Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux est le remake de Shin Megami Tensei: Strange Journey sorti sur DS au Japon en l’an de grâce 2009. À l’époque, le continent américain avait pu profiter de ce titre mais pauvres Européens que nous sommes, nous avons dû nous contenter de vivre sans. Et voilà que neuf ans après, comme si de rien n’était, Atlus nous propose de vivre cette aventure après le succès amplement mérité de Persona 5 (qui est, nous vous le rappelons, un spin-off de Shin Megami Tensei). C’est reparti pour un cours de démonologie avec option survie !
Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux – L’enfer est pavé de mauvaises intentions
Previously on Earth…
Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux est une passerelle. Quand le titre est sorti, il se voulait déjà la symbiose des premiers épisodes et de ceux en cours. Les fans de la série reconnaîtront du coup facilement certains aspects des anciens et des nouveaux épisodes. Le fait est que bon nombre de ces épisodes sont introuvables en France à moins d’utiliser des méthodes que la morale (ou la justice) réprouve. Bref, on retrouvera les poncifs chemins et couloir d’antan. Enfin, légèrement remaniés parce qu’en fait, pour cet épisode singulier, Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux a été conçu sur le moteur d’Etrian Odyssey et en reprend les codes dans les grandes lignes. Vous pouvez donc concevoir ce titre comme le jumeau lugubre de Persona Q.
Côté scénario, on nage dans le tourment. Guerre, violence, surconsommation et misère sont les grandes lignes qui démarrent notre présentation de l’univers de Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux. Un conseil type « ONU de l’ombre » se réunit pour aborder l’étrange tempête noire envahissant le Pôle Sud. Ce dernier, appelé SchwartzWelt, (parce qu’un nom allemand dans une fiction japonaise fait toujours sérieux) a mis à mal de nombreuses stations scientifiques et continue son chemin lentement mais sûrement vers la civilisation. C’est pourquoi ce conseil décide d’envoyer sur place un contingent de soldats et de scientifiques pour découvrir la nature de ce bouleversement. Saurez-vous assumer votre rôle ? Spoiler : vous êtes un soldat ! Hé oui, il faut bien quelqu’un pour visiter les nombreux couloirs que les développeurs ont conçus !
Une fois sur place, vous découvrirez que pour une fois, le ton change. Plutôt que de miser sur l’éternel combat entre le bien et le mal, les démons et les anges et de trouver la place de l’Homme en son centre, il s’agit ici au contraire de mettre en abîme les actions de l’Homme sur lui-même et son environnement. Et autant dire que ça colle bien ! Le monde qui nous est dépeint en introduction est bien le nôtre et il suffit de voir la cinématique et les multiples allusions aux journaux télévisés pour se sentir concerné (ou consterné). Le casting haut en couleur vous confrontera à ceci ainsi que les discussions avec les nombreux anges et démons dont les formes finalement nous sembleront plus humaines une fois la comparaison effectuée (enfin s’il n’étaient pas animés à 2 images par seconde mais on reviendra sur ceci).
Fight for freedom
Une fois lâché dans la nature, vous pourrez découvrir les donjons qui s’offrent à vous. Reprenant les thèmes évoqués dans l’introduction, les différents donjons possèdent un habillage propre à ce que l’Homme fait le mieux : le bazar (pour rester avec un vocabulaire chaste). Une fois encore, comme dans Etrian Odyssey, l’écran du haut vous présente les couloirs et salles en vue subjective alors que l’écran du bas s’habille de la carte qui se remplit à mesure que vous l’explorez. Le filtre qui couvre votre vision directe est apporté par votre Démonica, une sorte d’armure high-tech croisée avec un smartphone. Cette dernière, déjà apparue dans Shin Megami Tensei 4 (sur la personne du Black Samouraï), vous indique la présence de trésors (nécessaires à l’évolution de votre inventaire mais également des boutiques et de votre armure) et la proximité des monstres.
