Déjà, avec un titre comme Generation Zero, c’était mal parti. Génération Goldman ou le « génération nan nan » de Diam’s, les titres en « génération machin » n’ont jamais rien donné de bon. La jaquette ultra cheap et les baisses de prix annoncées avant la sortie ne rassuraient pas non plus. Même la figurine qui devait figurer dans la version collector a jeté l’éponge quelques jours avant la sortie.
(test de Génération Zéro réalisé sur PlayStation 4 via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Broken Promises
Survivor, le groupe des 80’s à qui l’on doit le cultissime Eye of the Tiger sur la bande originale de Rocky 3, a aussi chanté Broken Promises, un titre qui va tout particulièrement bien à Generation Zero. En effet, le jeu se déroule en 1989, et ne respecte aucune des promesses qu’il nous avait faites avant sa sortie.
Les années 80 d’abord, qui servent de théâtre à l’aventure, sont complètement absentes. A part le look caricatural des avatars qu’on peut choisir (un rappeur « casquette à l’envers », un punk à crête rouge, un clone de Fred, dans Scooby Doo et un autre du personnage de Kavinsky), et un poster qu’on rencontre de temps à autre (toujours le même, nous y reviendrons), le jeu pourrait tout aussi bien se passer en vingt ans avant ou vingt ans après. On est loin des ambiances fun et décalées que les 80’s avaient apporté à Far Cry 3: Blood Dragon, GTA Vice City ou Hotline Miami, qui se passait lui aussi, comme Generation Zero, en 1989.
Nous vous en parlions à l’occasion de la sortie du dernier trailer en date, le jeu promettait un jeu d’infiltration sous une météo dynamique dans un monde ouvert persistant. La météo dynamique est presque là, puisqu’à intervalles plus ou moins régulier, des orages éclatent. Cela dit, on n’a constaté aucun impact sur le gameplay… Ni le bruit de l’orage, ni la pluie, ne vient rendre, par exemple, le joueur moins facilement repérable. L’effet est donc uniquement cosmétique (et gênant).
L’open world est bien présent. Hélas, serait-on tenté de dire ! En effet, il s’agira régulièrement de faire des allers/retours sur la carte selon les missions qu’on lance au fur et à mesure de nos découvertes sur le scénario. Si dans Red Dead Redemption 2, les voyages sur la carte étaient aussi l’occasion de découvertes, à minima de paysages superbes, voire de missions secondaires, dans Generation Zero, c’est juste long et vide.
Quant à la persistance des créatures mécaniques et leurs « objectifs propres » supposés, le compte n’y est pas non plus. En effet, les ennemis « spawnent » selon les progressions dans le scénario. Ce n’est qu’au moment où vous découvrirez une mission dans une zone en particulier (via un document) que les ennemis y seront réellement présents. Avant cela, vous pourrez faire quelques rencontres malheureuses aléatoires, mais pas des « véritables » ennemis qui débarqueront à l’occasion de la mission. Ainsi, des zones nettoyées précédemment seront de nouveaux peuplées d’hostiles…
Enfin, dernière des promesses non tenues : les mécaniques d’infiltrations. L’un des trailers du jeu vantait la nécessaire discrétion, nous montrant comment le cliquetis de l’ouverture d’un coffre de voiture qu’on voudrait fouiller pouvait être suffisant pour nous faire repérer. Sauf que comme dans Left Alive, nous sommes face à un jeu d’infiltration qui pousse à aller à l’affrontement au contact. Et de toutes façons, il est impossible de jouer façon ninja tant le moteur du jeu est à la ramasse.
Generation (Zero) de retard
Si le jeu n’est clairement pas un AAA à gros budget, cela n’explique ni n’excuse de si gros défauts, qui rendent le jeu moche, certes, mais surtout injouable. On est quand même devant un jeu des studios responsables de la série des Just Cause, dont le moteur physique est au centre du gameplay, les problèmes qu’on rencontre dans Generation Zero sont d’autant plus incompréhensibles. C’est simple : le jeu semble inachevé.
