Cela fait des mois, des années même, que l’on se prépare à cette nouvelle aventure. Monster Hunter World, et son excellente extension Iceborne nous ont comblé en 2018/2019 et l’épisode Rise, quoique décevant sur plusieurs aspects, avait su étancher nos pulsions chasseresses quelques mois plus tard. Mais aussi sympathique fut-il, nous restions en demande d’un nouvel opus ambitieux, nous piaffions d’impatience pour une chasse inédite, bref, nous attendions Monster Hunter Wilds.
Une attente qui s’est achevée ce 28 février 2025 avec sa sortie sur PS5, Xbox Series et PC. Un succès indéniable, inédit pour une série aussi confidentielle il n’y a de cela qu’une décennie, avec huit millions de copies écoulées sur ces trois premiers jours de commercialisation. Un virage plus grand public opéré depuis l’épisode World couronné de succès mais qui pourrait avoir des conséquences sur l’identité même de la licence. Alors, les équipes de Capcom ont-elles réussi à trouver ce savant équilibre entre simplicité et technicité ou ont-elles sacrifié Monster Hunter Wilds sur l’autel de l’accessibilité ?
(Test de Monster Hunter Wilds sur PlayStation 5 réalisé à partir d’une version fournie par l’éditeur)
Premiers jours – La chasse est ouverte
Nous voici donc embarqué dans un nouveau monde. La guilde des chasseurs nous a convoqués afin de soutenir les équipes d’exploration parties pour les Terres Interdites. Notre aventure commence d’ailleurs par la découverte dans le désert du veilleur Nata, habitant de ces terres inconnues que nous décidons de prendre sous notre aile. Le pauvre enfant a en effet fui son village suite à l’attaque d’un monstre mystérieux que l’on baptisera rapidement « le spectre blanc ». Ni une ni deux, notre grande quête se dessine et nous sommes donc parti pour enquêter sur cette créature pour parvenir à ramener Nata à son village, ou l’inverse.
Étonnamment, Monster Hunter Wilds nous propose une histoire bien plus développée que ce à quoi il nous avait habitués, sans doute dans le but de faciliter l’arrivée de nouveaux venus sur la licence. Et si les enjeux sont simples – explorer les Terres Interdites en quête de renseignements sur le village des veilleurs et le spectre blanc – la mise en scène n’en reste pas moins travaillée et parfois même spectaculaire, comme avec cette introduction au milieu d’une horde de Balahara, sortes de serpents de sable, qui nous plonge directement dans le bain.
Dès les premières scènes, les angles de vue, les panoramas et la faune et flore locale nous donnent envie de partir à l’aventure sans attendre. En ce sens, le moteur RE Engine fait des merveilles. Le titre n’est sans doute pas le plus beau jeu auquel nous ayons joué mais le résultat reste impressionnant. Il se passe toujours quelque chose à l’écran et l’environnement fourmille de détails et d’animations, en particulier sur les monstres, remarquables.
Nos débuts sont aussi l’occasion de rencontrer une galerie de personnages qui nous accompagneront des heures durant. Particulièrement bien modélisés et expressifs, ceux-ci se révèlent être bien plus que de simples fonctions. Dans les opus précédents, on allait voir les différents PNJ pour forger des armes ou armures, choisir une mission, nous entrainer, bref, pour un objectif pratique. Dans Monster Hunter Wilds, et aussi parce que la narration se fait bien plus présente qu’auparavant, on s’attache à Alma, Gemma ou Olivia par exemple et on apprend à les connaitre mieux, bien au-delà de leurs fonctions respectives.
Nous voici donc partis pour nos premières chasses, en forme de tutoriel. Un Chatacabra s’en prend à un habitant local, il nous faut intervenir. Et ainsi débute notre nouvelle carrière de chasseur. Une entrée en douceur durant laquelle on nous explique les rudiments d’une bonne chasse car on a tôt fait de s’y perdre devant tant de possibilités, d’armes disponibles (quatorze archétypes) et d’icônes et raccourcis de partout. Rome ne s’est pas faite en un jour, il convient donc de procéder par étapes, d’autant que le titre reste très progressif dans la présentation de ses mécaniques. On parvient ainsi à nous débarrasser sans trop de bobos du monstre belliqueux. Le premier d’une (très) longue série…
Déjà vingt heures – Une boucle de gameplay addictive
Nous sommes pris dans un engrenage infernal (ou angélique, tant le plaisir est sans cesse renouvelé). Qu’il est loin le temps où nous nous perdions dans ces environnements immenses. Nous avons depuis dompté l’austérité de Monster Hunter Wilds. Il y a toujours des icônes partout, et il faut bien admettre qu’il en reste encore plusieurs dont on ignore concrètement le fonctionnement, mais nous maîtrisons dorénavant les principaux mécanismes du jeu.