Une fois en combat, le système est très classique. Pour ne pas dire à l’ancienne, les écrans affichent les actions et les montrent en haut, votre personnage et vos démons en bas. Toutes les options se font au travers de menus sur l’écran du bas. Ainsi, vous pourfendez vos ennemis comme dans un Dragon Quest. Il vous est comme d’habitude offert de discuter avec eux afin de les ajouter à votre inventaire et les utiliser en combat ou d’en obtenir monnaie et objets. Seulement, l’alignement de vos monstres et le vôtre doivent être compatibles, si bien que certains monstres refuseront même littéralement de vous adresser la parole.
Entre modernité et (mauvaises) traditions
L’alignement influence aussi la mécanique de « press-turn » présente dans les précédents volets de la série. Plutôt que de vous « offrir » des actions supplémentaires en combat, si vous trouvez la faiblesse d’un monstre, vos démons et personnages, dont l’alignement est identique à celui de l’attaquant, infligeront un bonus de dégâts. La fusion a également été revue. Cette fois-ci, vous ne choisissez pas les compétences de vos monstres, elles sont pré-enregistrées. Vous pouvez néanmoins les influencer en y utilisant des cristaux de monstres (essences obtenues une fois que vous connaissez assez vos démons). Elles agissent comme des CT dans un Pokémon à l’ancienne et ne peuvent être utilisées qu’une fois, il vous faudra de nouveau en trouver une si vous la voulez à nouveau mais les chances de l’obtenir seront amoindries. Sans transcender le genre, ces options apportent un peu de fraîcheur.
Cependant, toutes ces bonnes notes n’indiquent pas que Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux est parfait, et même loin de là. Comme indiqué précédemment, l’animation des démons est des plus austères mais ça n’est pas le seul élément. La navigation dans les couloirs des donjons dévoile nombre de vieilles textures bien dégueulasses et dégoulinantes qui rappellent comme le temps peut se montrer dur pour les choses qui vieillissent. Ajoutez à ceci les sprites en donjons qui montrent une « élégante » 2D sur fond 3D pour donner une impression de dépassé constant en matière de présentation. Difficile de comparer ce jeu à son aîné, Shin Megami Tensei 4 qui, lui, avait fait l’effort de présenter une navigation en 3D et du plus bel effet sur la 3DS.
Enfin, difficile d’aborder ce titre sans évoquer à nouveau les donjons « pièges ». Plusieurs sections de donjon sont couvertes de pièges à l’instar de Persona Q comme ces sols électrifiés ou empoisonnés qui donnent des malus à votre équipe. C’est vrai qu’il est difficile de rendre intéressant les promenades dans les labyrinthes mais couplez ceci avec des chemins à sens unique et les passages obligés dans les malus, et vous trouverez une saveur de frustration dans votre bouche. Pour finir, le manque de souplesse dans les labyrinthes finit de vous poignarder l’envie de poursuivre tant la lourdeur des mouvements ne colle pas avec le principe d’un puzzle à coup de téléportation. Mais bon, si c’est le prix à payer pour profiter des six différentes fins (dont trois liées aux nouveaux donjon et personnage) que proposent le jeu, ça doit en valoir la peine.
Conclusion Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux
Vous l’avez compris, Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux est loin d’être exempt de défauts. Sa réalisation générale souffre d’une certaine vieillesse même si son histoire intrigue dès le début. Captivant par son jugement moralisateur non appuyé, Shin Megami Tensei: Strange Journey Redux est un titre solide qui permet également aux néophytes de plonger dans la série sans trop de peine à condition de faire l’impasse sur son austérité. Plus souple dans la difficulté, même si clairement sec côté réalisation, il reste un épisode agréable pour les nouveaux et les vieux routards. Attention toutefois, les pointus de la finesse graphique vont pleurer des larmes de pixels, un titre à ne pas mettre entre toutes les mains.