Les coûts de production des produits culturels peuvent atteindre des niveaux mirobolants. Le cinéma et le jeu vidéo s’illustrent particulièrement dans ce domaine. Si le premier a historiquement eu l’ascendant sur le second, par son ancienneté et son public plus large, la tendance semble changer, puisque les coûts de production dans le jeu vidéo continuent de grimper, en dépassant depuis la fin de la décennie 2010 les coûts du cinéma.
Ça n’est malheureusement pas une nouvelle dont on peut se réjouir. Au lieu de permettre aux studios de proposer des expériences toujours plus grandioses, cette surenchère constante tend à brider la créativité. Les jeux AAA sont devenus une grosse prise de risque financier, et les studios ne peuvent se permettre de tenter de nouvelles choses sans certitude de retour sur investissement. S’ensuivent des projets reprenant ce qui s’est fait de mieux les années précédentes, le tout mixé dans un emballage variant mais qu’on semble avoir déjà vu quelque part.
Pour Meghan Morgan Juinio, ex productrice de chez Santa Monica Studios, et connue pour son travail sur God Of War, la solution pour les studios est de tenter plus de projets de plus petites tailles. Les jeux AAA ne quitteront pas le marché de sitôt, mais pour permettre leur financement, et afin de proposer des expériences plus diversifiées aux joueurs, développer des jeux AA ou A, voir financer et pousser la scène indépendante amènera une économie plus stable et un regain de créativité dans le milieu.
« Je pense qu’il y a une opportunité pour les grands acteurs de chercher à se diversifier dans le double-A, le simple-A, et peut-être même l’indépendant ? Quelle forme ou taille cela pourrait prendre, je ne sais pas » Meghan Morgan Juinio pour Game Developer, octobre 2025
Diversifier pour mieux régner
C’est d’ordinaire plutôt le rôle des éditeurs de participer à la création de jeux aux échelles différentes, en finançant divers acteurs de la scène, chacun en lien avec la taille de ses productions. Mais c’est bien ce qui limite aussi ces studios, qui doivent, dans le cas des plus gros, enchaîner les productions à risque, où un échec unanime pourrait coûter littéralement très cher. Et c’est malheureusement les employés qui trinquent lors de ces échecs. Il suffit de voir le nombre de cas d’employés remerciés lors d’un bide, comme avec le récent cas MindsEye.
La solution des plus petites productions ponctuelles semblent donc toute trouvée. CD Projekt Red ou Santa Monica Studios ne cesseront pas la production de AAA, car c’est ainsi qu’ils sont structurés et c’est ce que leurs fans attendent, mais des jeux à taille plus réduite auraient leurs avantages. Au delà de l’aspect financier, ils permettraient à la fois des sorties plus fréquentes afin de mieux faire digérer aux joueurs les délais de production des jeux AAA, mais aussi d’étendre les univers de ces studios. De petites productions sur Freya ou sur Yennefer pourraient par exemple donner du corps aux univers de God Of War ou The Witcher.
Malgré tout, il est difficile d’imaginer qu’un jeu, peu importe son ambition, réalisé par un gros studio déjà parent d’un ou plusieurs titre(s) AAA, puisse-t-être considéré comme indépendant. Un éditeur peut financer un jeu indépendant, dans le cas où le studio garde une part d’autonomie pour sa petite équipe. Dans le cas des studios, la structuration de ceux-ci définit presque à elle seule si leurs productions sont indépendantes ou non. Si les gros studios veulent participer à la scène indépendante, ils devront peut-être changer de rôle et endosser celui d’éditeur et plus (seulement) de développeurs.

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