mais de l’infiltration qui doit se faire dans un silence absolu, dans le sens où l’on ne doit quasiment jamais courir ou marcher d’un pas trop décidé, et que l’on doit constamment être en veille quant à ce qui nous entoure et qui pourrait à notre contact émettre le moindre son.
Ouvrir une porte demande alors un certain doigter, tout comme regarder où l’on marche est un impératif, car poser notre pied sur du verre brisé ou bien sur un tas de feuilles mortes, fait suffisamment de bruits pour éveiller ce qui est constamment en alerte et se tapit dans l’ombre.
Le rythme est alors assez lent et A Quiet Place: The Road Ahead, sans être un walking simulator, pourrait presque être un titre contemplatif tant l’on prend notre temps pour avancer. Mais ce contrat, qui pourrait en rebuter plus d’un, on le signe dès le début, car le petit prologue qui fait office de tutoriel est clair à ce sujet. Il s’en dégage alors une sorte de pression quasiment ininterrompue du fait que l’on ne se sent jamais en sécurité et que l’on est constamment sur le qui-vive, surveillant et étudiant le moindre de nos gestes.
Même faire un petit détour pour récupérer un objet pouvant nous servir, comme des piles ou une Ventoline, pose la question de savoir si le risque en vaut la chandelle.
C’est du moins là notre expérience avec le jeu lors des trois premiers chapitres, car très vite, on comprend comment fonctionnent ses rouages et on peut alors, nous aussi, jouer avec lui, ainsi qu’avec les créatures à nos trousses. Plus l’on progresse, plus l’on débloque d’éléments nous permettant de nous sortir de situations épineuses. Si l’on commence avec une simple lampe torche et une sorte de phonomètre qui analyse les bruits environnementaux et ceux que l’on émet, il faut ainsi veiller à ne pas faire plus de bruit que ce qui nous entoure, lorsque vient le chapitre dans lequel l’on peut enfin se servir d’objets pour détourner l’attention des monstres, tout change.
De là, nombre de situations peuvent se régler en balançant une brique à notre opposé, ce qui va inexorablement attirer la bête en sa direction, pour qu’ensuite, nous puissions avancer tranquillement, enfin pas trop tout de même. Le fait est que cela fonctionne bien, voire trop bien. Couplez cela avec les sacs de sable qui nous offrent la possibilité de nous créer un chemin silencieux en le déversant en amont de notre marche, et vous avez le combo gagnant de l’immortalité. Certes, cela n’est pas toujours disponible, mais lorsque ça l’est, la tension retombe grandement, même s’il nous faut toujours éviter de faire quelques stupides erreurs par excès de confiance.
Il faut aussi prendre en considération que Alex est asthmatique, et même très atteinte par la maladie, le moindre petit effort physique pouvant nous mettre dans un état absolument infernal. Enjamber un bout de bois, porter un élément un peu lourd, dégrade ainsi notre santé, et lorsque l’on fait une crise, cela peut vite dégénérer si l’on ne réussit pas le petit QTE de la dernière chance, ou si l’on ne trouve pas des cachets pour nous soigner. La meilleure solution reste la Ventoline, mais en prendre une dose émet un petit bruit qui pourrait s’avérer fatal. Mais le jeu ne va pas là au bout de ses ambitions, et c’est dommage.
On regrette que cet élément ne soit que contraignant finalement, et que Stormind n’en fasse pas grand-chose, du moins pendant une grande partie de l’aventure. Il y avait de l’idée pourtant, traverser une zone trop poussiéreuse est horrible pour l’héroïne et influe négativement sur son asthme, mais c’est totalement sous-exploité et se retrouver dans ce genre de situation est très rare. Aussi, on déplorera des objectifs assez similaires de zones en zones, et surtout des rencontres contre les créatures qui manquent un peu de mordant une fois que l’on y est habitué.
Par ailleurs, ne voyez en aucun cas A Quiet Place: The Road Ahead comme un survival. Il n’en est pas un et n’a aucune prétention à l’être, car s’il nous faut récupérer quelques objets pour notre survie, il n’y a rien d’autres à gérer que notre asthme et les piles de notre lampe torche. Il n’y a pas d’inventaires et on a seulement accès au journal d’Alex, où elle y conssigne ses pensées, et aux collectibles que l’on peut ramasser, dont un qui permet de glaner des points pour débloquer des artworks via le menu principal, avec au passage un bel hommage au premier film.
Pas sans ambiance
Cependant, et dans sa grande globalité, tout cela se tient, et les quelques défauts n’entachent finalement que peu l’expérience, cela la rend juste un poil moins forte qu’elle aurait pu l’être. Car, rassurez-vous, il y a des moments bien tendus, qui vous demanderont un peu de jugeote et quelques prises de risques, ainsi que des décisions qui se doivent d’être prises au quart de tour. L’atmosphère est d’ailleurs très travaillée et fidèle à ce que l’on connait de la licence cinématographique.
Les quelques passages d’attaques de monstres, notamment celle à grande échelle, sont glaçants et particulièrement brutaux. Leur design, leur gestuel, le son qu’ils émettent, les rendent assez effrayants, tout comme certaines de leurs apparitions. Nous vous conseillons d’ailleurs de jouer avec le minimum d’options d’accessibilité activées, car celles-ci nuisent grandement à l’immersion et rendent le jeu assurément bien plus simple, et de notre point de vue, cela gâche grandement son impact.
D’ailleurs, si les sons que l’on émet sont d’une importance capitale, le jeu peut aussi se vivre différemment. Si vous activez votre micro et l’option de détection dans les options du titre, tout son capté par votre dispositif peut être entendu par les monstres en jeu. Alors, nous avons testé et cela fonctionne. Sauf qu’à un moment donné un chat est passé par là et a décidé de s’empiffrer de croquettes dans un vacarme a en réveillé les morts et c’est d’ailleurs de mort dont nous avons été atteints en réalité (avez-vous la ref ?), après ce malheureux épisode. La feature est très intéressante et si vous souhaitez l’essayer, calfeutrez-vous et évitez d’être en présence de ces vils félins qui ne nous veulent que du mal.
Enfin, visuellement, comme indiqué plus haut, c’est plutôt joli et techniquement bien fait. Les jeux de lumière, l’effet de pluie ou encore le niveau de détails sont de haute volée et sincèrement, on ne trouve rien à redire à ce niveau-là, si ce n’est que parfois l’on est mort bêtement à cause de scripts liés aux créatures et leur apparition à différents endroits. Car s’ils agissent une fois sur zone en réaction à nos actions, occasionnellement, elles suivent un rail les plaçant d’un coup, d’un seul sur notre route sans que l’on ne puisse rien n’y faire. Game over.
A Quiet Place: The Road Ahead est le parfait petit bonbon pour passer un bon moment lors d’Halloween. Fidèle à la licence cinématographique, plutôt beau et adoptant un parti pris de gameplay fort, il pêche par une trop grande répétitivité de ce que l’on doit faire et comment. De même que l’on aurait aimé un scénario plus abouti et des rencontres avec les monstres un peu plus difficiles passés un certain cap du jeu, car on s’habitue finalement assez rapidement à leur comportement.
Le jeu jouit en plus d’une ambiance vraiment réussie, portée par un sound design absolument dantesque, qui n’a d’égal que la spatialisation du son à la hauteur des attentes pour un titre dont le bruit est la principale menace. Se bouclant en environ six heures, et proposant différents niveaux de difficulté, le bébé de Stormind offre une expérience satisfaisante surtout au vu de son prix. Alors pourquoi s’en priver ?