Le titre ne comporte que très peu d’assets, qui se répètent, partout, tout le temps. Non seulement c’est cheap et triste, mais cela nuit à l’expérience. L’exploration est en effet biaisée, on a l’impression d’avoir déjà vu chaque endroit qu’on découvre. Tous les garages visités sont exactement les mêmes, les maisons elles-mêmes ne se différencient que très peu, tout comme les bunkers. Ainsi, dans l’exemple ci-dessous, il s’agit bien de maisons différentes (les boussoles en témoignent), et pourtant…
Les textures sont moches, quand elles sont là. Le jeu subit en effet un clipping très insistant, et même à très courte distance. Les effets de lumière peuvent être parfois plutôt réussis (Ouah ! Une remarque positive ! La première !), mais le plus souvent, elle est très mal gérée, donnant lieu à des effets complètement improbables.
Mais le plus grave, c’est le comportement du moteur lui-même. Ainsi, comme dans tout jeu dont la discrétion est une composante – citons par exemple les Far Cry – le personnage est moins repérable accroupi que debout. Generation Zero va plus loin, et un personnage debout sera forcément repéré, même quand il est à l’intérieur d’un bâtiment et les ennemis dehors ! On ne joue donc qu’à quatre pattes, ce qui vient sensiblement allonger les temps de trajet déjà interminables dont nous vous parlions il y a quelques lignes.
Pire, non seulement le personnage est visible même caché, mais il est aussi vulnérable. Ainsi, les très gros ennemis entrent en conflit avec les bâtiments, passant partiellement au travers, avec pour résultat de réussir à vous atteindre, eux à l’extérieur, vous à l’intérieur ! La bonne nouvelle, c’est que l’inverse est parfois vrai, de manière aléatoire, aboutissant à des stratégies de combats complètement débiles, du genre : attirer les ennemis devant une cabane où on se réfugiera pour tirer à travers les murs sur les machines (les murs restant bien évidemment immaculés).
La version que nous avons à notre disposition est complètement buggée. On a pu voir des buissons ou des pneus léviter au beau milieu de la campagne, des sortes de feu follets électriques se balader dans les jardins ; nous avons pu ouvrir une grille dans la terre (une grille gisant au sol après une explosion a gardé son option « ouvrir ». On a tenté le coup, et la grille, répétant l’animation d’ouverture, s’est enfoncée dans la terre…) ; moins drôle, des assets nécessaires à la progression dans le jeu ne se sont affichés qu’après redémarrage, nous ayant fait perdre au passage deux bonnes heures d’exploration infructueuse (et pour cause…), ou encore, lors d’un autre redémarrage, l’ensemble des éléments découverts qui étaient affichés sur la carte ont simplement disparus… S’il n’y a pas de choix de difficulté au démarrage de Generation Zero, les bugs permettent d’avoir accès à un mode « difficile ». Dommage, il n’est pas désactivable !
Alors on peut espérer que pour sa sortie grand public, le jeu sera accompagné d’un patch qui viendrait régler nombre de ces problèmes. Dans ce cas, le jeu vaudrait un peu plus le coup, non ? Non. Même sans ces problèmes techniques, problèmes de gameplay ou de level-design (nous n’avons pas évoqué les bordures de 15 cm qui nécessitent un saut, et donc de se faire repérer à tous les coups…), le jeu serait insipide. Generation Zero multiplie les éléments déjà vus comme il multiplie lui-même ses assets jusqu’à la nausée, allant même jusqu’à proposer des emotes dansées comme un certain Battle Royale à succès ! Oui, car le jeu est jouable en multi en coop. Gageons qu’il doit être un peu plus fun entre amis qu’en solo, mais nous n’avons pas pu essayer ce mode de jeu.
Complètement bâclé et donc complètement raté, Generation Zero pourra au moins se cacher derrière la catastrophe technique pour dissimuler les trous dans son gameplay et dans son level-design. On ne pourra même pas lui accorder le bénéfice d’idées qu’il n’aurait pas su exécuter : tout dans le jeu n’est que déjà vu, et d’un manque d’intérêt abyssal. Quand bien même un joueur un peu maso sur les bords voudrait se frotter au jeu, le principe de réapparition à proximité du joueur mort annihile toute difficulté. Le meilleur conseil qu’on pourra donner à quiconque était attiré par le titre, c’est de se tourner vers l’un des jeux qu’il aura tenté de copier qui l’aura inspiré, Far Cry en tête, pour l’open world à la première personne et les composantes d’infiltration.