Il faut aussi reconnaître que les nombreuses options de confort apportées par Monster Hunter Wilds permettent une bien meilleure immersion dans l’univers. Filtrer les éléments affichés sur notre carte, se créer des sets d’équipements pour plus rapidement s’équiper pour diverses traques, personnaliser notre Seikret (le Chocobo local), lequel dispose en sus d’une conduite automatique vers un objectif défini, la possibilité de transporter deux armes distinctes, la mise en favori d’armes ou armure à forger pour que soient marqués les monstres disposant des composants qui nous manquent… ce sont ces touts petits riens qui rendent l’expérience infiniment plus plaisante que sur les opus antérieurs.
Armé de notre Morpho-hache bien aimée, nous avons décimé régulé des dizaines d’espèces afin d’en récolter les composants et ainsi assouvi notre inextinguible soif de puissance. D’autant que, contrairement aux épisodes précédents, le loot est particulièrement généreux et on n’a pas besoin de chasser des dizaines de créatures, comme cela pouvait parfois être le cas auparavant, afin de récolter de quoi nous fabriquer une armure complète (un pas de plus vers le confort du joueur).
Ces acquisitions de matériaux se font d’ailleurs naturellement. Bien que nous partions pour une mission consistant à traquer une créature spécifique, combien de fois n’avons-nous pas, au passage, chassé une autre qui croisait notre chemin, voire qui s’attaquait à notre proie en plein affrontement ? Quelle outrecuidance ! Mais aussi, quel kif de voir ces monstres se combattre de manière aussi bestiale ! Mais si nos traques se révèlent aussi rentables, c’est surtout grâce à la mécanique de focus.
Lorsque l’on s’attaque à un grand monstre, nous lui infligeons évidemment des blessures et on constate qu’au fil du combat, à force d’attaquer ses pattes par exemple, notre cible se mettra à boiter en se déplaçant, voire trébuchera en tentant de s’enfuir. C’est l’ADN même de Monster Hunter, le comportement animal est saisissant de réalisme et on n’a pas uniquement l’impression de taper sur de grosses bêtes agressives. Aussi, à ces blessures « organiques », Monster Hunter Wilds ajoute un élément bien plus « jeu vidéo ».
Ainsi, à force de frapper une partie de la créature, nous créons une plaie, laquelle est mise en exergue par le système de focus, activable à la volée par simple pression d’une gâchette. Attaquer alors cette blessure en mode focus permet d’infliger de lourds dégâts, menant souvent à la chute du monstre, le rendant d’autant plus vulnérable à nos assauts, tout en récupérant des composants supplémentaires indispensables à la forge d’équipements. Une mécanique qui simplifie énormément les combats mais qui va, encore une fois, dans le sens de plus d’accessibilité et de fluidité dans notre évolution.
Une boucle de gameplay qui a beau être simple, basique même, quoiqu’il faille aussi prendre aussi en compte les changements de saison favorisant la présence de certains (redoutables) prédateurs spéciaux, mais le plaisir manette en main ne faibli pas malgré les heures passées sur le titre. Même la narration qui se sert de (très) grosses ficèles pour introduire de nouveaux monstres ne nous dérange pas tant que cela.
Nous partons en missions, manque de bol, une grosse bête belliqueuse se place sur notre route, tout le monde file se cacher pendant qu’on s’en occupe… voilà basiquement ce à quoi nous avons eu droit. Rien de rédhibitoire bien sûr, d’autant que l’intrigue en elle-même est intéressante, mais il est vrai que ces scènes et ses dialogues redondant peuvent prêter à sourire. Et puis, l’humour et l’ambiance globale de l’aventure permet de faire facilement passer cette pilule.
C’est quand on croit que tout finit que cela commence réellement
Monster Hunter est une course en avant, une constante évolution dans notre quête de puissance et de nouvelles proies à traquer. Il nous fait ressortir nos plus bas instincts de prédateur au sommet de la chaine alimentaire. Si dans le contexte du jeu, nous sommes là pour étudier et protéger un écosystème fragile, dans les faits, l’humain est bien plus la source du problème que sa solution réelle. Mais trêve de philosophie, nous avons finalement sauvé la faune et flore locale et nous pouvons à présent dormir sur notre oreiller en plume de Queumatrice dans un drap en soie de Lala Barina…
Sauf que cela serait une erreur, car c’est quand on croit en avoir terminé avec lui que Monster Hunter Wilds commence réellement. L’intrigue n’était là qu’en forme d’introduction, de tutoriel géant si l’on peut dire (à l’instar des précédents opus) et les monstres les plus retors et intéressants à découvrir et à traquer font à présent leur apparition.
