Avant toute chose, il faut savoir que derrière The Evil Within se cachent un homme et un contrat. En effet, Shinji Mikami, cette icône du jeu vidéo bien connue pour avoir développé la série des Resident Evil du 1 au 4, s’est vu proposé un contrat de la part de Bethesda. Rappelons au passage que l’entreprise américaine a racheté il y a peu Tango Gameworks, studio monté par ce même homme. Le contrat était simple : développer un survival-horror, la marque de fabrique de Shinji Mikami en somme.
En perdition perpétuelle depuis l’échec commercial de P.N.03 ou encore de Vanquish, notre homme a sauté sur l’occasion pour refaire couler le sang à flot. A noter que SEGA lui avait fait la même proposition il y a quelques années mais celui-ci l’avait refusée, il voulait changer de registre. On peut donc en déduire que ce nouveau contrat est bien juteux, la fin justifie les moyens après tout. C’est ainsi que The Evil Within est sorti de l’ombre. Le papa des Resident Evil a fait ce qu’il savait faire de mieux : nous faire peur dans un jeu vidéo.
Halloween approchant, le moment semble idéal pour tester The Evil Within ! Shinji Mikami a t-il réussi son nouveau pari, même après toutes ces années ?
Psycho Break : un cauchemar éveillé
Ici, nous incarnons Sebastian Castellanos, un détective qui va vivre une sale journée. Appelé d’urgence pour se rendre à l’hôpital psychiatrique Beacon, notre héros en imperméable va assister à la pire scène de crime de sa vie. Corps sans vie jonchant le sol à chaque coin de pièce, le détective va tenter d’élucider cette sinistre affaire.
Il va alors faire connaissance de Ruvik, un être malveillant doté de pouvoirs surnaturels. C’est alors que notre héros va être téléporté dans un autre monde où la survie deviendra sa principale préoccupation. Homme à la tronçonneuse, chien mutant, paysans peu accueillants, bref, il faudra courir ou apprendre à se battre. On sera alors trimbalé de monde glauque en monde glauque, de couloir sordide en couloir sordide dans le but de trouver des réponses à cette question fondamentale : pourquoi ? En effet, dans The Evil Within, on ne sait rien du pourquoi, il n’y a aucune explication à nos tourments. On a l’impression d’errer dans un délire constant où l’on peut passer d’une salle obscure d’hôpital à un champ de tournesol en une fraction de seconde. C’est à se demander si notre personnage principal n’est pas fou à lier. Le titre japonais prend alors tout son sens : Psycho Break.
Dans notre cauchemar éveillé, nous retrouverons d’autres personnages, des coéquipiers. On passera alors notre temps à les aider et à les sortir d’une mort atroce. The Evil Within installe une atmosphère pesante et vraiment malsaine. C’est gore, ça fait peur et la mort rôde à chaque pas. Sur ce point, Shinji Mikami n’a pas perdu la main, l’horreur est bien au rendez-vous.
Ça sent le réchauffé non ?
Dès les premières minutes de jeu, The Evil Within fâche mais par où commencer ? Il y a tellement de choses à dire. Tout d’abord, deux bandes noires viennent littéralement gâcher votre expérience de jeu. Ces bandes se plaçant en haut et en bas de votre écran sectionnent une partie de votre vision. On se demande réellement quel est l’intérêt de leur existence ? Après quelques minutes d’incompréhension et après qu’on réalise qu’il est impossible de les retirer dans les options, on accepte la situation. C’est alors qu’un autre vilain défaut du jeu fait surface : la caméra. Celle-ci est beaucoup trop rapprochée au niveau des épaules, vous donnant l’impression d’un zoom permanent. Une nouvelle fois, on se demande pourquoi mais après tout pourquoi se poser ces questions, on n’est que des joueurs, on va gentiment avancer dans ce prochain couloir.
Niveau gameplay, c’est exactement celui de Resident Evil 4 mais en plus lourd. Sebastian est sacrément lent, ce qui rajoute une difficulté non négligeable en cas de présence d’ennemis. On prend vite ses marques et la fluidité des commandes fait son effet pour parfaire notre expérience du jeu. Il est évident que quand on copie une recette qui marche dans un contexte identique, ça marche encore ! On touche ici le cœur du réel problème de The Evil Within : il n’invente strictement rien et pompe les idées d’autres jeux à succès.
Voyez plutôt l’image ci-dessus, un homme à la tronçonneuse qui vous course dans une rage indéfinissable, ça vous rappelle rien ? Un culte secret pratiquant des rituels morbides non plus ? The Evil Within semble être la continuité de Resident Evil 4 dans bon nombre de points et de scènes. Le fait que Mikami soit aux commandes du titre justifie-t-il cette copie prononcée ? Vous seul avez la réponse à cette question.
Trop de sang tache
The Evil Within n’est pas à mettre entre toutes les mains car le jeu se veut terriblement sanglant et dérangeant. Ce dernier mise sur une réalisation basée sur l’abondance d’hémoglobine et frise par moment le « too much ». Cette impression du « trop » surprend à plusieurs moments dans le jeu et entache la crédibilité globale du titre. Geysers de sang, mares de sang, plonger la main dans le corps d’un défunt, c’est à se demander quel sera la prochaine étape du survival horror.
The Evil Within est sans nul doute celui qui va le plus loin à l’heure actuelle. Le titre se veut terriblement corsé aussi bien par ses ennemis qui parfois vous one-shot, par ses nombreux pièges mortels mais également par le peu de munitions disponibles à travers les chapitres. Il faudra utiliser son équipement avec adresse pour économiser balles, soins et autres grenades. Sachez toutefois qu’il est possible de s’armer d’une arbalète nommée Agonie (cette classe), ses carreaux peuvent être fabriqués à partir de matériaux récupérés çà et là, un bon moyen d’éviter le corps à corps, synonyme de mort assurée !
Au fur et à mesure du jeu, vous ramasserez un liquide vert qui sert de monnaie afin d’améliorer son héros. Il est également possible de se la jouer discret et de prendre l’ennemi par derrière. Il faudra alors rester silencieux, sans lumière, et malin, car The Evil Within est tout sauf un jeu d’infiltration. Notons finalement que les voix françaises sont assez risibles, on s’aperçoit vite du décalage entre l’image et le son, c’est dommage. Les musiques sont quasi inexistantes mais après tout ce n’est pas très important, la peur germe également sans le silence.
En somme, The Evil Within est loin d’être un mauvais jeu dans son genre. Shinji Mikami réussit son coup et nous propose une aventure horrifique parsemée de scènes mémorables et intenses. Le titre n’échappe pas à quelques défauts de gameplay, de réalisation mais l’ensemble est plaisant et on prend plaisir à explorer les entrailles d’un cauchemar sanglant.
Toutefois, je reste fâché envers ce titre pour la simple et bonne raison qu’il est un concentré de copié, un puzzle dont chaque pièce est tirée d’un autre jeu. C’est comme s’ils avaient pris une boite, mis tous les succès des dernières années dans le domaine : beaucoup de Resident Evil 4 (quoi de plus normal après tout), de Resident Evil 5 et de Silent Hill, un peu de The Last of Us, de Tomb Raider. Dans ce savant mélange, secouez et rajoutez une bonne dose de sang et vous obtiendrez The Evil Within. Ce constat est d’autant plus frustrant quand on pense au talent de Shinji Mikami. Le bougre avait littéralement renouvelé le genre avec RE4, aujourd’hui, il se contente de le réchauffer. C’est à croire que le contrat d’origine n’était peut-être pas si simple que ça. La fin justifie les moyens, même dans le jeu vidéo.