Dieu ce qu’on l’aura attendu ! Monster Hunter Rise est là et c’est avec une fébrilité certaine que nous nous sommes lancés dans ce voyage. Fébrilité justifiée par le fait qu’il s’agit du premier opus à revenir sur Switch après un tournant magistral. Avec son crochet sur des supports plus performants (Monster Hunter World), la saga de Capcom a grandement dépoussiéré sa licence, un lifting impressionnant le délestant de nombre de lourdeurs qui encombraient son gameplay et son expérience. L’action a été récompensée, Monster Hunter World est devenu le plus gros succès de Capcom à ce jour.
Un succès auquel Monster Hunter Rise semble vouloir prétendre. Mais en a-t-il la carrure ? Si les trailers et les versions de démonstration avaient alors su nous convaincre, n’était-ce que de la poudre aux yeux ? Côté contenu, avons-nous de quoi mâchouiller ou les joueurs Switch vont-ils rapidement revenir à Monster Hunter Generations ? Enfin, le look japonisant n’est-il là que dans l’optique d’émuler le succès du deuxième jeu le plus populaire de la série ?
(Test de Monster Hunter Rise réalisé sur Nintendo Switch à partir d’une version fournie par l’éditeur)
Once upon a time in Japan
On va éliminer ce point immédiatement : si on joue à Monster Hunter, ce n’est pas pour son histoire, n’est-ce pas ? Comme toujours, ce n’est pas le point fort de cet épisode. Monster Hunter Rise réutilise ce scénario usé jusqu’à la corde du village en détresse face à des dragons anciens. Cette fois-ci, c’est Kamura, un charmant village d’inspiration nipponne (qui pourrait rappeler Tatara dans Princesse Mononoké) où tous se préparent à de funestes événements : la Calamité. Comme il y a une cinquantaine d’années, le bourg est la cible d’attaques de monstres hors de contrôle et il vous revient d’enquêter sur les événements tout en prenant soin de protéger les murs qui vous abritent, vous et vos nouveaux amis.
Enfin, on s’en fiche… Après tout, encore une fois, ce n’est pas ce qui nous décide à acheter le jeu. En revanche, ça a un impact sur tout le reste. Effectivement, Monster Hunter Rise est de loin le jeu de la série qui a le plus d’identité. Visuellement, tout est prévu pour vous rappeler le Japon (et il le vend bien mieux que Mario et Sonic aux JO de Tokyo…) entre l’esthétique des bâtiments et des armures, les tenues et la gastronomie, les estampes qui décorent les temps de chargement tout comme les vidéos d’introduction des monstres, servis sur de la poésie, rythmés au son des shamisen. Un côté « office du tourisme » qui plaira probablement aux aficionados, mais qui pourrait finir par sentir le trop-plein pour les autres…
Et puisqu’un Monster Hunter n’est rien sans ses bestioles, cet épisode fait la part belle à un tout nouveau lore. Ainsi, c’est près de trente-quatre monstres, dont onze inédits qui vous attendent ici. Si on se doute bien que certains monstres emblématiques et d’autres adorés des fans reviennent, ceux qui brillent le plus dans cette réunion de bêtes géantes, ce sont les monstres inédits. En effet, non seulement ils collent parfaitement avec le cadre, mais en plus, ils proposent des expériences inédites en combat. Et que dire des environnements qui les accueillent, certains venant de quelques épisodes en arrière et remis au goût du jour pour permettre l’utilisation des outils mis à la disposition des chasseurs et des monstres… Une baffe qui fera du bien aux vieux chasseurs.
La différence entre un bon chasseur et un mauvais chasseur
En revanche, ces mêmes vieux chasseurs pourraient se diviser sur le point suivant : Monster Hunter Rise prend un chemin différent de celui pris par Monster Hunter World. Si World a largement contribué à assouplir et pourtant densifier le jeu (l’ajout d’une roue à objet, l’abandon des aiguisoirs, la carte en monde ouvert, entre autres), il s’était, selon nous, alourdi côté gameplay en abandonnant la force de Monster Hunter Generation Ultimate : les styles de jeu et les talents spéciaux. Monster Hunter Rise vise entre les deux en revenant à cette approche du gameplay « arcade » des derniers volets 3DS tout en conservant une grosse partie des ajouts de World, notamment l’exploration qui sied si bien à ces environnements décloisonnés.
Et naturellement, c’est ici que Rise innove le plus : le dynamisme. Oui, on pourrait parler des Chumsky, ces chiens qui permettent des déplacements rapides tout en aiguisant ses armes ou en se soignant ; oui, on pourrait s’étaler sur le Filoptère et expliquer combien il est grisant de découvrir toutes les possibilités que ces insectes offrent lors des sessions d’exploration ou lors des combats (aussi bien en attaque qu’en défense d’ailleurs), mais en fait, c’est un tout. Tous les éléments présents dans Monster Hunter Rise sont purement et simplement au profit du spectacle et de l’action.
