Il n’est plus rare de nos jours de voir une licence dérivée sous diverses formes et sur divers supports, tout en conservant un lien certain avec l’oeuvre originale. Les jeux vidéo se déclinent sous forme de romans, de films, de comics, de dessins animés, et l’inverse est également vrai, pour constituer un ensemble cohérent afin que l’amateur puisse profiter de toujours plus de contenu pour une saga qu’il apprécie. Ce fut notamment le cas pour Final Fantasy XV, comme nous l’expliquait Danceteria au fil de son dossier. Le titre qui nous intéresse aujourd’hui, Scott Pilgrim, n’échappe pas à cette règle, quoique de manière nettement plus modérée que pour le monstre de Square Enix.
Que nous propose donc cette oeuvre décalée, au sein de laquelle bastons, sentiments et musique s’entremêlent de manière harmonieuse pour un rendu que geeks et gamers ne sauraient dédaigner ? Penchons-nous deux secondes sur le sujet.
Scott Pilgrim : rock’n love
Les comics
D’entrée de jeu, apportons un nuance à cette dénomination. De fait, Scott Pilgrim semblerait plus correspondre à l’appellation de graphic novel qu’à celle de comic book, principalement du fait de son format et de son rythme de parution.
En effet, les comics constituent généralement, dans l’acception universelle, des publications très courtes diffusées de manière périodique régulière. Le roman graphique, à l’opposé, s’avère souvent nettement plus massif, sans délais de publication imposés à son auteur. Définition qui nous parait judicieuse lorsque l’on évoque Scott Pilgrim, puisqu’on a ici affaire à 6 tomes d’approximativement 200 pages chacun, pour un total de 1008 pages. Vous pouvez vous en procurer l’intégrale en anglais sur Amazon contre une trentaine d’euros, et en farfouillant, vous pourrez également trouver la version française et colorisée (car le matériau de base est en noir et blanc), mais le tarif risque de piquer.
Tout ceci étant acté, revenons-en à nos bastons. Scott Pilgrim est une oeuvre émanant du dessinateur canadien Bryan Lee O’Malley, également musicien à ses heures perdues. Scott Pilgrim ne constitue pas sa première production, mais demeure malgré tout son plus grand succès. L’idée lui en est venue en écoutant une chanson douce-amère du même nom, mais également, en se délectant de mangas japonais, notamment Ranma 1/2, un genre très peu répandu au Canada à l’époque des faits (début des années 2000). Après avoir consulté un ouvrage tuto de bande dessinée japonaise, notre homme se lance dans la conception de Scott Pilgrim, qui sera publié entre 2004 et 2010. Voilà pour le background historique.
Résultat : un graphic-novel inspiré à la fois de la culture nord-américaine et des mangas japonais. Pour info, le nom Scott Pilgrim provient d’une chanson homonyme d’un ancien groupe canadien, Plumtree, morceau que pour ma part, je trouve parfaitement inaudible, mais passons…
Le postulat de départ est le suivant : Scott Pilgrim est un jeune glandeur canadien de 23 ans qui fait partie d’un groupe de rock et entretient une relation platonique avec une lycéenne d’origine chinoise de 17 ans, ce qui fait de lui la risée des autres membres du groupe du fait de la différence d’âge. Mais une nuit, il se prend à rêver d’une mystérieuse fille se déplaçant en rollers, et lorsqu’il finit par la rencontrer IRL, dirons-nous, il devient un tantinet obsédé par Ramona (c’est son nom).
Sans trop entrer dans les détails de ce que vous pourrez lire partout sur Internet et pour ne pas gâcher la lecture des livres en questions, sachez simplement que pour pouvoir sortir avec Ramona, Scott va devoir affronter les 7 ex de la jeune fille, qui se sont alliés en une guilde destinée à déglinguer Scott. Les affrontements tournent souvent autour de compétitions musicales bien musclées, mais pas que ; l’esprit jeu vidéo de baston se fait souvent ressentir également. D’ailleurs, les inspirations vidéoludiques de l’auteur suinteront tout au long des livres et du film qu’ils ont engendré (on y reviendra).
L’auteur n’est pas catégorique quant à une éventuelle suite des aventures de Scott et Ramona dans un futur lointain, mais estime pour le moment avoir fait le tour du sujet, et ne veut pas se forcer à continuer jusqu’à détester son personnage et son univers. La BD en restera donc à 6 tomes bien remplis pour le moment, qui bénéficient d’une fin cohérente et non-rushée que le dessinateur avait planifiée dès le volume 5.
On notera que l’univers de Scott Pilgrim a fait l’objet de quelques petites planches dessinées commandées à l’auteur par diverses publications, vous les retrouverez sur le site officiel, où vous pourrez par ailleurs vous balader pour en savoir plus sur l’objet de cet article.
Le film
En 2010 sort un film adapté des livres sus-mentionnés.
Il est réalisé par Edgar Wright, à qui l’on doit, entre autres comédies bien fun, l’excellent Shaun of the Dead. Les personnages principaux sont interprétés par Michael Cera (SuperGrave, Juno) dans le rôle de Scott, et Mary Elizabeth Winstead (10 Cloverfield Lane, Die Hard 4) dans celui de Ramona.
Si le film reprend fidèlement le déroulement des bandes dessinées, il est évident que certaines modifications ont dû être apportées, et notamment des suppressions de scènes, par exemple le flashback narrant l’idylle entre Scott et Kim, la batteuse du groupe. Difficile de ne pas faire de concessions pour faire tenir le contenu de 1000 pages en un film d’1h40.
