Le tueur à gages le plus célébré du monde des jeux vidéo a récemment fait son retour dans Hitman III pour conclure une trilogie débutée en 2016. Développée par Io Interactive et distribuée par Square Enix, elle a remis au goût du jour un anti-héros iconique qui a pourtant eu un parcours vidéoludique assez inégal qui, au fil des ans, a su poser les fondations du succès que l’on connaît aujourd’hui. L’occasion de revenir sur une carrière entamée il y a de cela plus de vingt ans.
C’est Hitman : Tueur à Gages qui introduit la saga en 2000 uniquement sur PC. L’histoire débute dans une chambre d’hôpital où nous découvrons 47 fraichement formé aux rudiments de l’assassinat et ce premier acte fera office de didacticiel. Au cours des douze missions, nous allons être envoyé aux quatre coins par nos employeurs pour remplir divers objectifs tels que l’assassinat, le recueil d’informations, la collecte d’objets, etc. Le seul lien (à distance) de 47, c’est Diana, qui assure la liaison entre lui et l’Agence, qui deviendra récurrente.
Durant la mission, 47 aura la possibilité de changer de tenues pour accéder à certaines zones autrement interdites pour s’approcher de sa cible. Cet élément de gameplay va participer à l’immersion et à l’implication du joueur et deviendra la marque de fabrique de la saga. De même que la fuite, une fois l’objectif atteint, qui consiste à quitter les lieux à l’abri des regards. C’est l’ensemble de ces éléments majeurs qui constituera les fondements de la série à venir.
Bien que novateur dans son approche et son gameplay, Hitman : Tueur à Gages recevra un accueil critique et public mitigé. La faute à une certaine rigidité de jeu, au peu de dynamisme dans les mouvements du personnage, et enfin à un faux semblant de liberté qui peine à masquer le dirigisme du jeu. De plus, le jeu se divise en deux parties : la première très axée sur l’infiltration, récompensant notre discrétion, la seconde plus tournée vers l’action. Il sera reproché au titre de ne pas avoir choisi son camp.
Il faudra attendre 2002 pour voir la sortie de Hitman II: Silent Assassin sur toutes les plateformes du moment (PC, PS2, Xbox, GameCube). Cette fois, notre tueur a décidé de se retirer des affaires et du monde. Il a trouvé refuge dans un monastère sicilien isolé où il officie désormais comme jardinier au service du Père Vittorio devenu son ami et confident.
Celui-ci va être kidnappé et retenu en otage par une organisation criminelle souhaitant s’octroyer les services de 47. Le tueur à gages n’aura d’autre choix que de faire à nouveau appel à l’Agence pour retrouver son ami. Bien évidemment, ses services ne sont pas gratuits.
Eidos a été sensible aux retours de la communauté suite au premier opus. Le studio rééquilibre sa formule en privilégiant pour de bon l’infiltration et la discrétion au détriment de l’action pure, bien que possible. Cette fois, les niveaux sont travaillés pour encourager cela, ils sont plus intuitifs et laissent place à bien plus de libertés quant à la manière d’arriver à ses fins. En effet, à l’issue de chaque mission est établi un classement qui comptabilise le nombre de coups de feu, de victimes collatérales et d’alertes déclenchées.
Si la cible a été atteinte dans la plus grande discrétion, il sera possible de débloquer des armes additionnelles. Le succès rencontré par ce deuxième volet vient confirmer sans révolutionner ce qui avait été amorcé dans le premier tout en apportant quelques subtiles modifications de gameplay et d’interface qui vont définitivement entrer dans l’ADN de la série.
Deux ans plus tard, en 2004, c’est Hitman: Contract qui poursuit les aventures de notre tueur fantôme toujours sur PC, PS2, Xbox et GameCube. On retrouve notre agent 47 en grande difficulté puisque grièvement blessé et cerné dans une chambre d’hôtel parisien. Fiévreux et délirant, il va revivre un certain nombre de ses missions passées. L’occasion pour les joueurs de redécouvrir certains de ses plus iconiques contrats.
Aucun répit pour l’Agent 47 qui enchaîne avec un nouvel opus dispensable. Car en plus d’être à la traine techniquement parlant (il conserve le même moteur graphique que son prédécesseur), il assure le service minimum.
Pas d’innovations à mettre à son crédit, une intelligence artificielle à la ramasse même pour les standards de l’époque, bref une petite déception. Jusqu’à présent peu inquiété par la concurrence, Hitman souffre désormais de la comparaison avec son grand rival, Splinter Cell, qui se montre plus moderne dans son approche et plus jouissif. Après ce semi-échec, Eidos se doit de réagir s’il veut garder le leadership des jeux d’infiltration.
