Quel meilleur moment que la sortie de l’héritière de la Switch pour enfin conclure notre bilan sur la vie de cette machine, en passe de devenir dans les prochains mois la console la plus vendue de l’histoire. Après une première partie axée sur la lancement de la console, puis une seconde conclue sur le succès insolent de Nintendo qui a réussi, parfois par stratégie, d’autres fois par chance, à marcher sur l’eau durant des années, voyons comment s’est déroulée la fin de règne, bien moins glorieuse. Les défis qui attendent Big N à l’avenir pourraient bien être insurmontables.

Une machine de tous les records
Mais en attendant cette fin, Nintendo continue de vendre sa Switch par palettes, malgré un catalogue pas toujours brillant. Paper Mario and the Origami King, les remakes de Pokémon Diamant et Perle, Mario Party Superstars… les déceptions sont nombreuses mais pourtant, commercialement, tout continue de rouler et les ventes invraisemblables d’un Animal Crossing New Horizons (11 millions d’exemplaires écoulés en onze jours…), et même les plus de 10 millions de Pokémon, malgré un accueil critique très frais, conforte le géant nippon dans sa stratégie.
Ainsi, chaque année, et malgré un contexte sanitaire qui a forcément, suite aux confinements de 2020, retardé de nombreux développements, le constructeur continue de proposer un maximum de titres maison, qu’importe qu’ils soient ou non à la hauteur des attentes des joueurs, tant que les ventes suivent. C’est à ce moment qu’on a pu constater les prémices du déclin éditorial de Nintendo, celui-ci laissant finalement régulièrement les clés de la continuité de son succès à des partenaires, à commencer par Capcom et son Monster Hunter Rise, exclusivité Switch à ce moment-là.
Il n’est sans doute pas innocent que Nintendo s’est mis alors à multiplier les « Partner Showcase », ses temps de communications centrés sur les éditeurs tiers. Enfin Nintendo a réussi à attirer des partenaires majeurs (Capcom, CD Projekt Red, Atlus, Square-Enix, Warner Bros., Ubisoft…) et continue d’accueillir à bras ouverts les indés du monde entier pour alimenter son eshop. Mais paradoxalement, bien que Nintendo soit en roue libre, tous les signaux restent au vert.
Même les sorties des PS5 et Xbox Series en 2020 n’ont pas ralenti sa marche en avant. L’inquiétude de voir sa Switch mise au rebus technologique à cause de l’arrivée de machines bien plus puissantes n’a pas durée, bien aidé en cela, il faut le dire, par la pénurie des composants qui ont mené à une absence totale de machines « next gen » dans les étals pendant des mois et des mois, alors que des Switch classiques, Lite et Pro Oled étaient disponibles en quantité.
Alors on pourrait continuer à énumérer les formidables succès de Nintendo durant toutes ces années, avec du Pokémon toujours au firmament (commercialement, parce que ludiquement et, surtout, techniquement, ce n’est pas la joie), du Kirby et le monde oublié, du Nintendo Sports ou du Splatoon 3, mais ce serait répéter ce qu’on a déjà mis en exergue. La Switch est un carton phénoménal et toutes les licences ou presque de big N bénéficient d’un coup de boost indéniable, faisant généralement des opus sortis sur Switch les plus grands succès de leurs licences respectives.
Pour citer néanmoins quelques chiffres ronflants, la Switch, c’est 21 jeux vendus à plus de 10 millions d’exemplaires, plus de 70 jeux vendus à plus d’un million. Au global, sur les dix meilleures ventes de jeux Nintendo de l’histoire, quatre sont des jeux Switch (Mario Kart 8 Deluxe, Animal Crossing New Horizons, Super Smash Bros. Ultimate et Breath of the Wild), et dans le top 30, on en compte 10. Nintendo a régulièrement été habitué à de très forts succès, mais jamais dans ces proportions, et il n’existe aujourd’hui que peu de doutes sur le fait que la console finira par détrôner la PS2 de son piédestal en dépassant les 160 millions de consoles vendues.
Le début de la fin
Mais voilà, après plus de six ans à piétiner la concurrence, Nintendo va peu à peu se piétiner lui-même, cannibalisant ses propres sorties du fait de ses immenses succès. Pire encore, les licences ayant bénéficiés de plusieurs épisodes sur Switch se vendront souvent moins bien pour le second opus (Fire Emblem Engage, Hyrule Warriors : L’ère du Fléau, Super Mario Wonder, Xenoblade Chronicles 3…), y compris chez les tiers. Le nombre moyen de jeux achetés par ses utilisateurs reste au final autour des dix et forcément, après du Breath of the Wild, Smash Bros., Animal Crossing, Mario Odyssey ou Mario Kart, il ne reste plus beaucoup de place pour les autres nouveautés
Tout le monde attend la prochaine génération de machine, les joueurs, les éditeurs, les développeurs… Tout le monde sauf Nintendo qui étire encore et encore, quitte à mettre sous respirateur artificiel la vie de sa console. Les derniers jeux des licences maison (souvent développés en externe d’ailleurs) seront tous plus décevant les uns que les autres et on se rend bien compte que les grosses cartouches ont été mises au placard afin d’avoir de quoi alimenter la future génération, et ainsi se prémunir d’un fiasco à la Wii U.
