Cela fait un bail que Yoshi n’est plus cantonné au simple rôle de dada destiné à transporter de la plomberie. Dès 1995, avec Yoshi’s Island, le simili-T-Rex-dragon-lézard (oui, il a été affublé de tous les dénominatifs alors qu’il s’agit en fait d’une tortue au même titre que les Koopas) bénéficiait de son propre véritable show perso, et ce avec une belle qualité qui plus est. Au point qu’il en est désormais à son 8ème opus, avec Yoshi’s Crafted World, exclusivement sur Nintendo Switch, of course.
Notre preview du jeu nous avait laissé une très bonne impression ainsi qu’une envie d’en voir plus, beaucoup plus. Maintenant qu’il est sur le point de débarquer sur votre Switch avide de mignonnitude (et d’omelette, parce que bon, il y a plein d’œufs, dans un jeu Yoshi), il est temps de voir si la vitrine devant laquelle on avait salivé reflétait, ou non, la qualité du contenu final une fois entré dans le magasin et les billets lâchés à la caissière dès le 29 mars prochain.
Et pour commencer gaiement notre plongée dans Yoshi’s Crafted World, quoi de mieux qu’un peu de musique ? Avec l’excellent Ignorance is Bliss du groupe Jellyfish, qui vous rappellera pas mal de choses dans son clip et ses paroles niveau univers. Enjoy…
Yoshi’s Crafted World – Reptile à la hauteur de ses ancêtres ?
Passe-moi la colle, j’ai un arbre qui ne tient pas debout
Le précepte de base de Yoshi’s Crafted World, comme la plupart du temps dans les jeux de l’univers Mario, ne repose pas sur un scénario ultra-développé, car là ne réside en aucun cas son intérêt, bien entendu. On ne s’y attardera donc pas pendant des heures ; sachez juste que les antagonistes habituels de notre carapacé héros, Baby Bowser et le mage Kamek, ont encore causé des problèmes sur l’île servant de domicile aux Yoshis, éparpillant leurs chers joyaux capables d’exaucer les rêves aux quatre coins de ce petit monde. Cela va sans dire, il va s’agir pour nos Yoshis de fouiller l’île de long en large afin de retrouver leurs précieux.
Voilà, inutile de s’étendre plus avant sur le background, qui se suffit parfaitement à lui-même en l’état. Vous choisissez en début de partie le Yoshi dont la couleur vous plaît le plus, ce qui n’est que question purement esthétique et n’influe en rien sur le gameplay. Et ensuite, c’est parti pour la découverte de cet univers nouveau… qui se présente sous la forme d’un diorama géant. Vous savez, les dioramas, ces paysages parfois tout de carton / bois peint réalisés, tant au niveau des personnages que des décors ? Hé bien c’est le choix esthétique qu’a effectué ce nouvel épisode des aventures de Yoshi, après être passé par la laine ; et on ne va pas tourner autour du pot : ça marche du tonnerre.
Concrètement, vous allez donc évoluer dans un monde en 2.5D, entouré de décors type « dessiné, construit et colorié à la main » en vous retrouvant confronté à des ennemis pour la plupart bien connus, mais eux aussi, tout comme votre Yoshi, réalisés en 3D. Point ici d’effet « Paper Mario » donc, vous n’êtes pas une créature de papier, et vos adversaires non plus. Le tout aboutit à un rendu visuel charmant, coloré, rustique et accrocheur du plus bel effet, on a l’impression d’avoir découpé des vieux cartons de livraison, des boîtes de céréales et des bouteilles en plastique pour concevoir un décor au pinceau, et d’y jouer avec des figurines quant à elles bien façonnées question épaisseur et textures. Excellent.
Surprise sur surprise
Sans compter que la diversité topographique habituelle bien agréable dans ce genre de jeux (mines, stages aquatiques, plaines parfois étranges dans leur conception, jungle bourrée de crocos…) est là, et que le gameplay s’adapte en fonction de ce level-design parfaitement maîtrisé. Chaque zone propose ses propres challenges et contraintes, pour un renouveau toujours présent dans les actions à effectuer (en plus du style de jeu basique, on va y revenir) : pousser des chariots, dérouler des rubans faisant office de routes, vous incruster dans un Yoshi-robot capable de détruire tout ce qui se trouve sur son chemin tel Godzilla… On a sans cesse droit à une nouvelle surprise, et ça, c’est encore un gros point fort de Yoshi’s Crafted World.
Mais tout ceci, c’est déjà entrer dans le détail alors qu’on n’a pas encore effleuré les prémisses du jeu, ce sur quoi repose sa maniabilité et son efficacité intrinsèque. La formule reste somme toute la même que celle des anciens titres dédiés à notre cher dino-tortue-ceci-cela… Vous bénéficiez donc d’une capacité de flotter quelques instants dans les airs, d’effectuer une attaque chargée en étant en l’air pour frapper les manants sur le sol, et surtout, de gober vos opposants d’un coup de langue bien placé tel un caméléon, ce qui aura différents effets. Avaler des ennemis spéciaux et les ennemis normaux n’aura pas la même conséquence, et l’excellent agencement des stages évoqué ci-dessus est bien entendu lié à cette caractéristique.