Ainsi, le jeu vous invite à courir les monstres dès les premières cinématiques jusqu’à ce que vous ayez ratatiné toutes les bestioles du jeu. Les déplacements vifs sur terre comme dans les airs, le fait que vos différents objectifs de mission (monstres ou ramassage) soient toujours indiqués sur la carte ou même les raccourcis pour progresser plus rapidement en jeu… Tout est mis en place pour que le joueur ne se concentre que sur ce qu’il aime : poursuivre et chasser. On regrettera (ou pas) l’absence de traque dans cette épisode, abandon qui retire l’un des aspects les plus anciens de la série. Cependant, même ce retrait est un témoignage, comme si le studio nous demandait de garder le rythme (en dépit des tutoriels incessants et creux en début de partie).
La petite cerise ?
« Mais avec autant de folie sur l’écran, la console doit être à genoux ! » Oui d’autant que le jeu nous propose des textures largement supérieures au précédent opus sur la machine. Et pourtant, non, ce n’est pas le cas. Capcom nous prouve avec l’adoption de son tout récent RE Engine que si un soft est bien optimisé, la Switch peut faire des merveilles. En moyenne, le jeu est stable, l’action reste propre et lisible à tout moment et seuls quelques légers hoquets interviennent quand l’activité à l’écran devient très soutenue. Et pourtant, même à quatre, tout se joue parfaitement. L’éditeur a tout mis en place pour que rien ne nuise au plaisir des joueurs, même en mode Calamité.
Oui, la Calamité, parlons-en. C’était l’un des points sur lesquels la com’ de Capcom se faisait et pourtant, c’est l’un des aspects sur lesquels on en savait le moins. Le mode Calamité est un combat en arène qui ressemble en fait à du tower defense. Votre mission consiste à empêcher la progression des monstres au sein des murs de la forteresse en plaçant des pièges et autres tourelles. À mesure que vous mettez en déroute vos ennemis, vous pouvez faire évoluer vos moyens de défense avec de nouvelles armes et en faisant appel à des personnages du village pour une frappe surpuissante.
On va être honnête, si c’est agréable de voir que le studio derrière le jeu se décarcasse pour trouver de nouvelles idées, passée la surprise, le mode Calamité n’est pas vraiment grandiose. S’il permet d’empocher quelques objets sympathiques, en solo, l’expérience s’avère plutôt stressante. Le fait de devoir repousser des monstres ne passant pas toujours par les mêmes chemins et frappant comme des buffles, tous en même temps, c’est plutôt frustrant. En allié avec des amis (sur lesquels vous pouvez compter), le combat devient tout de suite plus excitant, plus encore si vous pouvez communiquer ensemble.
Mais ce qui nous fait le plus frémir, c’est de savoir que le jeu pourrait s’étoffer sur le long terme. Effectivement, dans l’état, malgré du contenu de qualité et des secrets qui forcent à un peu d’exploration, Monster Hunter Rise est encore un peu creux. De fait, un peu plus de trente monstres, pas de rang G… Malgré les quantités relativement importantes d’armes, armures et de missions, un joueur qui aura poncé les précédents volets ne fera de celui-ci qu’une bouchée (notamment parce que la difficulté n’est pas au rendez-vous dans le mode histoire). Nous espérons que, comme World, Rise recevra une mise à jour massive pour allonger la sauce.
Monster Hunter Rise est une masterclass. Il est la synthèse de deux époques, réunissant derrière un titre les valeurs que la série inculque depuis son lancement en 2002 (pugnacité, patience et dévouement) et ce que les derniers épisodes ont eu à ajouter à la formule (nervosité, exploration, options toujours plus grandes). Avec ce titre, Capcom met la barre encore plus haut pour les prochains épisodes et termine de confirmer pourquoi Monster Hunter est devenu une licence tout public, malgré le message de base, malgré le nombre de commandes à maîtriser et malgré une poignée d’impairs.
Les habitués lui reprocheront peut-être sa trop grande accessibilité, mais il est le prix à payer pour une série qui s’ouvre enfin à plus de joueurs. D’autant que les dernières missions proposent toujours du challenge et qu’il existe des raccourcis pour les joueurs pressés. Monster Hunter Rise, et la série en général, confirme avec cet épisode qu’on peut faire du neuf avec du vieux et qu’il ne faut qu’un soupçon d’imagination. Plus nerveux et plus beau que Generations, plus ouvert, souple et intuitif que World, Monster Hunter Rise est le nouveau summum de la saga Monster Hunter sur Nintendo Switch.
Maintenant, il ne nous reste qu’à découvrir quels seront les monstres à rejoindre la partie dans les mises à jour gratuites et si les quêtes de rang G viendront secouer les joueurs en manque de défi.