Uragun est un top-down shooter avec des éléments de Roguelite. Voilà, fin de la critique, ou presque. Car ce qui nous a intéressés avec ce titre, c’est l’histoire de son développement, très lié aux retours des joueurs après les phases de bêta test. On lit régulièrement que les phases de bêta ont perdu de leur sens, et sont aujourd’hui plus marketing que techniques.
Si c’est le cas, les développeurs du studio polonais de Kool2Play sont des résistants, car ces derniers n’ont pas hésité à revoir complètement la structure de leur titre en prenant en compte les résultats des premiers playtests. Pour quel résultat ?
(Test de Uragun sur PC réalisée à partir d’une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Die and retry
En 2022, Uragun est un top-down shooter probablement développé avec passion, mais qui peine à attirer les regards. Trop classique ? Pas assez séduisant graphiquement ? À vrai dire, on n’en sait rien, puisque nous faisons nous aussi partie de cette masse qui ignorait alors tout du jeu. Une situation à la fois pénible et décevante pour les développeurs de Kool2Play, qui, on l’imagine, croyaient en leur bébé, mais dangereuse aussi pour la pérennité du studio.
Réalisant que le jeu allait sombrer dans les fosses communes des milliers de jeux invisibles qui paraissent chaque année sur Steam sans pour autant rencontrer les joueurs, le studio s’est profondément remis en question, comme ses équipes le racontent dans une note publiée sur Steam :
« Quand nous avons lancé Uragun en early access, l’équipe était très fière de ce que nous avions accompli. On savait que le jeu n’était pas fini, et qu’il lui manquait encore de nombreuses fonctionnalités, mais on le trouvait fun, et la passion que l’on avait mise dans son développement se ressentait dans tous les petits détails. La plupart de ceux qui l’ont alors acheté semblaient penser la même chose. Vous nous avez dit que l’action est à la fois fluide et fun, que l’aspect visuel vous plaît, et vous étiez impatients d’avoir plus de morceaux de sa bande originale si cool.
Cependant, nous n’avons pas réussi à intéresser un public assez important. Pour différentes raisons, peu de gens ont eu envie d’essayer notre top down shooter. Nous avons alors compris qu’en continuant à travailler dans la même direction, nous ne réussirions pas à attirer assez de joueurs pour rendre le projet et le studio viables. Ce qui nous a forcés à repenser nos plans et notre objectif. »
Le studio a alors tout remis à plat, en gardant néanmoins les éléments qui avaient plu aux premiers joueurs.
U-rogue-gun
Résultats ? Uragun, le top-down shooter, est désormais Uragun, un top-down shooter, mais avec des éléments aléatoires venant varier les parties, et surtout une progression de notre avatar entre chaque mort, qui se révèleront être (très) nombreuses. Concrètement, on joue un mécha aux allures de ED-209, le robot déréglé dans le RoboCop de 1987, évoluant dans un futur faisant moyennement rêver (mais duquel on se rapproche hélas jour après jour) à la recherche de son pilote disparu.
Comme dans les pires scénarios impliquant ChatGPT, les machines se sont dressées contre les hommes, et constituent désormais une faune hostile que notre bipède va devoir traverser pour retrouver son pilote. Sur son chemin, le robot pourra trouver différentes ressources permettant d’upgrader ses capacités : toutes nouvelles armes, mods offrant des capacités secondaires bien utiles, ou augmentation des jauges (vie, vitesse…).
Le twist étant qu’à chaque mort, Roguelite oblige, tous ces bonus disparaissent. On ne repart néanmoins pas complètement désossé, puisque chaque run nous offre quelques points d’expérience, qui permettront de progresser petit à petit (mais vraiment petit) sur un arbre de compétences offrant, lui, des bonus permanents.
Dur, mais juste
Bonus qui ne seront pas de trop si on veut voir les différents cartes que propose le jeu, car celui-ci est particulièrement difficile ! Si le gameplay de base est celui d’un top-down shooter, il fonctionne aussi sur les bases d’un twin stick shooter (un stick pour déplacer le robot, un stick pour diriger ses tirs), prend parfois des airs de manic shooter (les tempêtes de boulettes dans les shoot’em up hardcore), et exige de maîtriser une mécanique de dash essentielle à la progression.
Un dash qui permet de franchir des fossés, mais surtout de se rendre invulnérable pendant quelques fractions de seconde, et ainsi d’éviter les murs de projectiles envoyés par les ennemis, ou de se sortir des rayons d’explosion de leurs missiles et autres bombes. Dash, arme principale, arme secondaire, attaque d’Ardeur (une sorte d’attaque spéciale) ou Override (autre attaque spéciale), chacune avec sa propre touche… il va falloir avoir sa manette (ou son clavier) bien en main, et les idées claires pour lancer la bonne commande au bon moment.
Heureusement, si le jeu est exigeant, il peut se le permettre : les contrôles répondent à la perfection, les animations et les terrains sont clairs et lisibles. On est face à une production certes relativement modeste, mais soignée de bout en bout. On voit que le budget du jeu a ses limites, par exemple avec les dialogues qui ne sont pas doublés, mais le sound design est lui travaillé. Le bestiaire paraîtra assez réduit au début, mais s’étoffe au fur et à mesure des progrès et des autres cartes visitées.
Ce qui manquera peut-être au jeu, c’est ce petit détail qui l’aurait rendu marquant, original. On est ici face à une proposition honnête, maîtrisée, qui plaira très probablement aux amateurs du genre à la recherche d’un challenge, mais qui reste toutefois très scolaire.
Si vous êtes sensible aux top-down shooters et aux jeux difficiles, vous devriez définitivement laisser sa chance à Uragun, qui est aux petits oignons sur ces aspects, avec un graphisme pas désagréable et une animation à la hauteur.
Cependant, si le genre ne vous attire pas outre mesure, le titre va manquer de ce petit quelque chose qui aurait pu servir à convaincre un public plus large.