Entre Assassin’s Creed et Ubisoft, c’est une longue histoire d’amour. L’année 2007 a vu naître la Confrérie, à l’époque où le premier héros de la saga, Altaïr Ibn La-Ahad, parcourait les rues de Jérusalem à la recherche de templiers à éliminer. Mêlant infiltration, histoire prenante et affrontements sanglants, la franchise donna naissance à un point de vue nouveau du genre action-aventure. Au fil du temps (et des époques), Ubisoft s’est accoutumé à emmener ses joueurs redécouvrir bon nombre de périodes ayant marqué l’Histoire, à l’image de la Rome Antique, l’âge d’or de la piraterie, la Révolution française ou encore l’Amérique du XVIIIe siècle.
C’est en 2016 que le studio décide de prendre un nouveau virage pour Assassin’s Creed, ramenant ses joueurs au cœur de l’Égypte antique, puis de la Grèce, avant de faire un détour chez les vikings avec Assassin’s Creed Valhalla. Ce fut une direction risquée, d’autant que les différents scénarios et extensions proposés s’écartaient on ne peut plus expressément des limites du réel et du lore de la saga, transformant les assassins en véritables héros ou réceptacles divins, en proie aux dieux et aux dragons.
Mais c’est trois ans après cette fameuse trilogie, qui avait su diviser les fans malgré elle et tourner le dos aux puristes, que la saga Assassin’s Creed tente de faire revenir ses amoureux en optant pour un opus plus simple, adoptant donc les codes d’une génération d’assassins tombée aux oubliettes depuis la sortie d’Assassin’s Creed Origins en 2016. La sortie de ce nouvel opus saura-t-elle relancer la saga ? C’est en laissant les équipes d’Ubisoft Bordeaux s’occuper du projet qu’Assassin’s Creed Mirage monte sur ses grands chameaux.
(Test d’Assassin’s Creed Mirage réalisée sur PS5 à l’aide d’une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Basim Ibn Ishaq et les quarante dirhams
Assassin’s Creed Mirage prend place dans le Moyen-Orient du IXe siècle, quelques années avant les événements de Valhalla, durant l’âge d’or de l’Islam, à l’époque où la ville de Bagdad était la cité la plus influente du califat abbasside, voire du monde. L’histoire de ce nouveau volet nous plonge dans la jeunesse du maître assassin Basim Ibn Ishaq, apparu dans le dernier opus, dans les temps où il n’était qu’un simple voleur des rues.
Et en quelques heures de jeu seulement, il ne sera pas difficile d’admettre que tous les codes du Moyen-Orient ont été respectés par les équipes bordelaises. Bagdad est vivante, dynamique, les bazars sont aussi bruyants que les rues sont colorées et laissent échapper à chaque tournant leurs épices et musiques venues d’Orient. Tout est réuni avec brio pour nous plonger le plus rapidement possible dans l’atmosphère du titre.
Dans la peau d’un voleur, nous ne pouvions pas rêver mieux que la capitale du califat abbasside comme terrain de jeu. Le titre met un accent sur le parkour, et il semblerait que la ville aussi. Tout à Bagdad est fait pour être enjambé, arraché, détruit, brûlé, escaladé ou bien encore volé. Et puisqu’un voleur n’en est pas un s’il ne dérobe les bijoux de personne, une bonne partie des citoyens de la ville portera des objets qu’il sera possible de dérober. Cette mécanique se présente sous la forme d’un mini-jeu dans lequel il suffit d’appuyer dans la zone au bon moment pour dérober les différentes babioles et pièces disponibles.
Ainsi, nous apprécierons rapidement la dualité entre l’ancien voleur des rues et l’assassin fraîchement arrivé au sein de la Confrérie (appelée ici « Ceux qu’on ne voit pas »). Basim saura donc facilement jongler entre celui qui dérobe tout ce qui bouge et celui qui assassine tout ce qui craint, afin de devenir un maître assassin digne de ce nom. Les fans les plus aguerris de la saga feront rapidement le parallèle avec Altaïr Ibn La-Ahad, premier héros de la franchise qui, quant à lui, voyait son aventure défiler sous les lois de Jérusalem.
Assassin’s Creed Mirage est un hommage certain aux anciens opus, en particulier le premier, et le titre sait se faire voir comme tel, un présent des plus agréables à l’occasion des 15 ans d’Assassin’s Creed.
Animus, ouvre-toi !
Plus qu’un hommage, la production va reprendre toutes les formules appréciées par les joueurs depuis toujours, tout en ajoutant de nouvelles mécaniques d’infiltration et d’assassinat. Alors que les trois derniers opus nous mettaient dans la peau de héros capables de vaincre trente ennemis en deux temps, trois mouvements, Assassin’s Creed Mirage reprend le système de combat classique, privilégiant l’assassinat discret et l’infiltration au bourrinage effréné de la trilogie précédente. Ainsi, les seuls mouvements qu’il sera possible d’effectuer en affrontement seront les suivants : attaquer, parer, esquiver, envoyer des projectiles.