Non pas que ceux présent durant l’histoire soient inintéressants, bien au contraire même, ils ont été savamment designés pour nous proposer des combats haletants, mais à présent que le titre nous a inculqué toutes ses mécaniques, c’est à nous de prendre en main notre destinée, et si nous voulons nous confectionner ses jolies bottes en peau de Rathian nous conférant un gros boost de défense, c’est à nous de nous organiser pour y parvenir.
Cela nous a d’ailleurs semblé le meilleur moment pour commencer à nous pencher sur la coopération avec d’autres chasseurs du monde entier. Monster Hunter Wilds à beau être un titre qui peut se parcourir en solo (ce que l’on recommande par ailleurs, à minima durant son mode histoire, ou éventuellement avec un ami de niveau équivalent), il reste une expérience qui met fortement en avant le multijoueur. D’autant qu’en permettant de former des équipes quelle que soit la plateforme de jeu, il est toujours aisé de se trouver quelques compagnons de chasse.
Bon, ce n’est pas vraiment notre tasse de thé, et combattre jusqu’à quatre sur un même monstre (au-delà du côté massacre assez étrange) se résume rapidement en un joyeux bordel, surtout avec des inconnus avec lesquels la communication est quasi nulle, mais il faut reconnaitre que cela rend la quête de composants beaucoup plus rentable. Mais en sommes nous vraiment arrivé là, sommes nous vraiment aveuglés par la perspective de meilleures statistiques pour notre arme, ou par l’objectif d’occire le moindre monstre en une poignée de minutes ?
Malgré tout, Capcom sait comment nous rendre captif de son jeu. De base, Monster Hunter Wilds nous propose déjà des dizaines de monstres à affronter et nous invite, via ses quêtes « événements », ses bonus quotidiens et ses évidentes futures mises à jour, à relancer juste une quête de plus, juste une chasse de plus. Nous sommes happés par cet univers qui nous offre en permanence un goût de reviens-y, non pas seulement pour quelques matériaux de plus, mais pour le shoot d’adrénaline que nous offre chaque traque, en attendant la probable grosse extension à la Iceborne ou Sunbreak de Monster Hunter World et Rise…
Cher journal de bord, nous venons d’entamer notre soixantième heure de jeu en une semaine. Nos vacances ont fondu comme neige au soleil, et pourtant, nous avons l’impression qu’il nous reste tant à découvrir. Nous continuons encore et encore de traquer les créatures les plus redoutables des Terres Interdites. Monster Hunter Wilds est tout simplement brillant !
Alors effectivement, on pourra notamment chipoter sur l’austérité habituelle de l’ensemble, avec ces menus pas toujours très accueillants et clairs, ou les quelques problèmes de stabilités constatés, y compris en mode performance (bien que ce ne fut pas incommodant durant notre expérience de jeu, les principaux soucis semblant surtout être sur PC).
Mais en proposant un nombre impressionnant d’options de confort, une personnalisation de son expérience poussée (fouiller dans les paramètres permet de façonner le gameplay selon ses préférences) et en enrichissant un mode histoire permettant d’embarquer les nouveaux venus plus efficacement, Capcom s’est donné les moyens pour continuer d’étendre la popularité de sa licence.
Tout n’est pas parfait, évidemment, et certaines ficelles sont visibles, mais on louera les efforts consentis pour nous créer des personnages très attachants (mention spéciale pour Alma) ainsi qu’une intrigue qui réserve son petit lot de surprise. Et ajoutons à cela le mode focus, la principale nouveauté de gameplay qui est une franche réussite (compensant l’absence d’ajout de nouvelles armes), qui offre un dynamisme supplémentaire aux affrontements, même si c’est, par effet de levier, aussi une concession pour les joueurs avides de réalisme.
Et les monstres. Quels monstres ! Quelle maestria dans leurs designs et conceptions ludiques. Criants de vérité, leurs mouvements, attaques, démarches, mimiques… tout cet ensemble participe à les rendre crédibles. Cela a toujours été la grande force de la licence. Que ce soit les nombreuses nouvelles créatures ou les bêtes historiques, tous ont bénéficié d’un incroyable soin permettant à Monster Hunter Wilds de perpétuer cette tradition d’excellence. Magistral !