Sorti le 10 juin 2025 après une longue phase de teasing et plusieurs previews, Dune: Awakening s’inscrit dans une volonté de revisiter le genre de la survie en monde ouvert, tout en y greffant les codes du MMO. Funcom, à l’origine déjà de Conan Exiles, s’attaque ici à un monument de la science-fiction, l’univers d’Arrakis, avec l’ambition de proposer une expérience immersive, systémique et multijoueur.
Mais que reste-t-il du MMO une fois en jeu ? Si Dune: Awakening coche de nombreuses cases techniques et mécaniques du genre, son ressenti penche souvent davantage vers une expérience coopérative “en parallèle”, dans lequel l’on progresse au sein d’un monde partagé sans réelle dépendance aux autres. Pourtant, après plus de 120 heures passées sur Arrakis, il est clair qu’un certain potentiel est là même pour celles et ceux qui ne se revendiquent pas comme fans absolus de la licence.
(Test de Dune Awakening réalisé sur PC via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Un Arrakis vivant, dense et fidèle à la licence
Dès les premières heures, Dune: Awakening frappe par la cohérence de son univers. La direction artistique retranscrit avec fidélité les teintes ocres et les immensités désertiques d’Arrakis, tout en proposant une vraie diversité topographique. Falaises escarpées, vallées rocheuses, canyons sinueux : la verticalité du level design est omniprésente et impose de penser ses déplacements en trois dimensions.
Le sentiment d’un monde vivant est renforcé par plusieurs mécaniques dynamiques. Des sables mouvants ralentissent ou piégent les imprudents, une grotte souterraine gigantesque demande de la prudence et une lumière fiable pour s’y aventurer, tandis que des crashs de vaisseaux ou des explosions d’épis viennent régulièrement bouleverser le paysage. On entend parfois au loin le cri du ver des sables, dont la seule présence suffit à modifier un plan d’exploration.
Les joueurs croisent parfois des enclaves ruinées, témoins d’une présence ancienne ou de technologies abandonnées même des résidents comme des esclavagistes présents dans certains camps et qui ne sont pas très amicaux tentent de vous accueillir à coup de fusil ou de dague.
Survie, craft et progression : une boucle solide, à affiner
La boucle de gameplay de Dune: Awakening repose sur des mécaniques classiques du genre survie, mais bien intégrées dans l’univers de la licence. Après un début de partie tendu – où la gestion de l’eau, l’exposition au soleil et la recherche d’abri imposent une forme d’itinérance prudente – on débloque rapidement les outils nécessaires pour stabiliser sa situation.
Cela passe notamment par la création d’armes, adaptées à différents styles de jeu (distance, mêlée, furtivité…), et d’armures aux propriétés variées : tenues légères pour la mobilité, armures lourdes pour l’absorption des dégâts, ou combinaisons “Distille” pour une meilleure gestion des fluides corporels (on parle bien de l’eau, pour éviter d’en perdre plus et d’en récolter plus efficacement). Il est également possible de construire rapidement une première base, qui permet d’avoir un premier chez-soi, un point d’ancrage pour stocker, crafter et s’organiser même si celle-ci est souvent abandonnée plus tard au profit d’une structure plus durable.
La création de base s’avère plus engageante qu’elle n’en a l’air. Outre la pose de modules et d’ateliers, elle demande une maintenance active. Il faut la fournir régulièrement en énergie, sans quoi elle commence à se détériorer à cause de l’environnement : érosion, sable, et surtout tempêtes de sable.
Le système de progression repose sur deux axes complémentaires. D’un côté, un système de niveaux d’expérience classique, obtenu en combattant, récoltant des ressources ou en complétant des quêtes. De l’autre, une ressource d’apprentissage que l’on collecte dans les camps ennemis ou lieux techniques. Ces points permettent de débloquer des recettes de craft via un onglet dédié dans l’inventaire.
De plus, Dune: Awakening propose un système de classes et de spécialisations relativement souple. À la création de personnage, on choisit une classe initiale (comme soldat ou Bene Gesserit), mais celle-ci ne verrouille aucunement la progression. En explorant le monde, on peut rencontrer des maîtres d’armes capables de renforcer sa classe de départ, mais aussi de débloquer celles que l’on n’a pas choisies. Il est ainsi possible de mixer les compétences actives, les passifs puissants, et même des passifs globaux pour se créer un build hybride personnalisé. Ce système encourage l’expérimentation plutôt qu’un rôle figé.
Au-delà de la simple fonctionnalité, Dune: Awakening propose également un système de personnalisation esthétique intéressant. Les armes et armures peuvent être modifiées visuellement grâce à des skins déblocables, qu’il s’agisse d’armures légères ou lourdes, ou encore des fameux distilles. Les joueurs peuvent aussi appliquer différents schémas de couleurs à leurs équipements, débloqués au fil de l’aventure ou via certaines missions.
