Proposé le 5 juillet dernier aux joueurs occidentaux (près trois ans après sa sortie initiale au Japon) Trails into Reveries est ainsi venu mettre un terme à une ère. En arrivant en effet sur consoles PlayStation, Switch et PC, l’épisode en question a apporté la conclusion à l’ensemble composé du diptyque de Crossbell et de la saga Trails of Cold Steel, comportant quant à elle quatre opus. Résultat de cela : on n’est pas trop surpris de retrouver les deux héros que l’on a vu évoluer au cours de ces segments, les prénommés Llyod Bannings et Rean Schwarzer, lesquels rempilent donc pour lever le voile sur le nouveau mystère que nous ont concocté les équipe de Falcom. Et cela en vaut-il le détour ?
Certains trouveront probablement le jeu empreint de lourdeur, d’autres plongeront sans réticence dans l’histoire de ce Trails. En tout cas, les amateurs d’expérience narrative et de longs dialogues sans fin, et surtout les fans de la franchise, ne seront pas dérangés outre mesure. Bien, au contraire.
(Test de The Legend Of Heroes: Trails Into Reverie réalisée sur PS5 à partir d’une copie fournie par l’éditeur)
Une ouverture sur les chapeaux de roues
Le jeu débute sur un rythme assez rapide. À vrai dire, il s’agit d’une ouverture in medias res : nos héros, en pleine action, sont à la poursuite d’un groupe gens malintentionnés, une faction de soldats désireux de placer la ville de Crossbell sur leur joug. Et, à ce moment du jeu, c’est logiquement mouvementé. Pour exemple, les combats au tour par tour (on ne change pas la formule) s’enchaînent.
Mais, ici, plutôt que de fournir aux joueurs un défi de taille dès les tout premiers instants, on leur fait avant tout part d’une intention didactique, histoire de les mettre dans le bain. Chose qui sera très utile aussi bien aux habitués qu’aux nouveaux venus… ou à ceux n’ayant fait que les deux derniers épisodes parus entre septembre 2022 et mars 2023. Car, entre-temps (rappelons que dix ans séparent cet épisode des deux autres), le système a un peu évolué. Et, force est de constater que cela ne sera pas du tout négligeable. C’est tellement riche de ce côté que l’on aura tendance à s’y perdre.
Néanmoins, dans l’ensemble, il n’y a pas de grands bouleversements. Certes, il existe bien des améliorations, mais les bases, elles, restent les mêmes. On peut de fait toujours choisir entre se déplacer, utiliser la magie, des attaques spéciales ou encore mettre à profit des coups normaux. De même, il est possible de s’appuyer sur d’autres types de commandes telles que la classique case réservée à la consommation d’objets, le recours à la fuite (quand cela est permis) ou encore une autre fonction visant à utiliser une compétence propre afin de se renforcer. Bref, le système est assez complet et ce n’est pas sur ce point en particulier que l’on se plaindra, d’autant que la difficulté est bien présente – même si ce n’est pas dès le commencement.
Un jeu plein de lourdeurs ?
Non, ce qui retiendra davantage notre attention touche à tout ce qui concerne l’univers du jeu. C’est-à-dire l’histoire, les personnages, etc. Et si l’on n’est pas un amateur de ce type de production « à la japonaise », ou tout simplement de la série, il y aura de grandes difficultés à apprécier la proposition de Falcom et NIS. Les clichés se succèdent et le jeu déborde de bons sentiments, et ce, un peu trop souvent. Ce qui peut être vu comme une façon (un peu trop lourde) d’appuyer sur les qualités morales de nos protagonistes. Outre cela, l’hypersexualisation des personnages féminins sera très certainement jugé négativement par certains yeux, pensant qu’il est tout à fait inutile de « flatter » l’œil du joueur pour le périple que l’on nous propose.
Mais disons qu’il est possible d’en faire abstraction. En revanche, ce sera loin d’être le cas pour ce qui constitue la majeure partie du jeu : les dialogues, lesquels constituent en quelque sorte l’essence du titre, un peu comme on a pu d’ailleurs le voir avec Trails to Azure. On ne dira pas qu’ils sont mauvais. Cependant, quelques passages auraient pu être passés sous silence sans que rien ne soit changé à l’expérience.
Il y a en effet des banalités tout à fait dispensables. Alors oui, ce n’est pas toujours le cas. Parfois, ces dernières sont nécessaires et significatives, peut-être pour montrer quelques moments d’insouciance, de bonheur ou de paix, voire l’alchimie entre les divers représentants du casting.
À vrai dire, Trails Into Reverie répond en quelque sorte à une logique digne des visual novels, lesquels sont souvent régis par des échanges banals. La différence, c’est qu’ici, au lieu d’avoir des images fixes en 2D, on a droit à de réelles cinématiques. Toutefois, même si c’est dans l’ordre des choses, ça peut véritablement poser problème à ceux qui désirent faire plus que subir ce qu’ils ne peuvent contrôler.
Concrètement, l’impatience les animera et ils ne voudront qu’une chose : arpenter les divers paysages offerts par le jeu. Et lorsque cela leur sera permis, un autre motif de plainte pourrait surgir. C’est que le chemin est globalement balisé par des points d’exclamations, lesquels représentent donc les événements principaux. Ce qui nous donne l’impression de faire face à un jeu extrêmement dirigiste. Évidemment, rien ne nous pousse à y aller rapidement. On peut prendre notre temps et regarder les alentours, à la recherche d’objets qui pourront avoir une nécessité dans les combats à venir.
Pour les initiés seulement ?
