Nintendo, voilà certainement un nom qui parle aujourd’hui à beaucoup de personnes, geeks et néophytes compris. Fondée en 1889, la firme japonaise produisait à l’origine des cartes à jouer. Inutile de préciser qu’en l’espace de quelques décennies les choses ont bien changé ! Depuis près de trente ans, Big N est en effet l’un des leaders de l’industrie vidéoludique. Pourtant, il semble que l’entreprise soit actuellement en baisse de vitesse, notamment au regard de son dernier bilan financier. Mario, Link, Samus et tous les autres héros de notre enfance sont-ils en danger ? Explications.
Une question de performance et d’innovation
Longtemps resté en tête de course des ventes de jeux vidéo et de consoles, Nintendo est avant tout connu pour ses innovations et une approche intelligente du marché. Il ne faut tout de même pas oublier que Big N est l’un des précurseurs de cette industrie. En effet, jusqu’en 1994, date à laquelle la firme se rapprocha de Sony et Phillips pour adapter ses jeux Famicom (abréviation de Family Computeur, première console du géant japonais) sur CD-Rom, c’était entre elle et SEGA que le duel vidéoludique avait lieu. Après la rupture des contrats qui l’unissaient respectivement à Phillips, puis à Sony, les choses se compliquent un peu : pour des raisons de droits, Sony garde la main mise sur le projet et décide de commercialiser sa propre console… la PlayStation. Suite à quelques échecs cuisants et face au succès rencontré par Sony, Phillips se retire du marché vidéoludique : l’Histoire est en marche !
Après des succès mondiaux, notamment avec la saga Super Mario Bros. sur Super Nes, et une domination incontestée du marché, Nintendo commence à voir sa position remise en question. En 1996, la Nintendo 64 s’insère entre la Saturn de SEGA et la PlayStation de Sony. Malgré ses 32 millions d’unités vendues à travers le monde, la console devance largement la Saturn mais reste tout de même derrière l’indétrônable PlayStation… N’oublions pas cependant que la Nintendo 64 anticipe largement sur ses concurrentes avec, par exemple, l’apparition du mode multijoueur à quatre, chose que les développeurs actuels ont malheureusement un peu trop tendance à ne plus rendre possible depuis quelques années. Qui plus est, la N64 (seule console de l’époque à ne pas avoir adopté les jeux sur support CD) a donné naissance à pas mal de chef-d’œuvres vidéoludiques. Ainsi, Ocarina of Time, Super Mario 64, Goldeneye ou Perfect Dark restent encore aujourd’hui des références en matière de jeux d’aventure et de FPS.
Premier flop et regain
Après des années de suprématie sur le marché des consoles de salon et portables, notamment avec le Game Boy qui a récemment fêté ses 25 ans, Nintendo connaît une première passe difficile avec la GameCube, console qui souffrira réellement d’un désintérêt de la part du public. Face à la PlayStation 2, la Xbox de Microsoft et la Dreamcast de SEGA (aujourd’hui oubliée), la filiale ne tient pas aussi bien la route que par le passé. Même si les licences triple A telles que The Legend of Zelda : The Wind Waker, Super Mario Sunshine et Star Fox Adventures sont là pour la soutenir, la GameCube ne s’écoule finalement qu’à 22 millions d’exemplaires durant ses cinq années de commercialisation. Un succès en demi-teinte, heureusement compensé par la réussite de la Nintendo DS, qui totalise à elle seule près de 140 millions d’unités vendues à travers le monde !
En 2006, Big N renoue finalement avec le succès grâce à une console innovante : la Wii. La caractéristique principale de cette nouvelle plateforme est de s’adresser à un très large public. Ce que l’on appelle le Casual Gamer ou joueur occasionnel en français devient le fer de lance de la firme. Dès lors, la Wii évolue sur un terrain totalement différent de celui de ses concurrentes de l’époque, la PlayStation 3 et la Xbox 360. Là où Microsoft et Sony jouent la carte de la performance graphique et tentent d’accrocher le gamer pur et dur, Nintendo se démarque intelligemment en insistant sur ses valeurs déjà dominantes : la famille et l’accessibilité à tous. Des jeux tout public tels que Wii Sports, vendu avec la console, font un véritable carton. Face à cet engouement, l’entreprise développe alors les franchises du même acabit. Wii Fit, Wii Sports Resort ou encore Mario Party vont alors envahir la Wii, chose qui va progressivement rendre frileux les éditeurs à l’égard de la console. Peu à peu, la Wii va également être victime du temps. Déjà dépassée sur le plan technique, la console dont la reconnaissance de mouvement ne constitue plus un atout depuis la sortie de Kinect et PS Move sur ses concurrentes, est en perte de vitesse. Une partie des joueurs ayant grandi avec Nintendo se sent délaissée par la firme, qui ne semble désormais miser que sur le casual gaming.
Les années Wii U : le bilan actuel
En 2012, Big N décide de reprendre les choses en main. Après le lancement record en 2011 de la 3DS au Japon et son succès commercial (370 000 exemplaires écoulés au Japon en l’espace de seulement 24h et 42 millions dans le monde jusqu’à ce jour), l’entreprise reste à la traîne derrière ses concurrentes de salon. En 2012, la Wii U est finalement lancée sur la marché. Son atout ? Le Wii U GamePad, qui dispose d’un écran tactile intégré et permet (en théorie) de varier les plaisirs de jeu. À ce jour, en dépit d’un effet d’annonce efficace et d’un catalogue assez varié lors de sa sortie ( ZombiU, Batman Arkham City – Armored Edition, Assassin’s Creed III ou encore Skylanders Giants), les ventes n’atteignent pas les prévisions escomptées de 9 millions d’unités, tournant davantage autour des 6 millions… La faute à des jeux qui arrivent au compte-goutte, et à l’absence de vraie licence à succès, deux phénomènes qui commencent à lasser les joueurs.
Sur le plan pécunier, les conséquences sont d’ailleurs assez inquiétantes pour Nintendo, qui vient de publier son bilan financier pour l’année fiscale achevée au 31 mars. Si le chiffre d’affaire s’élève à 5,6 milliards de dollars (soit dix pour cent de moins que l’année passée), la firme essuie tout de même une perte de 228,6 millions. Bien que ce déficit soit en fin de compte assez relatif au regard des sommes astronomiques engrangées par Big N, on peut tout de même constater que la Wii U ne décolle pas… Pire, les fermetures des filiales de l’entreprise ne cessent de se multiplier, ce qui n’annonce rien de bon. Prudence tout de même, car il n’en demeure pas moins que le géant japonais dispose de fonds propres qui lui permettraient de tenir une bonne trentaine d’années sans faire de bénéfices !
Espérons seulement que l’arrivée de Mario Kart 8 et l’annonce d’une date de sortie pour Hyrule Warriors (26 septembre prochain) permettront de redresser la barre. D’ici là, croisons les doigts pour que Nintendo nous réserve encore de belles aventures vidéoludiques !