Ah l’écureuil, cet animal gracieux, sensible, ingénieux, charismatique, adorable, cet animal qui ne suscite que sympathie et regards bienveillants, quel mal pourrait-il bien faire ? Question hautement légitime que Squirrel with a Gun vient défier avec son héros à poil armé d’un uzi, d’un sniper et se déplaçant en voiture télécommandée pour répandre le chaos sur son chemin.
Voici de manière à peine grossière ce que proposent le studio DeeDee Creations et l’éditeur Massive Entertainement avec ce nouveau jeu burlesque. Derrière DeeDee Creations se trouve Daniel DeEntremont, dont on recommande par ailleurs la lecture de cette interview assez intéressante. Il s’agit d’un jeu développé par un artiste 3D sur son temps libre, ce qu’il est important de garder en tête au cours de la lecture du test. De même que l’impartialité la plus éthique et la plus rigoureuse de l’auteur envers la splendeur et la magnificence du héros.
La promesse du jeu est extrêmement simple : s’amuser à répandre le chaos avec des armes, explorer le petit monde façonné et récupérer certains objets. Après tout, un gland à récupérer et des glandus à affronter suffisent pour poser les bases d’un bon défouloir.
(Test de Squirrel with a Gun sur PC réalisé à partir d’une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Un écureuil armé de bonnes prémices
Squirrel with a Gun démarre avec notre protagoniste flamboyant qui découvre un bâtiment secret au sein duquel trône un gland en or. Après une phase de tutoriel qui nous présente les contrôles du jeu et les mécaniques de déplacement, l’on tombe nez à truffe avec un agent en costume qui vient nous offrir la première phase de combat ainsi que la tonalité du jeu. La maladresse de cet adversaire nous confère notre première arme et nous présente le principal type d’antagoniste que va nous opposer le titre au long de sa courte aventure.
Il est important de préciser que Squirrel with a Gun n’offre pas la possibilité de paramétrer les contrôles du jeu sur ordinateur et que l’on est contraint de jouer en WASD sur un clavier Azerty, ce qui est regrettable. Quant à savoir si c’est pardonnable pour un jeu indé vendu une vingtaine d’euros, chacun s’en fera le juge.
Squirrel with a Gun est fondamentalement un jeu de plateforme humoristique avec des phases de combat sympathiques mais vite répétitives. Le défi des plateformes est bien dosé : il s’agira bien souvent de manipuler les tirs de votre arme pour propulser l’écureuil en hauteur en veillant à bien utiliser vos munitions avec parcimonie.
Le rechargement de ces dernières se fait via des points lumineux sur lesquels il suffit de se rendre et attendre quelques secondes pour refaire le plein, quelle que soit l’arme utilisée. Un système généreux mais qui impose une certaine prudence dans l’emploi des armes pour explorer certains bâtiments et parvenir au bout d’un chemin de plateformes.
L’humour du titre n’est pas sans évoquer de l’absurdité à la Monty Python. Au-delà de la figure incongrue de voir un écureuil se balader en tenue de déminage dans une voiture télécommandée, un Uzi en taille réelle dans la main, la trame du jeu et les antagonistes sont extrêmement superficiels, stéréotypés et paradoxalement mystérieux en même temps puisque rien n’est expliqué.
Ce qui n’est pas nécessairement un handicap pour ce que propose le jeu, au contraire. Il n’y a pas besoin d’explication derrière les drapeaux des zones contrôlées par ces agents qui représentent un visage d’agent en très gros plan. Voilà des gens qui s’assument. L’on affronte tout du long des agents gouvernementaux en costume qui se ressemblent tous à la manière d’un Agent Smith de Matrix et deux boss : Père et Mère. Les combats avec ces derniers, et plus spécifiquement le triomphe de l’écureuil, offriront des cinématiques à faire pâlir Austin Powers.
Cette absence de variété trahit évidemment l’origine indie du jeu, mais il faut cependant reconnaître que le développeur a réussi à maîtriser le sujet des ennemis et en a fait une partie intégrante de l’humour du jeu. Une maîtrise qui ne contrebalance cependant pas toutes les autres redondances.
Se défouler à grands coups de redondance ?
Car le monde ouvert, quant à lui, est extrêmement vide. Il y a des civils qui font du jogging, déambulent ou font un barbecue dans leur jardin mais la faible quantité d’animations et de comportements de ces PNJ les rend peu vivants. On peut leur grimper dessus et les mettre KO brièvement, ou bien les menacer avec une arme pour qu’ils lâchent des glands, ou encore s’amuser avec la ragdoll de leur corps en leur lançant toutes sortes d’objets et c’est à peu près tout.
Le système de sauvegarde est vicieusement intégré au monde ouvert et consiste à aller se mettre sur des boîtes aux lettres pour enregistrer sa progression, sauf que ce n’est pas introduit dans le jeu, laissant le joueur découvrir le mécanisme de sauvegarde par chance, ou pire, en allant regarder un thread reddit comme l’a fait une personne bien connue de l’auteur qu’elle ne citera pas par décence.
L’exploration est cependant nécessaire pour trouver les glands en or qui permettent de déverrouiller les véhicules, indispensables à la progression du jeu. Mais c’est aussi l’occasion de trouver de nouvelle tenues et couleurs de fourrure pour notre héros, ainsi que de nouvelle armes, qui seront ensuite achetables avec des glands normaux.
Les armes justement, sont assez jouissives à utiliser : visuellement démesurées par rapport à la taille de l’écureuil, elles bénéficient d’une bonne sensation de tir et permettent des exécutions uniques.
Ces exécutions peuvent être effectuées sur les agents lorsqu’ils sont affaiblis et mettent un genou à terre, ce qui est là encore l’occasion de voir notre ami à la queue touffue les neutraliser de manière burlesque et comique. Cependant, il n’y a qu’une seule animation d’exécution par type d’arme et l’on arrive très rapidement à une répétitivité quelque peu lassante.
Que penser de ce Squirrel with a Gun ? Le jeu présente une aventure sympathique, rythmée par de l’humour absurde assez plaisant, mais souffre de problèmes de répétitivité qui arrivent trop rapidement. Les ennemis sont identiques, les civils peuvent être mis à terre et harcelés mais sont invulnérables, les cinématiques d’exécution deviennent redondantes et le jeu voit son rythme sauvé par une bande-son de grande qualité (la chanson de l’écran titre est à ce sujet excellente et digne de l’introduction d’un film James Bond).
Votre serviteur qui rédige avec soin ces lignes n’a jamais joué à des titres tels que les Goat Simulator, cependant l’on aime à croire que Squirrel with a Gun pose les fondations d’une franchise sympathique qui s’étoffera au gré des suites et ne se limitera pas à cette première expérience. « Jusqu’où ne montera-t-il pas ? » disait Nicolas Fouquet de l’écureuil rouge ornant ses armoiries. On en dit de même pour notre héros au uzi.