La Yoshi’s touch dans le maniement
Avalez un ennemi explosif, il vous servira de bombe pour détruire des murs ; avalez des Koopas bien connus, ils vous permettront de lancer leur carapace pour déglinguer tout sur leur trajet. Mais avalez un Maskass de base, et il se transformera en oeuf, élément sur lequel repose le principal du gameplay des jeux Yoshi depuis la nuit des temps. D’ailleurs, certains endroits vous permettront de refaire le plein d’oeufs rapidement sans devoir cavaler après les méchants pour les transformer en offrandes de Pâques. Bien vu, ça facilite les choses.
On entre donc à présent dans le vif du sujet. OK, on a gobé un ennemi et on a pondu un oeuf (puis deux, puis trois… qui nous suivent sans broncher). Qu’en faire ? Les adeptes de Yoshi le savent : ils servent de projectiles pour déglinguer adversaires et obstacles. Et là c’est juste du bonheur. La visée est impeccable, la satisfaction immédiate si on a bien réussi son coup, et surtout, comme on l’évoquait dans notre preview, ces actions s’effectuent en plusieurs dimensions.
De fait, même s’il demeure un platformer typé 2D assez linéaire, Yoshi’s Crafted World s’autorise un tas de divergences qui viendront bien vite pimenter votre progression. Mis à part le fait de pouvoir naviguer parfois de haut en bas comme sur une map classique, vous aurez surtout la capacité de tirer vos projectiles (outre sur votre chemin direct) vers le premier plan tout proche du joueur, mais aussi vers l’arrière-plan lointain, et croyez-le bien, ça change toute la donne par rapport à un jeu linéaire.
Bien des choses à faire
Surtout qu’une fois un stage terminé, en ligne droite dirons-nous, il vous reste fort à faire, et la replay-value du jeu explose. Et ça, c’est ENCORE le Bien !
Pour commencer, chaque stage recèle un certain nombre de fleurs plus ou moins faciles à dénicher ou à gagner, qui vous permettront d’ailleurs d’acheter votre droit de passage pour passer aux parties suivante de l’île. Mais même sans ça, les amateurs de ce genre de jeu savent qu’ils ne quitteront pas le stage avant d’avoir trouvé toutes les fleurs, par fierté.
Ensuite, une fois un stage terminé, des PNJ vous renverront l’arpenter à multiples reprises en vous confiant des requêtes que, pareil, le puriste se devra de réussir jusqu’à la dernière avant de quitter la zone. Il s’agira souvent de rapporter tel nombre d’objets cachés dans le décor, il faut donc bien ouvrir l’oeil sur le premier plan et l’arrière-plan évoqués ci-dessus pour débusquer tous les items ou bestioles en question. Très chronophage et plaisant !
Le monde à l’envers
Et puis, une fois qu’on a fait le tour du stage en long, en large et en travers, on reçoit également les missions verso. Kézako ? Hé bien voyez-vous, les niveaux colorés que vous parcourez avec plein de dessins d’arbres, de décors divers et d’animaux n’est que le recto du diorama ; en choisissant les quêtes verso, vous passez de l’autre côté du décor, et avez donc le stage à l’envers avec des missions nouvelles (notamment celle récurrente de retrouver et ramener 3 chiots pas toujours simples à dénicher). Donc paf, durée de vie encore doublée pour notre plus grand plaisir.
On terminera sur le contenu proposé en évoquant les pièces d’or, que l’on récupère au fil des stages et qui permettent, sur la map, de jouer à des gashapon, des machines à pièces qui vous distribueront des armures rigolotes pour Yoshi, plus ou moins rares et servant à vous protéger de quelques coups si vous en embarquez une dans le stage suivant. Bon, ça c’est surtout le petit bonus pour le fun, parce que globalement, Yoshi’s Crafted World n’est pas d’une terrible difficulté, malgré évidemment quelques passages un peu plus tendus que d’autres, donc certains boss.
Petit détail pour terminer dans le cas peu probable ou vous auriez un ami (votre Humble Narrateur a abandonné cette sale manie en 1994), Yoshi’s Crafted World est jouable à 2 en co-op, donc n’hésitez pas à le déguster avec ledit ami, ou votre petit frère, ou votre grand-mère, ou le livreur de pizzas ; il est aussi délicieux à 2 que solo, voire plus du fait de l’interaction entre les deux Yoshis.
Yoshi’s Crafted World est une belle réussite, notre vaillante monture n’aura guère eu à se plaindre de baisse de régime au fil de sa carrière, contrairement à un certains petit mammifère à poils piquants de couleur bleue et à chaussures rouges, pour n’en citer qu’un. Mignon, original dans son choix artistique, doté d’un contenu conséquent pour vous scotcher à l’écran des heures durant, ainsi que d’une jouabilité originale et sans faille, non, vraiment, on a vraiment du mal à lui trouver de gros reproches pour assombrir le tableau.
Allez, si on veut chipoter on pourra éventuellement le trouver plutôt « promenade de santé » malgré 2 niveaux de difficulté à choisir en début de partie mais ce détail n’est en aucun cas un obstacle qui devrait vous empêcher de vous ruer dessus. Grand jeu.