Étant donné que l’on sera donc très souvent amené à les voir s’exprimer, il est peu dire que le casting est d’une grande importance. Et, comme dit plus haut, les lieux communs (et les chara designs en ce qui concerne les personnages féminins) auront tendance à refroidir un peu.
Mais, c’est avant tout le joueur non familier qui aura quelques problèmes avec ces derniers. Il est fort probable, même certain, qu’il ne pourra les apprécier comme l’amateur le ferait. Ce qui est tout à fait normal puisque celui-ci n’aura pas eu le temps de découvrir progressivement l’intégralité du casting, et restera notamment insensible à leur passé qui sera quelques fois évoqué. Il n’y aura pas ce degré de sympathie qu’un public averti pourrait avoir développé.
À cela s’ajoutera un assez grand nombre de longueurs, l’histoire mettant du temps, voire trop, à s’installer. Si l’introduction, comme relaté plus haut, promet quelque chose de dynamique, elle s’apparente aussi à une fin qui ferme la porte sur des événements annexes à la trame principale. Le rythme effréné a donc un sens : il traduit un peu cette ambiance. La partie qui suit cette intro n’en est donc que peu intéressante pour le joueur en quête d’action. Ce modèle n’est pas nouveau. Les habitués de la série n’en seront absolument pas dépaysés. Les autres, eux, trouveront le temps long à force de réaliser des choses sans grand intérêt. Et ce n’est pas qu’une impression. Il y a des moments où la quête ne se résume qu’à sortir d’un bâtiment ou à faire quelques allers-retours. Rien de bien enthousiasmant.
Cela – tous ces défauts – frappera violemment le joueur aventureux. Le fan, lui, n’aura sans doute pas trop de mal à être satisfait. D’ailleurs, le contraire serait étonnant, car le spectacle qu’on lui offre sera ce pour quoi il s’est procuré le jeu. Mais, tout de même, on ne peut s’empêcher de penser qu’un des éléments cruciaux du titre, le « couloir de la Reverie » du titre, met vraiment du temps avant de faire son apparition. Pour tout dire, il nous a fallu un peu moins d’une vingtaine d’heures (et peut-être que certains mettront moins de temps) pour pouvoir y accéder.
Mais alors, Trails Into Reverie vaut vraiment le coup ?
Cet endroit-ci, lequel s’apparente à un donjon, est vraiment appréciable, et donne même aux joueurs une véritable expérience gouvernée par l’interaction. On a quelque chose à y faire autre que d’assister à des lignes de texte qui n’ont (malheureusement) pour langue de traduction que l’anglais. On explore, trouve quelques objets et affronte une poignée d’ennemis, dans le but d’augmenter nos statistiques notamment. Et puis, notons que, dans ce lieu, il y aura également l’occasion de s’essayer à un jeu de cartes. C’est bienvenu, mais encore faut-il en maîtriser les règles.
S’il y a très peu de choses fournies aux joueurs, alors Trails Into Reverie est-il une œuvre à faire réellement ? Oui, bien qu’il soit vrai que, jusqu’à présent, les mots partagés ont clairement pas été en la faveur de la création de Falcom. Pas que l’on ait tenu à chercher des reproches par-ci, par-là, mais plutôt que l’on a voulu essayer de dépeindre un tableau le plus objectif qui puisse être fait. Dire que ce qui nous est offert réussit à captiver serait pas totalement vrai. Et il nous semblait juste d’avertir que ce présent jeu n’est pas destiné au premier venu. Loin de là. C’est donc avec cet état d’esprit qu’il est conseillé de l’approcher.
Par conséquent, quand l’on sait à quoi l’on à affaire, les heures (plus que conséquentes) passées sur ce volet sont on ne peut plus présentes. On se plaît à suivre l’aventure de nos trois héros, car oui, ils sont bien trois : Llyod, Rean, évidemment, mais aussi un mystérieux personnage répondant au nom de C, dont la route scénaristique a particulièrement eu notre attention.
C’est que les mystères et les révélations qui jalonnent le soft ainsi que les entrecroisements entre ces différentes histoires et le suspense ménagé arrivent à nous tenir en haleine, tant et si bien que l’on est pris dans l’intrigue. Ajoutons à cela un casting vocal japonais expérimenté, une direction artistique agréable proche de l’anime et une composition musicale qui ne l’est pas moins (bien qu’un peu marquée par la répétitivité), sans oublier les différentes activités mises à notre disposition (quêtes secondaires, mini-jeux…), pour être tout à fait happé et se perdre durant des heures durant.
Et même la linéarité dont il est fait mention ci-dessus n’est finalement pas un gros obstacle, puisque Falcom arrive plus ou moins à la casser en laissant au joueur le choix de changer de route quand il le souhaite, même si à un moment donné ce choix devient une obligation.
Au final, Trails Into Reverie est un titre qu’il serait difficile d’apprécier si l’on choisit de faire un premier pas dans l’univers avec cet opus. Si c’est le cas, un grand nombre de joueurs se perdra et, par là, verra son envie de continuer le périple s’amoindrir et complétement disparaître. Logique. Qui irait se perdre en plein milieu d’un livre sans avoir suivi les pages qui le précédaient ?
De plus, le jeu n’est pas facile à appréhender. Déjà, il y a la langue de traduction entièrement en anglais qui découragea le public non anglophone. Ensuite, il y a tout ce qui concerne le système de combat, qui, bien qu’il soit riche, peut parfois laisser perplexe, toutes les subtilités n’étant pas si simples à saisir. Mais, si on est un inconditionnel de la série, il ne devrait y avoir aucun problème, ce Trails a toutes les cartes en main pour continuer à satisfaire son fidèle public.