Vous souvenez-vous d’Utawarerumono: Mask of Deception ? Ce jeu d’Aquaplus, édité par Atlus, que nous avions testé, était un épisode de la série Utawarerumono. Ces jeux mêlent visual novel et tactical-RPG dans une esthétique moe. Utawarerumono: Mask of Deception, s’il était pétri de bonne volonté et de qualités, avait peiné à nous convaincre, la faute à une narration poussive, défaut éliminatoire pour un visual novel.
La fin d’Utawarerumono: Mask of Deception avait de quoi laisser le joueur en suspens. Aussi ceux qui se sont laissé porter par l’aventure avaient-il hâte de suivre la suite des péripéties de Haku et Kuon. Et joie sur eux, car la suite, Utawarerumono: Mask of Truth n’a mis que quelques mois à sortir, sur PlayStation 4 et PS Vita. Alors le petit nouveau fera-t-il les mêmes erreurs que son prédécesseur ?
Père Castor, raconte-nous une histoire !
Peu de temps s’est écoulé depuis la fin de Utawarerumono: Mask of Deception. Les événements ont pris une sale tournure pour nos héros. Tout d’abord, Kuon, qui a quitté le groupe, se réveille amnésique dans son fief de Tuskur. Et si elle est entourée de sa famille, qui l’a recueillie, elle ressent un manque. Au détour d’une conversation, elle apprend que son père, le roi, envisage de lancer une guerre contre le pays de Yamato, dans lequel vivent tous ses amis.
Pire, la jeune fille comprend que son destin est de prendre les armes et de diriger l’expédition. De son côté, Haku, qui a été laissé pour mort, a hérité du masque et de l’identité d’Oshtor suite à diverses péripéties que nous ne raconterons pas. Le jeune homme se retrouve alors à devoir administrer la province d’Ennakamuy dans laquelle lui et ses potes se sont retranchés après avoir été accusés à tort du meurtre de l’empereur et de tentative de meurtre sur la petite princesse Anju. Sous le masque d’Oshtor, Haku doit préparer le peuple dont il a la charge à une guerre sans merci, ni s’il vous plaît.
Tels sont les prémices de l’intrigue de Utawarerumono: Mask of Truth. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les enjeux ont sacrément été relevés, dès le début. Si le premier épisode débutait sur une tonalité légère, voire frivole, cette fois-ci, ce sont les rouages d’une tragédie que nous voyons se mettre en marche sous nos yeux. La narration, bien moins erratique qu’auparavant, est bien plus maîtrisée et le scénario démarre bien plus rapidement que dans Mask of Deception. En effet, cette fois-ci, il faudra deux heures (contre près d’une dizaine dans le précédent opus et on exagère à peine) avant de voir se dérouler le fil de l’histoire.
Le titre, s’il mise toujours sur une atmosphère moe avec ses princesses virginales à la petite voix et aux grands yeux, n’en oublie pas moins qu’il vise à conter une histoire. Et celle-ci est intéressante. Outre les intrigues politiques, nous suivons les conflits intérieurs de Haku, obligé de vivre sous une autre identité et de prendre des décisions aux conséquences importantes. Les personnages ont mûri suite au premier. Ils ont évolué. Et c’est agréable.
« Pour faire la guerre, il faut être la guerre » (J. Rambo)
Nous l’avons indiqué dans l’intro, Utawarerumono: Mask of Truth n’est pas qu’un visual novel. C’est également un tactical-RPG. Et sur cet aspect, il se démarque très peu de son prédécesseur. Comme dans Mask of Deception, la partie tactical-RPG est très agréable à prendre en main. Le jeu ne casse pas trois pattes à un canard et il est très simpliste en soi. Il sollicitera néanmoins l’attention du joueur car chaque technique des personnages peut être rendue plus puissante si le joueur appuie en rythme sur la touche X ou la maintient et la relâche au bon moment. Ceux qui ont joué au premier volet ne seront pas dépaysés.
