Quand on parle néo-rétro, en général il y a deux écoles : les nostalgiques qui aiment à se replonger dans l’esprit des grandes années, et ceux qui en ont marre de voir les gros pixels de leurs parents et préfèrent la technologie la plus aboutie possible. Bon, ceci dit, les deux ne sont pas incompatibles, votre Humble Narrateur en est la preuve (quasi-)vivante, même si son coeur bat effectivement plus pour les choses vidéoludiques antiques. Catégorie à laquelle, vous vous en doutez, appartient notre Freedom Planet, fraîchement lancé sur Switch mais déjà présent sur d’autres machines depuis plusieurs mois, voire années.
Sauf si vous êtes né il y a 15 ans et que Final Fantasy XV représente votre première expérience en matière de jeu vidéo, il y a fort à parier que Freedom Planet vous évoquera dès les premiers instants de jeu une autre série d’oeuvres émanant du passé, à une époque où les hérissons bleus filaient comme l’éclair pour ramasser des anneaux dorés et faisaient les beaux jours des consoles SEGA du moment. Seulement, les imitations ne sont parfois que de pâles copies sans saveur, mais on trouve aussi des oeuvres-hommages qui savent se démarquer de leur modèle tout en en respectant les codes. Alors, Freedom Planet, c’est quel camp ?
Sonic sa mère
Sonic par ci, Sonic par là, effectivement, la comparaison ne cesse de revenir lorsqu’est évoqué Freedom Planet, et au-delà de la ressemblance de style évidente, on pourrait préciser une bonne raison à ce fait : le jeu aurait pu (et dû) être un Sonic. Il s’agissait à l’origine d’un projet fan-game émanant d’un adepte de la véloce mascotte, mais au fur et à mesure que le développement avançait, l’auteur a décidé de prendre ses distances avec ses modèles pour proposer un univers original, avec de nouveaux personnages et un gameplay un peu différent. On y reviendra. Ici donc, point de hérissons ni de renards volants ni d’échidnés rasta. En leur lieu et place, on a droit à 3 petites mignonnes, elles aussi d’apparence à la fois humaine et animale (féline, canine, reptile), et elles aussi dotées d’un maniement et de mouvements qui leurs sont propres.
Le scénario ne va pas chercher bien loin, on est dans un platformer après tout, même s’il faut préciser que Freedom Planet propose un développement de son histoire ainsi que de nombreuses séquences de dialogues qui ne sont pas monnaie courante dans la plupart des jeux du genre. Un bon point, d’autant qu’il faut signaler que les textes en français sont particulièrement efficaces et bien traduits, et ça, ce n’est malheureusement pas toujours le cas. Du bon boulot. Bref, un gros méchant s’écrase sur une planète avec son énorme vaisseau, suivi par un autre alien qui était à sa poursuite et qui se fait descendre par les autorités, lequel est secouru par nos 3 fifilles en question qui vont partir en chasse du félon histoire de récupérer une Pierre de pouvoir qu’il s’est appropriée sans l’accord de ses possesseurs. Vous voyez bien que ça ne va pas chercher loin, de base !
Quand c’est long, c’est bon
Mais comme on l’a dit, ce background aura droit à une évolution construite et proprement développée au fil de l’aventure. En parlant d’aventure, d’ailleurs, sachez que vous aurez le choix de la difficulté pour la vivre, mais aussi, celui de la jouer en bénéficiant du scénario et de ses dialogues, ou en enchaînant simplement les stages pour profiter de l’action sans vous prendre le chou avec de la lecture. Une proposition intéressante que cette dernière puisqu’elle vous épargnera de vous retaper tous les textes en cas de second ou troisième run, ce qui risque d’arriver si vous appréciez le jeu. Pourquoi ? Parce que Freedom Planet offre une expérience au replay-value consistant dans la mesure où, même si les séquences scénaristiques restent communes aux 3 héroïnes, l’expérience de jeu et de découverte varie en fonction de leurs compétences propres et du chemin qu’elles choisissent d’emprunter.
En gros pour résumer, vous avez une trame unique, mais trois façons bien différentes de la suivre, donc trois jeux en un, en somme. Encore un bon point, qui est lié au fait que le level-design s’avère plus complexe qu’un simple run en ligne droite du début à la fin du stage, et que vous n’aurez pas accès à certaines zones impossibles à atteindre sans le personnage nécessaire (précisons qu’on ne change pas de perso en cours de jeu, donc il faudra recommencer avec les deux autres pour profiter de tout). L’exploration sera ici de mise, même si on est loin d’un metroidvania, et les plus assidus auront à coeur de récupérer le plus de diamants possible et de visiter tous les recoins pour s’assurer de ne rien avoir oublié.
Pas une simple copie
Résultat : là où un stage de Sonic pouvait se sécher en quelques dizaines de secondes, Freedom Planet incite le joueur à fouiner en profitant des capacités de son perso (grimper aux murs, effectuer un double saut, faire un dash Sonic-esque dans n’importe quelle direction, créer des plateformes de gélatine…), et il n’est pas rare de passer plus de 20 minutes sur un niveau. Élément positif ou négatif, à chacun de juger en fonction de ce qu’il attend de ce type de jeu.
Pour le reste, à savoir le gameplay commun aux 3 demoiselles, et donc en laissant de côté les spécificités individuelles, Freedom Planet est un mélange adroit de maniement à la Sonic et de combats en 2D type Shantae (entre autres). Aux Sonic, il emprunte certains passages à grande vitesse où on ne peut que regarder ce qui se passe de manière quasi-passive, les bumpers, les fameuses loops et ces diamants qui remplacent les anneaux (mais que vous ne perdez pas une fois touché). Pour le reste, quand le rythme ralentit, vous affrontez vos ennemis avec une attaque de proximité, et en fin de stage, vous avez droit au sempiternel boss dont il faut apprendre le pattern avant de lui poutrer le museau une bonne fois pour toutes. Classique, surtout que visuellement on n’a aucun doute sur les influences du titre, mais efficace comme ses ancêtres.
On a donc droit ici a un simili-Sonic coloré, vif, arborant des musiques bien choisies selon les ambiances du stage, au level-design intelligent, proposant une expérience différente selon le perso choisi, et doté d’une durée de vie conséquente. Les amoureux de la Mega Drive et des autres machines ayant accueilli du Sonic 2D devraient ne pas passer à côté.
Freedom Planet saura séduire les amateurs du hérisson de SEGA, mais pourrait ne pas être boudé par les autres si tant est qu’ils ne soient pas réfractaires aux platformers 2D à l’ancienne (Ristar, Rayman…). Une bonne petite surprise, et une lettre d’amour efficace à un personnage qui a eu ses hauts et ses bas.