Il y a maintenant de très nombreuses années, bien avant eFootball, sortait sur nos Super Nintendo occidentales un certain ISS (International Superstar) venant concurrencer directement l’hégémonie de la licence FIFA d’Electronic Arts. Deux visions du football s’affrontaient déjà alors, la simulation pour celle de Konami et l’arcade pour la franchise américaine. Vu l’époque, c’était bien moins marqué qu’aujourd’hui, mais déjà des différences majeures de rythme, de vision du jeu et de construction étaient notables.
Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts (et en a fait couler), et si aujourd’hui la guerre est dominée par FIFA, du moins au niveau des ventes, il ne faut pas oublier que, durant quelques années, PES a eu l’avantage et a même été le bien culturel le plus vendu en France en 2005 et 2006. Il y a donc un véritable affrontement qui s’opère chaque année (ou presque) sur les terrains de foot virtuels pour savoir qui est le meilleur aussi bien balle au pied que sur tout le reste (modes de jeu, licences, graphismes).
De notre côté, les choses sont assez claires et notre cœur penche du côté de PES ces dernières années, notamment du fait d’un vrai fond de jeu que l’on ne retrouve pas sur FIFA, misant avant tout sur la vitesse, l’attaque débridée et les gestes techniques farfelus. Attention, aucun jugement de valeur, ce n’est qu’affaire de goût et on comprend aisément que l’on apprécie plus cette idée du jeu. Néanmoins, force est de constater qu’au niveau des modes de jeu (FUT en tête) et des licences, FIFA est bien devant son rival et n’est pas près d’être rattrapé.
Alors oui, FUT fait débat tous les ans pour son modèle économique, mais mine de rien, beaucoup de simulations sportives proposent aujourd’hui un mode de jeu équivalent, comme PES avec My Club. On pourrait polémiquer sur le bien-fondé de ce genre de choses, sur le côté loterie et incitation à l’achat que l’on trouve nauséabond, mais ce n’est pas le sujet aujourd’hui. Sachez néanmoins qu’à l’instar des lootbox, nous trouvons le système de FUT et consorts réellement néfaste pour notre média et l’image qu’il renvoie.
Toujours est-il que si la saga de Konami a rattrapé celle de FIFA, la surpassant sur le terrain, commercialement, c’est encore loin d’être le cas. Il fallait donc que les Japonais tentent un grand coup qui n’arrive pas comme un cheveu sur la soupe, mais a été préparé en amont en sacrifiant l’épisode 2021 au passage pour une simple mise à jour des effectifs et données diverses, histoire de revenir très fort en 2022.
Une révolution attendue, mais étonnante
Nous y voilà donc. PES (ou eFootball PES depuis 2020) est mort, place maintenant à eFootball. Dit comme ça, cela ne paraît pas être beaucoup, mais c’est pourtant une grosse révolution qui s’opère ici pour la franchise, un tournant majeur qui pourrait sonner la renaissance commerciale ou le glas de la licence entière. La principale information n’est ni le changement de nom ou de logo d’ailleurs, bien que l’on trouve le nouveau affreux, mais bien le format économique choisi par Konami pour sa simulation footballistique.
En effet, eFootball sera free-to-play, avec un gros, un énorme astérisque même, mais il sera bien gratuit le jour de sa sortie sur n’importe quel support, et on parle là non seulement des consoles PlayStation et Xbox, mais aussi du PC. Une sortie d’ailleurs calée comme d’habitude à cet automne, alors qu’une version mobile du jeu est aussi annoncée pour sortir quelque temps après sans plus de précisions. Tout comme le volet eSport qui débarquera lui cet hiver, alors que le jeu en ligne classique arrivera lui peu après le lancement du jeu.
Alors, que signifie ici le terme free-to-play ? Eh bien, pas grand-chose pour le moment, hormis le fait que le jeu sera donc accessible à tous. Pas de réelles annonces pour savoir si tout sera jouable ou pas, car des questions se posent quant à l’accès des différents modes de jeu, mais bien l’annonce d’un Match Pass System (équivalent du Podium Pass de F1 ou des célèbres Battle Pass) qui permettra d’acquérir des récompenses progressivement. Oui, on parle bien de microtransactions.
Aussi, eFootball sera non seulement cross-gen, les joueurs PS4 pourront affronter ceux sur PS5 par exemple, mais aussi cross-play. Alors certes, la feature ne sera pas disponible à la sortie, mais elle arrivera dans le courant de l’automne, ce qui n’est pas pour nous déplaire et ce qui pourrait permettre de créer une grosse communauté de joueurs autour du jeu. Ce point-ci est particulièrement ambitieux et il est curieux d’ailleurs que FIFA ne propose pas une telle chose. Notons d’ailleurs que dès cet hiver, cette option sera étendue au mobile.