Cette volonté d’offrir un minimum d’expression visuelle se retrouve également dans les véhicules, personnalisables de la même manière. Si cela reste purement cosmétique, cela contribue à renforcer l’attachement à son personnage et à sa progression.
Enfin, la récolte de ressources n’est pas à négliger : il faut souvent prévoir de vraies sessions de farm pour réunir les matériaux nécessaires à la fabrication des équipements avancés ou à la maintenance des bases. Ce n’est ni instantané ni cosmétique : cela fait partie intégrante de la boucle de progression.
Un socle technique convaincant, malgré quelques accrocs
Techniquement, Dune: Awakening tient solidement la route. Le moteur propose un rendu convaincant d’Arrakis, avec un traitement soigné des lumières, des textures de sable détaillées, et une gestion atmosphérique qui donne corps aux tempêtes, aux effets de chaleur, ou encore à la tombée du jour. Le désert n’est jamais vide : les reliefs complexes, les tempêtes localisées et les variations de biomes apportent une profondeur visuelle que peu de jeux de survie atteignent.
Côté performances, le jeu s’est montré globalement stable sur une configuration PC récente (RTX 3060, 16 Go de RAM, SSD). Le framerate est constant, même dans les zones ouvertes avec effets multiples. On note cependant quelques chutes ponctuelles notamment lors des événements météorologiques intenses ou dans les zones très peuplées. Des options graphiques variées permettent d’ajuster l’expérience selon sa machine, même si certains réglages intermédiaires mériteraient d’être mieux optimisés (notamment les ombres et le filtrage des particules).
L’interface est dense, mais claire. Le jeu propose une navigation par onglets bien organisée, avec une séparation nette entre inventaire, craft, recettes apprises, spécialisation, journal de quêtes… Un petit temps d’adaptation est néanmoins nécessaire, surtout dans les menus de construction et de permissions. Une aide contextuelle ou un didacticiel plus poussé ne serait pas de trop pour fluidifier l’entrée en la matière.
Sur le plan du réseau, Dune: Awakening a connu quelques instabilités durant ses premiers jours : déconnexions, problèmes d’accès aux serveurs et désynchronisations. Si de nombreux soucis ont été rapidement corrigés par Funcom, des problèmes de rollback et de désync ont encore été observés plusieurs jours après la sortie. Cela n’empêche pas de jouer, mais peut créer quelques situations frustrantes. Le studio s’efforce néanmoins de corriger les bugs rapidement, avec des correctifs fréquents et une communication régulière.
Enfin, mention spéciale pour l’ambiance sonore, discrète mais bien dosée. Les musiques aux tonalités orientales accompagnent l’exploration sans jamais s’imposer, et les bruitages – vents, pas sur le sable, cris lointains – participent activement à l’immersion. Le système de radio embarquée, disponible via l’inventaire, constitue une excellente idée : on peut choisir entre plusieurs stations, dont une dédiée à la musique orchestrale du jeu, une station “fermier” plus rythmée pour accompagner les sessions de récolte, et deux stations dédiées aux factions Harkonnen et Atréides, mêlant musiques, discours de propagande, et fausses publicités thématiques.
Une coopération parallèle dans un monde partagé
Présenté comme un MMO de survie, Dune: Awakening joue beaucoup sur l’ambiguïté de sa formule. Certes, le jeu se déroule sur des serveurs partagés pouvant accueillir jusqu’à 60 joueurs simultanés, et l’on croise régulièrement d’autres personnages en exploration ou dans les zones de récolte. Mais dans les faits, les interactions restent limitées, et la progression conserve un rythme très individuel.
Le système de coopération a toutefois quelques arguments à faire valoir. À défaut d’avoir des activités pensées pour le multijoueur (pas de raids, de boss de monde, ni d’instances à plusieurs), le jeu mise sur un modèle plus souple, basé sur le partage d’actions. Ainsi, si un joueur du groupe termine une quête, elle est validée automatiquement pour ses alliés au même stade de progression. De même, on peut interagir avec les constructions des autres joueurs pour débloquer certains objectifs, ce qui réduit la charge collective et permet d’optimiser les tâches.
La construction de base incarne bien cette philosophie : elle peut accueillir plusieurs joueurs, via un système de permissions très bien conçu. Le propriétaire peut désigner des co-propriétaires, capables d’ajouter des modules, de modifier les structures, et de gérer les ateliers. En revanche, la base ne s’adapte pas au nombre de joueurs : pas de guildes structurées, ni d’extensions dynamiques. La cohabitation reste fonctionnelle, mais ne produit pas de mécaniques nouvelles. C’est un lieu de mutualisation des ressources et de confort, sans impact sur l’échelle de jeu.
