Difficile de ne pas verser une larme de nostalgie en pensant à notre enfance… Berceau de nos goûts et de notre identité propre, quel que soit notre âge aujourd’hui, elle nous aura permis d’apprendre les codes de nos vies et constitue, pour la majorité, la partie la plus douce et joyeuse de nos existences, comme une période d’insouciance avant les tempêtes adolescentes et la morosité du quotidien d’adulte… Et parmi ces plaisirs propres à notre jeunesse, pour certains d’entre nous, il y avait le fait de se coller devant la télévision au petit matin pour observer les acrobaties de guerriers colorés, maravant du monstres en caoutchouc à grand renfort de coups de pied sautés, le tout entre 2 poses bien senties (sentai pour les non-initiés).
Si vous êtes de ces derniers, Chroma Squad s’adresse en priorité à vous. Effectivement, ce titre servi par Behold est en fait un hommage à cette culture bis et plus particulièrement à Power Rangers, coup de génie bricolé par Saban pour nous vendre des productions japonaises, transformées pour la télé occidentale afin de nous vendre des figurines déjà sur le marché (vraiment du génie quoi !). Bref, là n’est pas le sujet. Sorti il y a déjà quelques années sur PC, puis sur consoles et appareils mobiles, il est enfin venu le temps pour la Switch d’accueillir le soft. Le titre a-t-il su conserver son panache ? Peut-il combler le profane ? Est-il assez complet pour satisfaire les fans de stratégie ? C’est ce qu’on va vérifier.
Un petit scotch ?
Éliminons le but d’entrée de jeu, l’approche choisie par le studio Behold pour rendre hommage est la meilleure idée qui soit. Effectivement, plutôt que de nous amener à suivre les aventures de héros vêtus de tenue moulante et colorée, Chroma Squad retourne la balance et nous offre de découvrir l’envers du décor. Nous y suivons une troupe d’acteurs. Ces derniers, lassés de travailler sous la coupe d’un réalisateur tyrannique et en quête d’argent et de gloire, décident du jour au lendemain de quitter leur travail et dirigés par leur passion commune, se lancent dans la fondation de leur propre studio de cinéma. Bien entendu, la suite, vous la voyez venir, ils vont être confrontés aux contraintes de la création d’une série avec ce que ça implique et les différents obstacles qui peuvent en découler (évoquons à titre d’exemple leur ancien patron, assoiffé par la vengeance ou les emplois du temps personnels des acteurs).
Oui, c’est simple sur le papier mais la force de ce scénario, c’est qu’il épouse tout les aspects du titre tout en restant un hommage fidèle au genre. Déjà, grâce à ce parti-pris, le soft peut aborder avec légèreté ce que nous savons tous à présent, que la série était un tour de force du bricolage (faut dire qu’ils ont réussi à nous faire croire que des darons japonais bondissant dans des costumes moulants étaient en fait une bande d’ados). Mais en plus, il s’associe parfaitement avec le gameplay, justifiant tout les aspects du jeu dans la foulée. Pas de tuto lourdingue, tout se distille tout naturellement avec un peu de talent (on y revient plus tard).
Du coup, quoi de mieux pour illustrer cette fresque que des graphismes qu’on associera avec cette époque ? Oui, c’est de nouveau du pixel art mais voilà le travail. Aussi bien dans les scènes de dialogue que dans les combats ou même dans les divers scénettes du titre, ce pixel art soigné dépeint des personnages vivants et dynamiques, des décors élégants et élaborés et des poses souples. Jointe à un sens de l’humour subtil et maîtrisé et une écriture de qualité, l’histoire se traverse avec beaucoup de plaisir. Chroma Squad est un vrai tour de force aussi bien dans l’hommage nostalgique mais pas dithyrambique, que dans l’humour, taquin mais jamais assassin.