Le long-métrage, dont le nom complet est Scott Pilgrim vs. the World (titre du second livre), est un bijou de dynamisme et de références au monde vidéoludique. Entre les combats improbables dignes des meilleurs jeux de baston, les petits bruitages tirés des Zelda ou encore les pièces qui tombent lorsqu’un boss est vaincu, on sent parfaitement l’influence du jeu vidéo sur les comics, et donc, sur le film. Nous ne listerons pas ici tous les petits clins d’œil qui auront fait dresser notre oreille de gamer, pour vous permettre de les découvrir par vous-même si vous n’avez pas encore savouré ce film. Un véritable jeu vidéo live, où l’humour, les sentiments et les affrontements furieux bourrés d’effets spéciaux se mêlent pour créer une oeuvre unique et jubilatoire.
Les musiques rock font partie intégrante de l’histoire, du fait que les combats tournent souvent autour du son. Je vous laisse apprécier le morceau Black Sheep, interprété dans le film par le groupe Clash at Demonhead (encore une référence, à un jeu NES). Un morceau efficace, qui vous permettra également d’entrevoir quelques images du film pour vous faire une idée.
Petit détail en passant : le film a été tourné un peu avant la conclusion de la série papier ; sa fin diffère donc légèrement, et l’auteur du livre a même fait le nécessaire pour s’adapter au mieux au dénouement du film, tout en conservant les idées qu’il avait lui-même en tête pour achever son oeuvre.
Vous constaterez que, en dehors des grandes lignes, nous restons volontairement évasifs quant aux détails concernant l’histoire du film et du livre, afin de ne pas gâcher le plaisir à ceux d’entre vous qui auront l’occasion et l’envie de s’y plonger.
Le dessin animé promotionnel
En 2010, en marge de la sortie du film, Adult Swim, chaîne qui diffuse des séries, dessins animés et jeux vidéo un peu trop violents pour la majorité des autres chaînes, produit un très court dessin animé destiné à faire la promotion du long métrage. En un peu moins de 4 minutes, Scott Pilgrim vs. the Animation nous narre la rencontre, au lycée, entre Scott et Kim (la batteuse), l’enlèvement de cette dernière et son sauvetage. Ce court-métrage reprend le style visuel des livres. Le voici pour vous, sous-titré en français par une âme charitable.
Les comics version mobile
Les 6 tomes de Scott Pilgrim ont été adaptés sur appareils Android et iOS, pour un résultat vraiment sympathique, puisque la lecture de la BD s’accompagne de mouvements, de vibrations et de sons. Pour ma part, je ne le trouve pas sur iOS, peut-être a-t-il été retiré ; mais les 6 tomes sont disponibles sur Android. Le premier chapitre du livre 1 est gratuit, vous pouvez donc vous faire une idée ; le reste vous en coûtera environ 5€ le volume, le denier étant un poil plus cher que les autres.
Le jeu vidéo
Vu le ton ouvertement geek de la licence, Scott Pilgrim se devait de bénéficier d’une adaptation vidéoludique. Ce fut chose faite en 2010 à nouveau, grâce à Ubisoft, probablement pour bénéficier de la sortie du film en salles obscures. Il est disponible sur PlayStation 3 et Xbox 360, et ne fait hélas pas (encore) partie des jeux rétrocompatibles sur Xbox One.
Il s’agit d’un beat’em up à l’ancienne de fort bonne facture, dont le style graphique, résolument retro avec ses gros pixels, et sonore, très chiptune, vous renverra vers un passé glorieux façon NES ou Super NES (mais boostée aux hormones quand même).
Le jeu peut se jouer seul ou jusqu’à 4 joueurs, et évoquera immanquablement aux plus nostalgiques d’entre nous des titres tels que Double Dragon ou River City Ransom. Vous avez le choix entre 4 persos (Scott, Kim, Ramona ou Stephen, le chanteur de leur groupe baptisé Sex Bob-omb, merci la référence, ici aussi). 3 autres personnages sont présents : NegaScott (la version dark de Scott, qui apparaît dans les autres média), débloquable, Knives, la jeune amoureuse asiatique évoquée plus haut, et Wallace, l’excellent coloc de Scott (tous deux disponibles sous forme de DLC).
Il va sans dire, vous allez devoir avancer au fil des 7 stages en déglinguant des hordes de mobs divers et variés, avant de vous colleter avec les 7 ex maléfiques de Ramona qui font office de boss de niveau. Pour ce faire, vous disposez de tout un panel de coups, propres à chacun, et que vous pourrez faire évoluer en gagnant de l’expérience ou en achetant des améliorations en magasin. Vous pourrez également ramasser tout ce qui traîne dans la rue pour vous en servir comme arme. Des cheat codes vous ouvriront des modes tels que le Boss Rush, dont le nom parle de lui-même, ou un mode Survival Horror (dont le nom parle lui aussi de lui-même).
Scott Pilgrim vs. the World: The Game est un excellent jeu pour qui aime le retro, le beat’em up et l’univers de Scott Pilgrim, et reprend l’aspect visuel des BD, alors si vous avez toujours votre PS3 ou votre Xbox 360, n’hésitez pas à aller bastonner ces 7 fumiers maléfiques et leurs hordes, nom de nom !
Conclusion
Que ce soient les BD, le film ou le jeu vidéo, Scott Pilgrim est une oeuvre originale et fun, décalée et résolument geek, dont nous espérons que vous aurez apprécié notre présentation. Si vous ne connaissez pas encore la chose, rendez-vous service et foncez choper ces beaux livres reliés et ce film jubilatoire. L’enjeu en vaut la chandelle. Une excellente histoire d’amour, de rock’n roll et de combats épiques.