Une suite d’un jeu à succès est toujours un procédé risqué. Le second opus doit reprendre les éléments forts de son aîné sans tomber dans le piège classique de la pâle copie. Renouveler sans totalement innover, voilà un équilibre difficile à atteindre, car il faut répondre aux joueurs de la première heure comme aux néophytes de la série. Fort de sa réussite, le studio Team Ninja nous signe un deuxième chapitre pour son Nioh après plus de trois millions d’unités vendues. Et ce dernier doit soulever un sérieux défi. Là où le premier opus concurrençait l’empire des Souls sur leur terrain (mais avait l’effet de surprise), Nioh 2 nous apparaît dans un calendrier que l’on peut qualifier de particulier.
En effet, ce dernier passe après la tornade Sekiro: Shadows Die Twice et quelques mois avant le prometteur Ghost of Tsushima, deux titres d’action prenant comme toile de fond le Japon féodal. Il va sans dire que notre samouraï fait face à deux mastodontes et devra prouver sa bravoure plutôt deux fois qu’une pour ne pas tomber dans l’oubli.
(Test de Nioh 2 réalisé sur PlayStation 4 Pro à partir d’un code fourni par l’éditeur)
Un gameplay toujours aussi maîtrisé
Allons à l’essentiel. Attaquons directement le gameplay, l’atout majeur de la saga. Celui-ci ne change pas d’un iota, ou presque. Toutes les mécaniques du premier opus sont reprises, seules deux nouveautés sont à signaler. Mais avant de les détailler, attardons-nous sur les bases du jeu.
Tout comme son prédécesseur, Nioh 2 est un die and retry dynamique qui puise sa force dans ses combats. Ces derniers sont tactiques et demandent une connaissance certaine des paramètres de gameplay. On va tenter de vous les expliquer au mieux. Déjà, il vous faudra choisir votre arme sachant que le héros peut en porter deux à la fois (hors armes à distance). Pas d’armes inédites dans ce second opus, mais celui-ci reprend l’ensemble des armes du premier, incluant les DLC.
Nous avons donc le katana, la lance, les double katanas, la hache, les hachettes, la glaive, les tonfas, l’odachi, le kusarigama. Chaque arme dispose de ses propres caractéristiques et compétences à débloquer. À vous de trouver votre style de combat et de sélectionner l’arme correspondante. Plus vous utiliserez un type d’arme au combat, plus vous gagnerez des points à utiliser dans les arbres à compétences (bonus, nouvelles techniques…).
Mais attendez, on n’est qu’au début. Nioh dynamise ses affrontements par un système de posture. Trois postures vous permettent de vous adapter à ou aux adversaire(s) en face de vous. La posture basse se focalise sur la vitesse des mouvements délaissant la force, la posture haute favorise l’attaque au détriment de la défense, la posture moyenne est un entre-deux. Il faudra donc jongler entre ces postures pour venir à bout des vagues d’ennemis. On ne vous cache pas un temps d’apprentissage nécessaire pour la maîtrise de ces mécaniques. Mais une fois quelques heures au compteur, les mouvements deviennent fluides et l’on jongle entre les postures comme un vrai samouraï.
Attendez, il y en a encore. En plus des armes et des postures, il faut citer la magie et le ninjutsu qui confèrent des objets offensifs comme des shurikens et objets de soutien en tous genres. Enfin, n’oublions pas les armes à distance (arc, fusil et canon portable) et tout le reste de l’équipement du style armure et vous avez là un gameplay maîtrisé et plus que réussi. Team Ninja a bien compris qu’une grosse partie du succès de son bébé revenait au gameplay. Le studio s’est alors contenté de copier la recette une seconde fois, en y ajoutant deux aspects inédits.
Nioh 2 manque clairement de nouveautés pour s’imposer
Première nouveauté pour ce Nioh 2 : les contres explosifs. Chaque ennemi dispose d’attaques spéciales caractérisées par une aura rouge avant son lancement. Il faudra réagir vite et bien. C’est à ce moment précis qu’il faudra parer avec un contre explosif. Il s’agit tout simplement d’un contre à l’état de yokai (car oui, votre personnage est un demi-yokai, nous y reviendrons un peu plus tard). Si la parade est réussie, alors l’ennemi connaîtra une faille dans sa défense et de sérieux dégâts à son endurance. Si la parade n’a pas été faite à temps (trop tôt ou trop tard), alors vous subirez de gros dégâts vous-même.
