C’est sans doute la controverse la plus inattendue qui aura croisé le chemin de ceux qui s’intéressent à Starfield. Le train de la hype n’est pas encore vraiment parti (on rappelle que la grande présentation du jeu est en juin) que déjà les vautours rôdent au-dessus de la locomotive, à la recherche de critiques faciles et du bashing habituel des productions signées Bethesda. Non pas que le studio californien délivre des copies parfaites, loin de là, mais à critiquer ce qui n’est pas pertinent de l’être, on s’abaisse et on dégrade la valeur de ses critiques futures, toutes justifiées fussent-elle. Pire, on renforce la mauvaise perception qu’ont les gens de la presse spécialisée.
Commençons par une brève remise en contexte. L’Entertainement Software Rating Borad (ESRB), soit le bureau américain d’évaluation des jeux vidéo, dont la mission est de juger à quelle tranche d’âge un jeu s’adresse et de surveiller les productions marketing publiques, a récemment évalué Starfield et lui a donné un « M », c’est-à-dire qu’il juge que le titre est destiné à un public de personnes âgées d’au moins 17 ans, du fait de contenus relativement matures : utilisation de drogues, présence de certains dialogues mentionnant des relations sexuelles et de dialogues vulgaires. Afin de justifier sa notation, l’organisme a révélé que le jeu contenait des dialogues suggestifs après que le personnage du joueur a vraisemblablement eu une relation sexuelle avec un PNJ (scènes non représentées dans le jeu), et a cité des exemples de répliques provenant du jeu : « La vie est une maladie transmissible qui est létale à 100% », « Je suis pour qu’on se laisse aller, mais la prochaine fois faisons-le sans jetpacks » et « À propos d’aller tutoyer les étoiles, wow c’était incroyable ».
Immédiatement, des sites renommés sont montés au créneau pour se gausser de l’écriture : PCGamer considère qu’il s’agit là rien de moins que « Les pires dialogues post-relations sexuelles jamais vus », Gamespot les décrit comme « Bizarres » et « Bêtes » tandis que Kotaku les considère comme « malaisants » et se moque des fans du studio en disant qu’ils pourront aller « pénétrer un dragon dans le prochain Elder Scrolls ».
Ce que perdent de vue ces journalistes et rédacteurs, c’est que le jeu ne s’adresse pas seulement à des adultes, expérimentés sur le sujet, mais également à des adolescents et de jeunes adultes. Il s’adresse également à des gens qui sont à une période de la vie où l’on découvre les relations sexuelles, où l’on fantasme gentiment de sortir avec un(e) camarade de classe. Ceux qui veulent y voir leurs fantasmes personnels, à la manière du fétichisme d’un Cyberpunk, se trompent de sujet et de jeu. Ce qu’ils perdent également de vue, c’est que Starfield est un RPG, et plus encore un RPG Bethesda dans lequel les relations avec les PNJ importent et offrent de nombreux choix. Fallait-il adopter le style d’écriture de Bruno LeMaire et décrire très précisément des obsessions personnelles en les imposant au public ? Fallait-il tout simplement faire l’impasse sur cet aspect des romances, alors même que les relations amicales et romantiques sont un aspect important de la dimension RP des jeux Bethesda ? On repassera d’ailleurs sur le ton grossier et abject de la journaliste de Kotaku, dont l’insulte aux joueurs, faisant office de conclusion à l’expression de son opinion qu’elle croit sans doute rigolote, témoigne de ses mauvaises intentions et d’un manque d’éthique consternant.
On comprend dès lors que ces dialogues sont essentiellement inoffensifs, correspondent à un certain équilibre entre le trop et le pas assez, et que somme toute, ce n’est là qu’un aspect mineur du jeu. Il est regrettable de voir des adultes se moquer publiquement de ce qui s’adresse aussi à des personnes ayant probablement la moitié de leur âge, tout autant que cette moquerie facile et redondante des jeux Bethesda mène à des jugements opportunistes et sans recul ni mesure, exprimés tout simplement parce qu’ils sont sans risques et divertissants, et permettent de rédiger un article accusateur sur un jeu attendu à partir de trois lignes de dialogues. Attendons patiemment la présentation de juin, et la sortie de septembre, pour prendre la vraie mesure de ce que seront les forces et faiblesses de Starfield, et évitons de moquer ce qui nous déplaît et plaira à d’autres en prétendant qu’il s’agit là d’un jugement objectif.
Starfield – Une ambition stratosphérique ?
Peuzeulle
Team NG+
Starfield ou la complainte des exclusivités Microsoft
Team NG+