De même que dès cet automne, le mode TBM, pour Team Building Mode, fera son apparition et nous proposera de fonder et monter notre propre équipe de football. Reste à voir comment cela s’articulera et si ce n’est pas là une sorte d’évolution de My Club. De même que l’on observera avec une attention toute particulière le système économique autour de ce dernier, car là pourrait se poser la question de l’avantage donné aux gros payeurs.
Pour le reste, on retrouvera bien évidemment de nombreuses grosses équipes sous licences comme Manchester United, la Juventus, le FC Barcelone, on en passe et des meilleures. Le moteur de jeu utilisé est dorénavant l’Unreal Engine 4, que l’on a hâte de voir à l’œuvre, même si le peu d’images montrées dans le trailer d’annonce sont plutôt encourageantes, malgré des animations parfois un peu hachées. Bande-annonce qui fait d’ailleurs intervenir quelques grands noms du football comme Iniesta ou Gérard Piqué, et surtout un certain Lionel Messi en tête d’affiche de ce eFootball.
Un bon move pour Konami ?
Mais peu importe qui porte l’image du jeu ou la campagne marketing qui lui est dédiée, l’important est ailleurs. La première chose sur laquelle sera jugée cette nouvelle simulation sportive est forcément son gameplay et là, on ne se fait pas trop de soucis, car Konami a prouvé ces dernières années avoir une vraie vision du football qui fait mouche manette en main. La deuxième chose sera donc ce fameux format économique.
Il est clair qu’aujourd’hui, FIFA a trop d’avance pour être rattrapé au niveau de la vente seule, il fallait donc trouver un moyen de rendre l’expérience eFootball accessible au plus grand nombre pour gagner de nouveaux fidèles au passage. En cela, le côté free-to-play est une très bonne idée qui dénote totalement dans le paysage du jeu de sport AAA. C’est un pari certes, mais s’il est gagnant, il pourrait remettre en question le format économique de tous ces jeux annuels pour lesquels il faut payer le prix fort pour parfois avoir un résultat quelque peu similaire à l’expérience vécue l’année précédente.
Konami s’essaie donc à jouer les précurseurs et l’a déjà été l’année dernière en optant pour la mise à jour payante vers son eFootball PES 2021, donc à un prix moindre qu’un nouvel opus classique, là où FIFA se cassait les dents en sortant un opus 21 réellement peu emballant. Proposer aujourd’hui un modèle qui permettrait d’enchaîner gratuitement les saisons en payant pour du contenu supplémentaire via un pass chaque année paraît donc être un très bon compromis.
Bien évidemment, il faut alors que l’on continue d’observer des améliorations entre chaque jeu, mais aussi que le fameux pass ne soit pas trop contraignant et c’est selon nous là où tout va se jouer. Car s’il ne propose que des objets cosmétiques, on n’y voit pas d’inconvénients. Par contre, si on est obligé de passer à la caisse pour pouvoir jouer à certains modes de jeu, là, ça devient plus compliqué.
De même que s’il nous donne la sensation de brider notre expérience de jeu et nous désavantage vis-à-vis des autres joueurs qui eux ont le pass, on ne pourra que là aussi crier haut et fort notre mécontentement. On en revient à ce fameux mode TBM, car si cela fonctionne avec un système de cartes à l’achat comme d’habitude et qu’en plus ceux qui ont le Match Pass System sont avantagés, de gros problèmes d’équité pourraient se poser. Déjà qu’ils existent de base, il ne faudrait pas que cela empire.
L’important est l’équilibre, comme dirait DD, et sans cela, eFootball risque bien d’y laisser quelques plumes. Il nous faut donc attendre le mois d’août et les quelques annonces qui nous sont promises, car en l’état, nous ne pouvons que nous montrer intéressés, tout en émettant quelques réserves sur l’application de cette formule « gratuite » parfois à double tranchant. La suite au prochain numéro, donc.
Petite mise à jour de notre part puisque Konami a confirmé via le compte Twitter de eFootball que la célèbre Master League (ou Ligue des Masters chez nous) sera bien payante via un DLC qui arriverait quelque temps après le lancement. Voilà qui confirme nos craintes quant au fait que eFootball devienne un jeu service et risque bien de créer la polémique en misant tout sur le online et en délaissant la partie solo que les aficionados de la licence PES apprécie tant.
#eFootball ™ cross-platform online matches will be further improved with a new engine and adjusted to take *full* advantage of each platform.
In addition, offline modes such as "Master League" will be sold in the future as optional DLC on all compatible devices.
— eFootball (@play_eFootball) July 22, 2021
Reste à voir en détail ce qui sera gratuit et ce qui ne le sera pas, mais autant dire que cela part assez mal pour eFootball.