Ainsi, plus de système de niveaux, plus de pouvoirs venus de Tataouine-les-bains, mais seulement de Bagdad. De toute manière, il semblerait qu’au cours de ce nouvel opus, Ubisoft oblige ses joueurs à opter pour l’infiltration, tant le système de combat au corps à corps deviendra impossible à gérer dès lors qu’un trop grand groupe d’ennemis se tiendra face à nous. Et pour revenir sur la dualité voleur/assassin qu’il était intéressant de souligner, nous verrons que Basim disposera d’outils à l’image de la bombe fumigène, du couteau de lancer ou de la sarbacane, afin de faciliter ses différentes missions et récupérer un document ou un coffre en toute discrétion.
Aussi, Basim disposera d’un arbre de compétences permettant d’accroître sa vision d’aigle, de débloquer de nouvelles capacités ou bien encore d’améliorer ses différents atouts. Cette fois-ci, l’arbre est beaucoup moins conséquent que celui d’Origins ou des constellations de Valhalla, mais cela reste amplement suffisant pour ce que proposent nos aventures à Bagdad.
Nous remarquerons par ailleurs qu’au cours d’Assassin’s Creed Mirage, aucune des propositions ne nous paraîtra insuffisante, puisque l’on sait sous les couleurs de quel drapeau se place le titre. Ainsi, qu’il puisse s’agir de l’arbre de compétences, de la quantité de mécaniques, de la taille de la map ou bien encore de la durée de l’histoire du jeu, nous n’oublions à aucun moment que Mirage n’est qu’un retour aux sources, une relance, comme un nouvel élan pour faire revenir les puristes avant de faire perdurer la saga à nouveau.
Nous noterons cependant que nous n’avons été en contact avec Abstergo à aucun moment durant notre périple, ce qui signifie que nous sommes restés à Bagdad dans la peau de Basim tout au long de notre voyage sans qu’aucune interaction n’ait eu lieu avec un héros du monde moderne à l’image de Leïla Hassan, présente dans les trois derniers opus. Il s’agit là du seul point qui éloigne la production du lore de la série.
Qui a pillé ce quartier ? Le Colonel Moutarde ou un membre de l’Ordre ?
Dans Assassin’s Creed Mirage, nous avons une fois de plus affaire à l’Ordre des Anciens, une organisation criminelle introduite avec Assassin’s Creed Origins. Ainsi, l’histoire du jeu se déroulera comme une enquête où chacune des cinq cibles à abattre saura se faire démasquer par bon nombre d’indices trouvés au cœur de chacun des quartiers de Bagdad. Et malgré une introduction réussie, nous savons qu’entre Assassin’s Creed et les histoires qui tiennent en haleine, il y a 36 mondes.
C’est alors que l’on nous place une fois de plus en héros au sein d’une histoire répétitive, reprenant le même schéma narratif au cours de chacune des quêtes principales. Un QG, un informateur, un document, une cible, un assassinat. Répétez ce schéma cinq fois et vous obtiendrez le périple de Basim.
Il sera également décevant de voir que la dimension du cauchemar apportée par le djinn qui hante Basim n’a pas été assez explorée par le titre. Peut-être aurait-on aimé voir le djinn prendre possession du corps du héros afin d’impacter le gameplay, là où Assassin’s Creed Mirage ne nous fait voir le démon qu’une fois tous les 36 du mois, à tel point qu’il nous arrivait d’oublier son existence au sein de l’histoire.
Assassin’s Creed Mirage est un véritable retour aux sources pour la saga d’Ubisoft. Le titre reprend avec audace les codes des premiers jeux de la franchise et sait nous faire re-goûter aux saveurs de 2007. Nous ne pouvions pas rêver mieux que de partir au Moyen-Orient pour relancer la saga, l’univers de la production est on ne peut plus adapté à l’essence d’Assassin’s Creed et le protagoniste fonctionne, tout comme ses talents de voleur parviennent à être pleinement exploités au travers des différentes mécaniques de jeu et de combat.
La ville de Bagdad est vivante, colorée, et tous les codes du Moyen-Orient ont été respectés. Assassin’s Creed Mirage a revêtu ses meilleurs arguments pour nous faire goûter à un nouveau voyage, tout en nous replongeant dans la qualité des anciens. Les formules passées font plaisir à voir et l’infiltration est d’autant plus jouissive quand on sait que la série peut enfin reprendre ses droits.
Seul point noir persistant au sein du titre : une histoire qui ne fonctionne qu’au début et à la fin, déroulant ses événements sur les tapis rouges d’une enquête répétitive et bien trop guidée pour devenir plaisante. Espérons simplement que les prochains opus sauront entendre raison afin de proposer une narration plus qualitative.
Reste à attendre la sortie officielle d’Assassin’s Creed Jade sur mobiles, puis d’Assassin’s Creed Red en 2024, afin de voir si les décors d’Asie marcheront aussi bien que les rues de Bagdad.