Après leur premier jeu Entwined basé sur le rythme, le studio californien PixelOpus continue son bonhomme de chemin avec un second titre un poil plus ambitieux. Annoncé en 2017, Concrete Genie a, dès ses premières images, retenu l’attention des joueurs avec une direction artistique plus que prometteuse. Une ville sans vie, des enfants et des monstres de toutes les formes, il ne nous en fallait pas plus pour lorgner dessus. Outre sa patte graphique intrigante, le jeu promettait une expérience unique régie par la manette Dualshock 4 et son capteur gyroscopique (nous y reviendrons évidement en temps utile).
Si l’on pense à Jet Set Radio dès qu’on mentionne des dessins sur les murs dans un jeu vidéo, Concrete Genie tente une approche plus poétique et moins effrénée. Et à dire vrai, ces derniers n’ont strictement rien en commun mis à part cette mécanique de jeu (rangez-moi donc ces rollers). Concrete Genie nous conte une histoire liée à l’enfance. Et comme chaque (belle) histoire, celle-ci commence par un drame.
(Test de Concrete Genie effectué sur PlayStation 4 Pro via un code fourni par l’éditeur)
Le pouvoir de l’imagination
Denska est une ville portuaire au bord de l’abandon. Les rues sont vides, les habitants ont déserté les lieux à la suite de divers événements regrettables. Seul le bruit incessant des vagues rythme les journées de cette petite ville dans laquelle il faisait si bon vivre. Il y a quelques années, la vie était belle à Denska. On entendait les rires des enfants et même, si on était chanceux, le cri du phoque venu amuser la galerie par ses acrobaties. Malheureusement, la ville animée n’est plus qu’un lointain souvenir. La vie n’est plus, les couleurs ont disparu. Ash aime errer en ces lieux désolés. Jeune garçon solitaire, celui-ci aime la tranquillité et recherche la solitude pour s’adonner à son carnet de dessin.
En réalité, Ash est orphelin et Denska lui rappelle ses parents, d’où son attachement particulier. On le disait en introduction, un drame se prépare. Les crapules des environs violent notre héros et mettent les mains sur son carnet. Carnet qu’ils déchirent page par page devant lui. Après ce larcin, Ash se retrouve seul, désemparé, car le seul réconfort qu’il avait vient de s’envoler aux quatre coins de la ville. Dans ces ténèbres, une lueur se fait sentir au phare. Une fois sur place, Ash fait la rencontre de l’une de ses créations dessinées, un génie aux drôles d’allures capable de se déplacer dans les murs. Et Concrete Genie déploie ainsi toute sa magie…
Luna, le nom du monstre rigolo, lui donne un pinceau magique et une quête : se débarrasser de la matière noire disséminée partout en ville. Cette matière caractérise deux choses : les ténèbres enfouies dans le cœur des habitants et la marée noire. D’apparence enfantine, le message de Concrete Genie est bien plus profond qu’il n’y parait. Deux sujets sont abordés : la difficulté de l’enfance (harcèlement, divorce des parents, deuil…) et l’écologie.
Mais il faudra se montrer curieux pour comprendre pleinement le deuxième point. Le sinistre destin de Denska est raconté via des coupures de journaux dissimulées ici et là, à vous de les collecter et de les lire pour comprendre pleinement les événements. PixelOpus a soigné sa narration pour nous délivrer une histoire à plusieurs couches, une vraie réussite.
Un tableau réussi
Comment redonner vie à une ville décatie ? En peignant ses murs de toutes les couleurs ! Armé du pinceau magique, il faudra mener vos génies au cœur des cinq quartiers qui composent le jeu. Dans un premier temps, il faudra partir en exploration et retrouver les pages manquantes du carnet pour apprendre divers motifs. Une fois récupérées, vous pourrez créer le génie de votre imagination. Petit, grand, allongé ou plutôt boursouflé, avec une queue touffue ou un chapeau, vous êtes maître de votre pinceau via la manette et sa fonction gyroscopique. Levez la manette et le pinceau se lève. Certes, la précision laisse à désirer, mais la recette fonctionne.
Et quel plaisir de voir ses créations s’animer devant nos yeux ! Ces dernières vous saluent et vous pouvez interagir avec elles. Oui, en l’espace de quelques minutes, on redevient un enfant qui s’imagine mille aventures avec son dessin. Très vite, on perd notre objectif principal et on s’amuse à dessiner partout, sur tous les murs, tous les motifs disponibles : herbe, papillons, lune, étoiles… notre imagination n’a plus de limites.
En réalité, Concrete Genie se compose de deux phases bien distinctes et au gameplay bien différent. La première, comme on l’indiquait un peu plus haut, consiste à mener ses génies d’un point A à un point B en évitant les obstacles. Par moment, votre génie se bloquera et exigera une peinture spécifique, il faudra alors peindre le bon motif pour le satisfaire et pour qu’il reprenne sa route, les étoiles plein les yeux.
Attention tout de même, les voyous rodent et la discrétion sera de mise, du moins dans un premier temps. La seconde phase se sépare de la partie créative pour se rapprocher de l’action. Nous ne détaillerons pas davantage, car ce revirement de gameplay est une surprise qui participe grandement à la qualité du jeu. Retenez simplement qu’il faudra se monter plus agressif avec ses ennemis… Néanmoins, Concrete Genie manque cruellement de défis, on roule sur le jeu sans rencontrer une once de difficulté.
Enfin, le jeu dispose d’une option VR dans laquelle il faudra le casque et les manettes PS Move. Il s’agit ici d’une expérience fort agréable où l’on pousse sa créativité au maximum. Vous pourrez peindre un tableau vivant à votre convenance, un mode bonus plus que bienvenu et qui se greffe parfaitement au jeu.
On ne s’attendait pas à une telle expérience. Concrete Genie est unique en son genre, une belle aventure humaine et aux messages on ne peut plus sérieux. PixelOpus réussit son pari haut la main et nous présente un tableau plus que convaincant.
Seuls le manque difficulté (et donc d’implication) et une certaine redondance sont à pointer du doigt. Une énième preuve que le jeu vidéo peut nourrir imagination et bienveillance.