Il est de ces jeux qui ont le don de vous intriguer rien qu’à leur nom. Si même le plus casual des joueurs sait à priori parfaitement à quoi s’attendre en achetant un Call of Duty, un FIFA ou encore un Mario Kart, bien malins en revanche ceux qui ont été capables de déterminer ce qui se cachait derrière un titre aussi évocateur que The Sexy Brutale.
Désolé pour les amateurs : il n’y est pas question de cuisse légère. Mais si vous n’êtes pas contre une petite partie de Cluedo et que l’évocation du Jour de la Marmotte vous fait sourire, alors venez découvrir dans ce test cette petite pépite signée Tequila Works et Cavalier Games Studio, qui est disponible sur PlayStation 4 ainsi que sur Steam !
Un jour, cent fins
Bienvenue au Sexy Brutale, ce gigantesque et opulent manoir doublé d’un casino, qui servira de décor à votre aventure. S’il est réputé pour ses soirées mondaines de haute volée, l’heure n’est hélas pas à la fête : les convives hauts en couleur invités par le propriétaire des lieux se font tous assassiner les uns après les autres. Pire : ces sinistres événements semblent condamnés à se répéter inlassablement, puisque la demeure est sous le joug d’une boucle temporelle, qui voit la journée fatidique redémarrer dès que les horloges sonnent minuit. Lafcadio Boone se réveille au beau milieu de ce sombre traquenard, et, aidé par les indications de la mystérieuse Bloody Girl, entreprend de sauver les convives du sinistre destin qui les attend inexorablement, étant le seul à avoir conscience de ce qu’il se passe.
Le concept atypique de ce jeu est un des points forts de The Sexy Brutale. Et il n’est pas sans rappeler celui de l’excellent Ghost Trick, sorti il y a quelques années de cela sur la Nintendo DS. La différence majeure réside ici dans le processus qui vous permettra d’empêcher les carnages, qui exigera patience, exploration et observation. Lafcadio devra en effet retracer les événements menant à chaque meurtre en épiant les déplacements des victimes sans jamais interagir directement avec eux, les masques mystérieux que portent les convives empêchant entre autres notre héros de se trouver dans la même pièce que quiconque.
Et c’est en découvrant les événements menant au meurtre que vous pourrez imaginer un moyen de l’empêcher, en vous aidant des objets que vous trouverez sur votre route. Vos armes principales seront donc avant tout votre capacité à observer à travers les trous de serrure et à écouter aux portes, dans l’espoir de surprendre des informations, des dialogues qui vous permettront de déjouer les sombres machinations du manoir.
Tick Tock Goes The Clock…
Mais il vous faudra cependant composer avec cette fameuse boucle temporelle, qui vous ramènera automatiquement là où vous avez débuté votre journée quand sonnent les douze coups de minuit, vidant au passage vos poches de tout objet que vous auriez pu glaner à l’exception de quelques « objets clés ».
Si cela peut être initialement synonyme de contrainte, dans la mesure où votre champ d’action est limité, vous pourrez rapidement apprendre à dompter cet étrange phénomène à l’aide d’une montre à gousset spéciale qui, une fois synchronisée à l’une des nombreuses horloges du manoir, vous permettra d’en faire votre nouveau point de départ. Elle vous permettra également de remonter de vous-même le temps lorsque vous le souhaitez, ce qui pourra s’avérer utile lorsque votre stratégie pour sauver une victime échoue.
Un fonctionnement qui n’est pas sans rappeler celui de The Legend of Zelda – Majora’s Mask (que nous avions testé sur 3DS), son Ocarina et son Chant du Temps, une référence parfaitement assumée par les développeurs, à tel point que la comparaison ne s’arrête pas là ! Car dans The Sexy Brutale, chaque invité que vous parviendrez à sauver vous transmettra les pouvoirs du masque ouvragé qu’il porte, synonyme de nouvelles compétences à exploiter dans votre exploration.
