Il ne vous aura probablement pas échappé que la tension chez Activision-Blizzard est montée d’un cran ces derniers jours. Suite aux accusations de harcèlement au sein de l’entreprise, c’est carrément l’État de Californie qui a porté plainte contre les studios, mettant en valeur la culture « boy’s club » qui y règne.
On a ainsi pu découvrir grâce à Kotaku la « Cosby’s Suite », la chambre d’hôtel occupée par Alex Afrasiabi (développeur notamment sur WoW) pendant la BlizzCon, et nommée ainsi d’après Bill Cosby, ancien acteur condamné pour viol. Voilà qui pose l’ambiance. Afrasiabi est en effet un salarié d’Activision-Blizzard dont les pratiques de harcèlement et les comportements toxiques étaient connus de ses collègues et supérieurs, à en juger par plusieurs documents qui ont pu être consultés par Kotaku, tels que des posts Facebook particulièrement beauf.
Suite à ces très sérieuses accusations, le boss d’Activision-Blizzard, Bobby Kotick, a fini par sortir du silence et a publié une lettre ouverte dans laquelle il reconnaît ne pas avoir été à l’écoute de ses salariés, et jurant qu' »offrir un environnement de travail sûr et accueillant est sa plus grande priorité » (alors qu’on pensait, nous, que c’était son bonus annuel, sa priorité !). Un audit a été lancé pour évaluer les pratiques de la société. Par ailleurs, Kotick a fait des promesses concernant les changements qui allaient intervenir au sein des studios. Des responsables plus à l’écoute, des managers plus surveillés, une plus grande diversité au niveau des embauches et même des changements in-game pour se débarrasser des contenus problématiques sont autant de promesses faites par le PDG.
Une réponse insatisfaisante pour les employés, qui ont décidé de manifester ce mercredi 28 juillet. Un fait rare qui montre la gravité de la situation, puisque le secteur du jeu vidéo n’a pas de syndicat aux États-Unis, et les mouvements collectifs comme celui-ci se comptent sur les doigts d’une main d’Ethan Winters.
Et cette manifestation a reçu un soutien de poids, car les employés d’Ubisoft ont publié une lettre ouverte pour venir appuyer leurs collègues. Et en effet, comment ne pas faire le parallèle entre les deux affaires ? Tout ce qui se passe actuellement chez Activision-Blizzard rappelle de fait l’affaire Ubisoft d’il y a un an, des accusations portées à la réponse molle (c’est le moins qu’on puisse dire) de la direction, jusqu’à l’insatisfaction des salariés.
“We believe you, we stand with you and support you”. Nous vous croyons, nous vous soutenons et sommes à vos côtés, écrivent les salariés d’Ubisoft dans cette lettre dont de nombreux extraits ont été publiés par Axios.
Une lettre dont les signataires émanent de 32 studios Ubisoft à travers le monde, en Europe, Asie, et Amérique du Nord. De très nombreux employés d’Ubisoft ont en effet toujours en travers de la gorge la façon dont l’affaire a rapidement été expédiée puis presque oubliée, avec une direction qui, finalement, s’en tire à bon compte.
« Ce ne devrait plus être une surprise pour personne, les employées, les responsables, les journalistes ou les fans, que ces actes haineux continuent. Il faut maintenant arrêter d’être choqué. Nous devons exiger que de véritables mesures soient prises pour prévenir ce genre de comportement. Les coupables doivent rendre des comptes. […] Nous nous sommes levés et nous vous avons regardé renvoyer les harceleurs les plus médiatisés. Les autres ont eu l’opportunité de démissionner, voire pire, ont été promus, ont changé de studio ou d’équipe, se sont vu offrir une deuxième chance sans aucune conséquence. Ce fonctionnement doit cesser. » – extraits de la lettre ouverte des personnels d’Ubisoft à sa direction publiés par Axios et traduits par la rédaction.
Les auteurs de la lettre ont par ailleurs déclaré que rien ou presque n’avait changé au sein de la société, et proposent qu’aux côtés d’Activision-Blizzard et d’autres gros studios (on oublie souvent Insomniac, chez qui un scandale sensiblement comparable avait été étouffé dans l’œuf « grâce » à l’ampleur de l’histoire Ubisoft), les salariés travaillent ensemble à la mise en place d’un process permettant de gérer efficacement les comportements problématiques.
Une union internationale des travailleurs du jeu vidéo ? Dans un secteur où le syndicalisme est encore inexistant aux États-Unis, et les conditions de travail particulièrement précaires (au-delà même des histoires de harcèlement), voilà qui pourrait complètement renverser la table. On ne peut qu’exprimer tout notre soutien à la fois aux salariés, mais aussi à leur initiative, en espérant très fort qu’elle aboutisse…
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