La stratégie prend la pose
Dans les faits, Chroma Squad est donc un jeu de stratégie au tour par tour dans lequel vous menez une escouade de 5 personnages en combat. Les combats sont en fait les épisodes en question et peuvent être découpés en 1 ou plusieurs scènes. D’un point de vue gameplay, on a affaire à un mélange entre X-Com et Final Fantasy Tactics. Sur un échiquier, vous manipulez chacun de vos personnages et devez éliminer les forces ennemies. Soit vous commencez vos combats en costume, soit sans. Si la partie commence sans costume, vous n’aurez accès qu’à une partie des coups disponibles de votre arsenal. Forcément, les combats au corps à corps mais également une action collective permettant d’atteindre des zones plus éloignées (façon Mario+ The Lapins Crétins: Kingdom Battle) ou de frapper à plusieurs 1 ennemi. Une fois une jauge remplie, vous pourrez donc muter vos personnages en leurs formes colorées et là c’est festival. Si la base est semblable, ces derniers pourront à présent utiliser armes et coups spéciaux mais également un ultra-finishing move, si tout le monde se ligue contre un personnage. Enfin, pour pimenter l’action et vous forcer à réfléchir, des petites missions sont disponibles. Ces challenges vous octroieront divers bonus (sous la forme d’audimat) nécessaires à votre progression.
Mais il y a plus à Chroma Squad qu’un jeu de stratégie. Effectivement, quand vos personnages ne seront pas occupés à faire des vannes ou à gagner de l’audience, ils amélioreront le matériel et le studio. Forcément, c’est sous la forme d’un jeu de gestion que va se présenter cette partie-ci. Chaque épisode accompli avec un certain succès vous permettra de faire le plein d’audimat, ces points seront ensuite convertis en argent à dépenser pour divers effets. Avec, vous pourrez acheter armes et armures afin de renforcer vos personnages en combat (bonus statistiques ou compétences peuvent être acquis comme ça). Mais vous pouvez tout aussi bien investir dans votre studio, générant ainsi plus d’audimat à chaque épisode et donc plus de moyens afin de prospérer. La surprise ? C’est qu’il s’agit souvent de locations, comprenez donc que vous payez pour ces bonus à chaque épisode. Il vous faudra donc vous assurer de bien compléter chacune des missions pour gagner le plus d’audimat possible. Notez enfin que, si vous avez l’amour du travail bien fait, il vous est possible de crafter votre propre matériel en utilisant les pièces tombées d’ennemis ou en recyclant vos anciennes armures. Ça peut servir…
2 expériences ? Allez, on va en mettre 3 ! Il s’agit probablement de l’aspect le plus attirant du soft. Effectivement, quand on pense aux héros de Saban, on pense aussi aux robots géants et aux combats dans des villes en proie à des rayons lasers et à la violence entre 2 titans qui se cognent dans les rues à coups d’immeubles. Eh bien, ça aussi il y a ! Seulement, il faut le reconnaître, c’est assez décevant. Si l’expérience se présente comme un jeu de combat, il s’agit en fait d’un mode ou vous devez choisir vos options parmi plusieurs choix liés aux pièces qui forment votre robot. Votre choix générera une jauge sur laquelle défilera un curseur. Il vous faudra juste cogner le bouton au bon moment… Pas terrible en fait…
Quid du portage ?
Faute à un soft d’une grande simplicité, Chroma Squad se porte comme un charme sur Switch. Le gameplay est accessible et tout répond très bien, l’image est nette aussi bien en portable que sur la télévision. Enfin, le soft en lui-même ne consomme pas gourmand en énergie. De plus, grâce à son format épisodique ou même à ses missions en plusieurs parties, le titre se prête très bien au jeu du « allez, une petite vite fait pour la route ». Un joyau d’accessibilité à tout moment !
Cependant, nous tenons à signaler que certaines personnes pourraient trouver le jeu relativement répétitif. Effectivement, enchaîner les missions pourrait engendrer un léger inconfort et ce malgré les efforts pour renouveler les zones, les objectifs et les challenges. Dieu merci, les dialogues ne se répètent pas souvent (sauf si le rire visé est celui dû au comique de répétition), ça peut permettre d’étouffer cette impression.
Chroma Squad est une valeur sûre. S’il ne renouvelle rien, il pioche chez tous les cadors afin de proposer aux fans, qu’ils soient amateurs de sentai ou de stratégie, une expérience riche mais accessible. La direction artistique, l’écriture et le scénario simple et fendard sont à la fois au service d’une expérience complète mais surtout des fans qui trouvent ici un des meilleurs jeux traitant ce thème. Hormis de légers problèmes et une certaine répétitivité, Chroma Squad est un titre excellent qui trouvera sa place dans toutes les mains… à moins d’être allergique aux héros en tenue moulante…
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