Quant aux systèmes sociaux, ils sont encore assez embryonnaires. Il est possible de créer une guilde, mais celle-ci se limite à une étiquette, sans système d’avancement, de zone dédiée, ou de mission de groupe. Le chat est peu utilisé, et les interactions reposent surtout sur des invites ponctuelles et la logique d’alliances spontanées. Le PvP, quant à lui, reste encore très discret, principalement circonscrit à quelques zones ou événements spécifiques.
Résultat : on se retrouve souvent à jouer à plusieurs, mais sans réelle interdépendance. On partage le monde, les ressources, les structures… mais chacun avance à son rythme, sans que la présence des autres ne soit jamais indispensable.
Des systèmes complexes à apprivoiser
Si Dune: Awakening se montre généreux en contenus et systèmes, tout n’est pas immédiatement lisible pour les nouveaux joueurs. Certains pans du jeu — pourtant structurants à long terme souffrent d’un manque de pédagogie ou d’introduction claire. C’est notamment le cas du Landstraad ou du système des Maisons, deux mécaniques liées à la structure politique de l’univers, mais dont l’utilité concrète n’apparaît pas d’emblée.
Ces éléments sont pourtant bien présents dans l’interface et dans les menus, mais le jeu laisse souvent le joueur en autonomie complète pour les découvrir et les comprendre. Dans notre cas, aucune aide extérieure n’a été consultée : ni guide, ni tutoriel vidéo, ni forum. Toute la progression s’est faite en s’appuyant uniquement sur le système de tutoriel intégré. Or, si ces outils couvrent efficacement les mécaniques de craft, de combat ou d’installation de base, ils restent assez légers sur les mécaniques systémiques ou méta-jeu, comme la politique, les factions, ou la progression à grande échelle.
Le sentiment dominant est donc celui d’une courbe d’apprentissage en escalier : les premières heures sont fluides, lisibles, très bien accompagnées. Mais dès que l’on commence à toucher à des systèmes plus profonds, le jeu laisse volontairement une zone d’ombre qui peut décourager certains profils, ou au contraire pousser à l’exploration volontaire. Ceux qui aiment « découvrir par eux-mêmes » y trouveront une forme de gratification, mais les autres risquent de passer à côté d’éléments de contenu importants simplement parce qu’ils ne sont jamais vraiment présentés ni contextualisés.
Le PvP source de malheur pour ceux en manque d’épis
Au lancement, Dune: Awakening proposait un modèle de PvP ouvert reposant en grande partie sur une unique mécanique : la zone du Deep Desert, qui concentrait les ressources les plus précieuses du jeu. Cet espace hostile et sans règle imposait aux joueurs de s’affronter sans restriction, les morts entraînant la perte totale du stuff et une forte pression sur chaque déplacement.
Ce choix de design visait à encourager la tension, le risque et le profit dans une zone reculée… mais a rapidement suscité une vague de critiques. De nombreux joueurs ont pointé un déséquilibre : les profils orientés PvE ou exploration ne pouvaient pas accéder à certaines ressources ou contenus de fin de jeu sans s’exposer à une boucle punitive, souvent dominée par des groupes organisés ou mieux équipés.
En réponse à ces retours, Funcom a partagé puis appliqué un changement majeur dès la fin juin 2025. Le Deep Desert est désormais divisé en deux parties :
- La moitié nord conserve les règles de PvP libre, avec ses points de contrôle et épaves convoitées ;
- La moitié sud devient une zone PvE, sécurisée, permettant aux joueurs d’explorer, récolter ou progresser plus sereinement.
En parallèle, plusieurs ajustements accompagnent ce changement :
- Nerf des ornithoptères scouts (20% de vitesse) pour limiter leur rôle d’outil de domination ou d’évasion ;
- Rééquilibrage du loot PvP, pour moduler l’impact des combats sans les rendre accessoires ;
- Meilleure lisibilité des zones à risque, via l’interface et les cartes de mission.
Après plus de 120 heures passées sur Dune: Awakening, une chose est claire : même si le jeu ne coche pas encore toutes les cases promises à sa sortie, on y retourne avec plaisir. Sans avoir une affinité particulière avec l’univers de Dune, on a trouvé dans cette proposition une expérience de survie exigeante, vaste, et plus profonde qu’elle n’en a l’air.
Ce n’est peut-être pas (encore) un MMO à proprement parler, ni un jeu pensé pour des groupes soudés en quête de raids et de donjons. Mais pour celles et ceux qui aiment explorer un monde systémique, poser des bases, tester des builds hybrides, expérimenter une montée en puissance et affronter les conditions hostiles d’un monde hostile, Dune: Awakening fonctionne déjà très bien.
Il reste des zones floues, des systèmes peu expliqués, et une promesse multijoueur à clarifier. Mais entre les mises à jour régulières, la communauté active et le socle déjà solide, on sent que le jeu peut encore évoluer dans le bon sens.