On y retrouve tout, comme les affinités élémentaires, la gestion du zeal permettant, une fois la jauge remplie, de combattre un tour de plus, et une interface intuitive. Le jeu ajoute en plus la possibilité d’effectuer des attaques en coopération avec un équipier, ce qui dynamise encore un peu plus les escarmouches. Enfin, de nouveaux modes de jeu sont inclus, comme les épreuves de Munechika qui pimenteront les échauffourées avec des conditions à remplir.
Cependant, tout comme dans le premier opus, ces phases, vraiment agréables à jouer, sont trop rares, et c’est frustrant, car il faut parfois attendre des heures et des heures de dialogues avant de pouvoir retourner s’éclater sur le champ de bataille.
Par ailleurs, il est dommage que graphiquement, ces phases n’aient pas réellement évolué. Elles restent visuellement assez rudimentaires, sans plus de folie. Les personnages, modélisés en style SD (ou super deformed, avec de grosses têtes et de petits corps) restent aisément reconnaissables, cependant on aurait aimé que le jeu profite plus des spécificités de la console, surtout sur PS4.
Sur les traces de son aîné
On retrouve dans Utawarerumono: Mask of Truth beaucoup de traits de son aîné. Ainsi, outre un monde complet, dont vous pourrez découvrir tout plein d’éléments via un codex très détaillé, la narration prendra le temps, durant quelques saynètes au ton plus ou moins léger, d’en apprendre plus au joueur sur les personnages.
Par ailleurs, le chara-design, bien que passe-partout, reste assez soigné pour rendre les personnages attachants. Le doublage, très marqué anime, est efficace, les acteurs étant investis. Enfin, la musique du jeu, déjà un point fort du précédent épisode, s’avère tout à fait à la hauteur. L’OST, qui suit la tonalité plus sombre de l’intrigue, recèle de perles avec des pistes chantées chargées en émotion et de morceaux instrumentaux à la tonalité épique.
Mais si les qualités du précédent subsistent, c’est également le cas de ses défauts. Le pire de tous étant un problème de rythme, surtout dû à la forme du titre. Le light novel n’est pas le genre le plus punchy du jeu vidéo, nous en sommes conscients. Cependant, Utawarerumono: Mask of Truth pêche par une forme de paresse technique qui pèse lourdement sur le dynamisme du jeu. Lors de la phase light novel, les personnages sont statiques, une animation des lèvres aurait été le minimum afin d’apporter un semblant de vie aux tableaux.
Par ailleurs, le jeu étant extrêmement bavard, les dialogues sont parfois interminables. Les personnages ont beaucoup de choses à dire, et pas forcément des trucs intéressants. Pour finir, Utawarerumono: Mask of Truth souffre du fameux défaut des light novels sortant en Occident : il n’est pas traduit dans la langue de Mimie Mathy. Si vous avez des difficultés avec la langue de Neil Gaiman, passez votre chemin, car vous ne parviendrez pas à saisir suffisamment d’éléments dans cette orgie d’informations.
Pratiquement semblable en tous points à son prédécesseur, Utawarerumono: Mask of Truth n’en est pas moins meilleur, car il résout le plus grave problème de Mask of Deception : l’intrigue est plus équilibrée. Elle souffre de quelques coups de mou, mais elle démarre tôt. Et cela fait toute la différence.
En corrigeant un seul élément, le jeu est passé de « ouais pas mal » à « bon ». Si Utawarerumono: Mask of Deception voulait nous présenter un monde, Utawarerumono: Mask of Truth veut nous conter une histoire, et remplit ainsi son rôle de roman interactif. Si vous souhaitez une jolie histoire, si vous maîtrisez la langue d’Edgar Wright, alors Utawarerumono: Mask of Truth est fait pour vous. En tous cas, il nous a convaincu. Tout d’abord parce que l’intrigue du jeu est sympa, mais aussi parce que les histoires de come-back, c’est cool. Après la déception du premier, on peut dire que ce second épisode aura été le moment de vérité pour Utawarerumono.