Fiche de perso est une rubrique dans laquelle nous tirons le portrait d’acteurs du jeu vidéo, réels ou fictifs, qui pèsent ou ont pesé sur l’industrie. Aujourd’hui on s’arrête sur celui qui a su coucher sur le papier la cultissime première génération de Pokémon, Ken Sugimori. D’illustrateur magazine à créateur du design des monstres de poche, retour sur l’un des character-designers les plus emblématiques du jeu vidéo.
- Une rencontre qui changera sa vie
Ken Sugimori, dessinateur de son état, était très friand de jeux vidéo. Il n’était donc pas rare de le trouver dans divers kiosques afin de dépenser ses quelques deniers en magazines JV. Évidemment, comme nous tous, l’ami Ken a ses préférences en termes de lecture, et un fanzine sur les jeux vidéo d’arcade deviendra vite une référence à ses yeux. Il ira même jusqu’à rencontrer le rédacteur chef qui l’engagera en tant qu’illustrateur pour sa revue. Le nom du fanzine ? Game Freak.
Oui, vous avez bien lu, Game Freak. Avant d’être la boîte à Pokémon qu’elle est aujourd’hui, le studio était un fanzine JV créé par Satoshi Tajiri, le papa du concept de Pokémon. C’est donc en rédigeant pour leur canard que les deux compères se lièrent d’amitié. Puis en 1989, Satoshi, amoureux du jeu vidéo dans l’âme (au point de sécher ses examens) transforma son fanzine en studio de développement, avec bien évidemment, notre fameux Ken en tant que nakama (associé).
- La naissance des Pokémon
Quelques années plus tard, suite à l’idée folle de Satoshi de créer un jeu utilisant les câbles link de la GameBoy de Nintendo, Ken se retrouva à devoir plancher sur le design de petites créatures, pour un jeu qui s’appelait à ce moment là Capsule Monsters.
C’est ainsi que naquit la toute première ébauche de Pokémon avec en vedette le fameux Rhinoféros, dont le design fut emprunté aux statues présentes dans les Arènes, et qui sera très vite accompagné des premiers jets d’Ectoplasma (Pokémon préféré de Sugimori) et de Nidorino, qui serviront d’ailleurs de scène d’introduction au jeu.
Toutefois, le développement des Pokémon fut un véritable parcours du combattant de presque six ans, période durant laquelle Ken Sugimori travailla avec le reste de l’équipe sur le concept de chacun des Pokémon. C’est d’ailleurs pour cela que le chara-designer ne souhaite jamais être crédité comme créateur des Pokémon, car si c’est bien lui qui les a couchés sur papier, il n’aura été qu’un donneur d’idées parmi d’autres sur les différentes espèces du jeu.
Au départ, les Pokémon, contraction de « Pocket Monsters », étaient censés être, dans l’imaginaire de Ken, de véritables monstres dans la forme. Ce n’est qu’après s’être dit « hey, des p’tits trucs mignons, ça serait pas mal aussi » qu’il travaillera de manière plus étroite avec Atsuko Nishida, une autre designer de chez Game Freak, cette dernière étant chargée d’aider à la création de bestioles un peu plus kawaï choupi. Elle sera d’ailleurs le talent derrière la création de Pikachu.
Pour l’anecdote, Ken Sugimori créa d’abord le trio d’évolution finale que sont Florizarre, Dracaufeu et Tortank, et laissa le soin à Nishida de créer leur pré-évolution. Un besoin notifié par Ken : « On a très vite remarqué que le joueur serait plus à même de s’attacher à son premier Pokémon si ce dernier évoluait avec lui, rendant obsolète l’idée de commencer avec une machine de guerre ».
- Game Fric
Comme tout studio, Game Freak avait pour ambition de vendre un maximum de cartouches. D’où l’idée de vendre deux versions de Pokémon, avec l’échange de bestioles comme leitmotiv. Une idée soufflée par ce bougre de Miyamoto, mais aussi une amorce pour le travail de Sugimori qui doit dorénavant fournir à Nintendo l’un des bestiaires les plus ambitieux du jeu vidéo de l’époque.
Terminé les monstres et les trucs cute, il faut aussi de l’étrange, du mécanique. Une tâche ardue pour l’équipe, qui doit faire avec la mémoire archi-courte de la cartouche de jeu. Mais qu’à cela ne tienne. On supprime des 3èmes stades d’évolution, tel Gorochu, l’évolution prévue de Raichu, afin de pouvoir implanter d’autres espèces.
Puis, en 1996, les cartouches sortent, avec le succès qu’on leur connaît. Une suite sera annoncée quelque temps après, remettant notre super Ken au boulot pour une nouvelle livraison de bestioles. Bien qu’une partie de la centaine de créatures ajoutées proviennent de Pokémon évincés des premières versions, d’autres ont bien entendu été créées pour l’occasion. Avec un objectif nouveau : équilibrer le jeu. Ken Sugimori se mue donc en équilibriste pour cette nouvelle mouture, qui cartonnera à sa sortie, bien évidemment.
En parallèle des jeux vidéo, un projet de cartes à jouer voit le jour, et on y retrouve notre fameux chara-designer qui signera de sa patte quelques-unes des cartes les plus recherchées des collectionneurs aujourd’hui. Puis quand vient l’heure de la série animée, c’est évidemment lui que l’on retrouvera, et qui créera la majeure partie du casting (en plus de reprendre celui déjà créé des jeux).
- C’est super efficace !
D’hier à aujourd’hui, Ken Sugimori aura toujours été là pour la création des presque 1000 Pokémon existant aujourd’hui. Une implication qui frôle le Syndrome de Stockholm, mais dont les fruits sont toujours aussi délicieux. Souvent sujet à controverse, le design des nouveaux Pokémon s’explique d’après lui par le simple fait que le design, comme tout art, évolue, et se doit de suivre son temps.