Il pourra s’agir tantôt d’une ouïe sur-développée vous permettant de capter des sons autrement inaudibles, tantôt de la faculté de percevoir les nombreux fantômes qui hantent le manoir. C’est armé de ces nouvelles aptitudes que vous pourrez accéder à d’autres zones de la demeure et, donc, à de nouveaux meurtres. À cela s’ajoute une carte interactive indispensable aussi bien pour vous repérer que pour garder une trace des déplacements de chacun au fil des heures, ou encore conserver des informations clé.
Les mécaniques du jeu sont donc simples et efficaces, et on se retrouve vite happé par ce système, pressé de sauver convive après convive. Il convient malgré tout de noter qu’une fois ce système appréhendé par le joueur, il n’évolue au final que très peu au cours du jeu, conférant une certaine répétitivité au titre malgré les nouvelles aptitudes débloquées. Un aspect qui fort heureusement est presque totalement éclipsé par une ambiance soignée et très réussie.
C’est la fête au Manoir !
Il faut le dire : c’est bel et bien le manoir éponyme qui est la véritable star de The Sexy Brutale. Le choix de la 3D isométrique sied parfaitement à l’expérience de jeu, et permet de mettre en valeur la multitude de décors variés à l’esthétique art déco plus que réussie. On en arrive même à parfois perdre de vue nos objectifs principaux, et à s’abandonner au simple plaisir de découvrir de nouvelles pièces de la demeure, ne serait-ce que pour tenter d’y récupérer les 52 cartes à jouer ou les 9 invitations des personnages à collecter pour finir le jeu à 100%. Et qui sait, peut être au hasard d’un couloir surprendre un autre meurtre ?
À cela s’ajoute un habillage audio aux sonorités jazzy, qui immergent encore un peu plus le joueur dans cette atmosphère que n’aurait pas renié Agatha Christie. Très présente sans jamais être oppressante, la bande son est une autre réussite du titre, évoluant pour prendre des tours plus menaçants lorsqu’un meurtre est sur le point d’être commis à proximité.
Enfin, un soin tout particulier a été apporté aux dialogues, qui sont teintés de cet humour noir omniprésent dans le jeu, en y ajoutant parfois quelques références loin d’être anodines à d’autres classiques de la culture vidéoludique. Une fois de plus, le joueur sera tenté de sortir des sentiers battus et d’épier un maximum de conversations ou d’examiner une multitude d’éléments du décor, ne serait-ce que pour en apprendre un peu plus sur le manoir, et recoller les pièces du puzzle macabre qui ont donné lieu à cette situation.
Tellement de choses à faire et si peu de temps…
Il faut compter entre 6 et 8 heures pour faire le tour du Sexy Brutale et en sauver tous les occupants. Si on y ajoute les objets à collectionner, et le plaisir de se balader dans le manoir, on approche aisément les dix heures de jeu. Et au delà du simple plaisir d’atteindre le 100%, les informations que vous obtiendrez sur les lieux et les invités viendront étoffer un scénario pour le moins subtil et étonnant, avec quelques twists bien sentis qui sauront vous tenir en haleine. Une chose est sûre : on n’a pas le temps de s’ennuyer dans The Sexy Brutale, à tel point que malgré une durée de vie plus qu’honorable pour un jeu de ce genre, on est presque déçu de voir la fin arriver aussi vite, tant on souhaiterait prolonger l’expérience jusqu’à plus soif.
Vous l’aurez compris, The Sexy Brutale fait indéniablement partie de ces petites perles atypiques sorties de nulle part, et on ne peut que saluer le travail et le soin apportés par les développeurs pour nous offrir un jeu aux influences multiples, mais qui réussit à ne ressembler à aucun autre. De par son univers joyeusement macabre teinté de surnaturel, et son gameplay certes simple, mais efficace, le titre de Cavalier Games Studios et Tequila Works ravira les fans d’énigmes, d’humour noir et de scénarios alambiqués. Alors bienvenue au Manoir !