La saga se poursuit avec en 2006, l’arrivée de Hitman: Blood Money qui a la lourde tâche de renouveler une série en perte de vitesse. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il sera à la hauteur des attentes des joueurs. L’aventure démarre après la mort supposée de 47, devenu la hantise des criminels et des pègres du monde entier, se vendant au plus offrant. C’est par le prisme de deux journalistes que nous allons pouvoir vivre les derniers contrats de l’Agent 47.
Il aura fallu attendre six longues années et trois épisodes pour avoir enfin un 47 capable de se mouvoir plus naturellement. Il peut désormais s’accroupir, sauter, escalader et cela va grandement impacter le gameplay du jeu qui s’en trouve bouleversé. En plus de cela s’ajoute une jauge de tension quand les PNJ commencent à vous soupçonner.
Les possibilités pour parvenir à vos fins sont encore démultipliées. Hitman: Blood Money bonifie les améliorations apportées par Hitman II et les associe à des vastes décors. La difficulté est rehaussée afin d’encourager à l’exploration du niveau pour trouver le moyen le plus subtil et discret de réussir votre mission. Hitman: Blood Money installe définitivement les codes de la saga telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Cette fois, Io Interactive et Square Enix (qui ont repris la licence en main en 2009), ont pris leur temps pour concocter la suite des aventures de 47 qui revient après quatre ans d’absence. Et cela commence fort puisque celui-ci, en guise de premier acte, devra abattre Diana accusée de trahison par l’Agence.
Contraint de s’exécuter, notre charismatique tueur à gages n’a-t-il pas atteint le point de rupture ? Il aura cette fois la charge de protéger la jeune Victoria, victime de diverses expériences et pour laquelle Diana s’est compromise. Convoité par l’Agence, l’Agent 47 décide de se retourner contre ses employeurs.
Au cours de cet opus, on quitte le schéma habituel de la mission-contrat pour une aventure plus personnelle et plus linéaire. Le rythme narratif y est soutenu et tout est mené tambour battant. C’est aussi l’épisode qui divise le plus parmi la communauté, car il emprunte beaucoup de mécaniques à son rival Splinter Cell, dont la jauge d’instinct qui permet plusieurs choses : de visualiser le tracé des patrouilles, d’être utilisé façon bullet time pour éliminer un grand nombre d’adversaires dans un laps de temps ralenti, et enfin il permet aussi de se rendre plus discret aux yeux des PNJ.
L’intelligence artificielle est ici renforcée. Se déguiser ne suffira souvent pas à tromper leur vigilance, ou alors pas longtemps. Le choix du costume sera plus déterminant que jamais dans votre progression. Bien sûr, il est toujours possible de mener ses missions façon rush, mais cela vous desservira en termes de résultats et de classement. Les niveaux de difficulté, au nombre de cinq, permettent à tous les joueurs de se frotter au défi et d’y trouver du plaisir.
Néanmoins, le parti pris esthétique et la direction artistique parfois foutraque vont désarçonner les fidèles de la première heure. Ce Hitman: Absolution va modifier ses propres codes pour les moderniser, le temps d’un épisode qui, paradoxalement, a fait date pour le meilleur et pour le pire.
Pour terminer, le dernier triptyque de Hitman, entamé en 2016 et conclu en janvier, sera traité comme un seul titre, car il répond au même cahier des charges. Il est ici question de revenir aux fondamentaux. Retour de la recette mission-contrat, les cartes sont encore agrandies et les choix deviennent incalculables car chacun pourra imaginer sa méthode d’approche.
Bien que le nombre de cartes reste limité dans chaque opus, il sera possible de refaire les missions à la façon bac à sable afin de parfaire son score et son style. La force de cette trilogie repose dans cette manière de prolonger l’expérience et de rechercher la performance. L’intelligence artificielle est toujours aussi affûtée, les décors nous amènent aux quatre coins du monde, bref, la franchise est respectée.
Notre mystérieux et charismatique tueur au code-barre a connu une carrière fournie et aboutie tant et si bien que chaque joueur peut dire quel épisode fut le plus marquant pour lui. Il a su faire évoluer son gameplay à tel point qu’il est aujourd’hui la référence du jeu d’infiltration.
En vingt ans de carrière, il a su éclipser toute la concurrence et s’impose comme un must en la matière. Cependant, il semblerait que la formule paraisse éculée suite à la dernière trilogie qui a montré des difficultés à se renouveler. Le monde du jeu vidéo interdit la routine, il s’agit donc maintenant pour 47 de préparer soigneusement son retour s’il veut faire perdurer cette étonnante longévité.