L’affaire couvait depuis longtemps, elle éclate enfin en pleine lumière. Du 10 au 14 mars 2025, trois anciens hauts cadres d’Ubisoft comparaîtront devant le tribunal correctionnel de Bobigny pour répondre de faits de harcèlement sexuel, moral, et d’agressions. Une étape judiciaire majeure, mais surtout un révélateur d’un système profondément vicié au sein d’un des plus grands studios de jeux vidéo du monde.
Ce procès fait suite à des dizaines de témoignages accablants, apparus dès 2020 sur les réseaux sociaux puis relayés par la presse. Ce n’était pas un dérapage isolé, mais une véritable culture toxique où sexisme, racisme, homophobie et management par l’humiliation étaient devenus la norme.

On parle ici de comportements ahurissants : projection de films pornographiques au bureau, insultes sexistes en open space, brimades, gestes déplacés, agressions… Des faits graves, répétés, tolérés, voire encouragés. Le plus glaçant : la banalité apparente avec laquelle ces actes ont été intégrés au quotidien de l’entreprise, transformant le lieu de travail en terrain d’humiliation systémique.
Parmi les prévenus :
- Serge Hascoët, ex-directeur créatif et numéro 2 du groupe, poursuivi pour harcèlement sexuel, harcèlement moral et complicité. Il aurait tenu des propos sexistes et racistes, comme demander à une employée musulmane si elle soutenait Daech suite aux attentats de 2015 ou lui imposer des images de sandwich au bacon pendant le ramadan.
- Thomas “Tommy” François, ancien vice-président éditorial, accusé d’agressions sexuelles, harcèlement moral et humiliations répétées. Il aurait, entre autres, embrassé des collègues de force, ligoté une employée sur une chaise, diffusé du porno sur haut-parleur, insulté les salariées (“connasse”, “salope”, “morue”) et multiplié les comportements dégradants.
- Guillaume Patrux, ancien game director, renvoyé pour harcèlement moral.
Et ce ne sont que quelques exemples parmi les actes inhumains qui ont été dévoilés, la liste est longue. Les témoignages décrivent chez Ubisoft un environnement de travail gangréné par l’humiliation, la violence verbale et le sexisme ordinaire. Ce n’est pas une affaire de quelques cas isolés, mais un système entretenu et toléré. L’enquête souligne l’inaction prolongée des ressources humaines, malgré les alertes répétées.
Certaines victimes ont préféré garder le silence, craignant les représailles dans une industrie où les réseaux sont étroits et la culture du silence profondément enracinée. Il aura fallu le courage de neuf personnes constituées parties civiles, et l’appui de syndicats comme Solidaires Informatique, pour que l’affaire soit portée devant la justice.
Ce procès est une première étape. Mais il révèle surtout l’ampleur du problème chez Ubisoft : une entreprise où la hiérarchie protège les bourreaux, où le fun apparent dissimule la souffrance, et où les carrières se construisent parfois sur la peur et l’humiliation. En découlent des traumatismes psychologiques qui ne resteront au mieux que des cicatrices éternelles.
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