On pourrait d’ailleurs virtuellement définir comme la fin de la génération la date de sortie de Zelda: Tears of the Kingdom, en mai 2023, et ses 10 millions de ventes en trois petits jours. Il y a bien eu un (excellent) Pikmin 4 ou un Super Mario Wonder en fin de cette année, mais on a plus affaire là à un (joli) baroud d’honneur qu’à un retour en grâce éditorial pour la console.
Ainsi, dès 2024, c’est véritablement morne plaine du côté de Nintendo. Même le développement de Zelda: Echoes of Wisdom ou Mario et Luigi : L’épopée Fraternelle ont été confié à des partenaires. Et pour alimenter son catalogue, on continue de recycler, encore et encore, et surtout, sans effort. Les déceptions s’enchainent (Donkey Kong Return, Princess Peach Showtime!, Luigi’s Mansion 2…) et on remise peu à peu la machine au placard, ne la sortant qu’au gré d’une pépite indée ou d’un éditeur tiers.
Nintendo préparerait-il enfin la relève ? La Switch 2 est sur toutes les lèvres, le moindre haussement de sourcil d’un quelconque ponte du constructeur nippon génère une flopée de spéculations, jusqu’à ce qu’enfin, une de ces « prédictions » finisse par s’avérer et que l’héritière de la machine hybride soit révélée, le 16 janvier 2025. Et, comme on pouvait s’y attendre, plus qu’une révolution, c’est une évolution qui nous est proposée, ce qui pose forcément de nombreux nouveaux défis à relever pour l’entreprise si elle veut ne serait-ce que s’approcher du succès de sa grande sœur.
Un public à (re)conquérir
En proposant une machine aussi proche de la précédente, Nintendo ne peut pas se contenter de « juste » la mettre à jour technologiquement. L’effet de surprise du concept hybride entre machine portable et de salon ne fonctionnera plus, et pour le moment, on ne peut pas dire que la console ait marqué des points, sur le papier. Un prix jugé trop élevé, surtout pour ses jeux et ses accessoires, et un line-up très pauvre, où seul Mario Kart World servira de locomotive.
Et pourtant, son succès au lancement semble déjà presque acquis. Que ce soit du côté de Micromania ou la Fnac, on parle ouvertement d’un nombre de précommandes record, et nul doute que cet emballement en France doit se produire aussi un peu partout dans le monde. Bien entendu, c’est à la fin du bal qu’on paie les musiciens et il faudra voir si les chiffres seront aussi prometteurs, notamment après son premier Noël, et si les freins éditoriaux et commerciaux auront in fine un notable impact sur les ventes.
De plus, et au regard de la mise en avant importante de Nintendo pour son Online sur cette nouvelle génération, on ne peut pas imaginer que le constructeur reste autant à la ramasse à ce niveau. On s’attend désormais à ce qu’il nous propose des serveurs bien plus performant pour le jeu en ligne et un eshop bien plus véloce notamment. En ce sens, le lancement de la machine avec Mario Kart World en tant que porte étendard sera un véritable défi pour éprouver cet aspect, surtout à 24 joueurs en ligne.
On espère également que Nintendo, peut-être à la faveur d’un direct qu’on subodore arriver courant juin, nous offre une vision claire de l’avenir du catalogue Switch 2. 2025 s’annonce, bizarrement, assez calme, avec, pour le moment, Donkey Kong Bananza en juillet et Pokemon Legend ZA et Metroid Prime 4 vers la fin d’année. Il ne manquerait pas un certain plombier moustachu pour que la danse soit vraiment complète, ou peut-être une dernière surprise de derrière les fagots pour conclure l’année en beauté ?
Avec sa Switch, Nintendo s’est bâti un vivier impressionnant de licences à succès. On regarde d’un autre œil les Zelda, Fire Emblem, Metroid, Splatoon, Animal Crossing… qu’auparavant, et il semble évident que les studios internes vont capitaliser dessus sur Switch 2. Mais sera-t-il vraiment possible de faire mieux ? Peut-on réellement imaginer une nouvelle révolution à la Breath of the Wild ou un Smash Bros. plus « Ultimate » encore ?
La Switch 2 n’est-elle pas condamnée à faire forcément moins bien que la génération précédente, laquelle a bénéficié de tous les coups de pouce du destin pour surperformer ? D’ailleurs, à l’instar de Playstation et Xbox, Nintendo peut-il vraiment se permettre de passer brutalement à la nouvelle génération ?
Avec un parc installé de plus de 150 millions de machines, il n’est pas dit que les prochains AAA de l’éditeurs soit tous des exclusivités next gen. Et c’est sans doute là le plus gros défi que devra relever Nintendo, trouver cet équilibre entre convaincre les joueurs de franchir le pas avec de nouvelles expériences exclusives tout en continuant de contenter et capitaliser sur les possesseurs actuels de la première Switch.
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