Trois barres sont à surveiller pendant les combats. Tout d’abord, la barre de vie qui se passe d’explication. Ensuite, la barre d’endurance qui se consume à chaque action. Si cette dernière se vide, alors votre personnage se retrouve à la merci des assaillants. Idem pour le camp inverse. Vous l’aurez compris, un contre explosif peut vider la barre d’endurance d’un ennemi, le laissant sans défense. Il s’agit ici d’une mécanique d’un pur jeu d’action, impossible donc de ne pas penser à Ninja Gaiden, ancien jeu du studio (Ryu, tu nous manques). Dernière barre à garder à l’œil : la barre de magie. Celle-ci permet de réaliser des attaques yokai, la deuxième nouveauté du soft.
On entame maintenant la dernière partie du gameplay. On vous avait prévenu qu’il était plus que solide. Chaque ennemi yokai pourra laisser à sa mort un cœur renfermant une technique. Ces techniques sont appelées attaques yokai et permettent, contre points de magie, d’invoquer le démon le temps d’une attaque. Vous pouvez équiper votre personnage jusqu’à deux techniques en même temps. Plus vous avancerez dans le jeu, plus votre éventail de coups s’étoffera, et il y en a un paquet. Ainsi, il conviendra de jongler entre vos attaques traditionnelles et celles des yokai pour mener à bien vos croisades en territoire hostile.
Faisons le bilan. Sur tous les éléments liés au gameplay mentionnés, seulement deux sont inédits. Voilà qui est assez maigre. Surtout que toutes les animations liées au combo, au finish move ou autres sont identiques au premier opus. C’est bien simple, par moment, nous avons plus l’impression d’avoir affaire à un gros DLC (à un standalone) qu’à un nouveau jeu tant il manque de nouveauté et, par conséquent, d’identité. Et ce n’est pas du côté du scénario qu’on trouvera plus de matière.
Une nouvelle fois, une guerre de pouvoir éclate au pays du Soleil-Levant. Nous sommes au 16ème siècle (époque Sengoku) et les nombreux clans se déchirent pour le contrôle des territoires. Ils se tournent alors vers les pierres d’esprit, des pierres magiques d’origine inconnue apportant un pouvoir extraordinaire et un avantage certain face à l’ennemi. Seulement, ces objets sont traîtres et peuvent révéler le pire de l’Homme. Elles suscitent la convoitise et rendent la soif de pouvoir intarissable. Avec ces pierres, la guerre est infinie. C’est là que votre personnage entre en scène.
Le piège de la redondance activé
Pas de personnage prédéfini pour ce Nioh 2, un module de création de personnage, plutôt poussé, ouvrira le jeu. Quel plaisir de façonner un samouraï comme bon nous semble, mais ce plaisir est de courte durée. Votre personnage est muet et ne prend aucune décision. Il suit bêtement les autres, d’une triste passivité, ce qui atténue sévèrement l’immersion. Aucun travail d’écriture n’a été apporté à notre protagoniste alors que Williams Adams (le héros du premier) brillait à l’écran. Et même si le scénario possède de vrais moments d’héroïsme, ils manquent de profondeur pour marquer. On a ce sentiment constant de tourner en rond : un seigneur de guerre devient fou de par les pierres d’esprit, il conviendra donc de le supprimer.
Tout comme pour l’équipement, les personnages secondaires sont pompés du premier, et il y en très peu d’inédits. Pire encore, certains niveaux secondaires sont tout simplement des niveaux de Nioh 1. On sait qu’on doit être économe par les temps qui courent, mais il y a des limites quand même ! Idem du côté de la carte principale et du choix des missions. On a toujours les missions principales, secondaires et crépusculaires (des missions en mode difficile pour faire simple). Encore une fois, pas de nouveauté ou de prise de risque sur ce terrain. Ce déjà-vu constant ne permet pas à Nioh 2 de prendre son envol et d’échapper à l’ombre de son prédécesseur.
Outre ce recyclage éhonté, Nioh 2 n’échappe pas au piège classique des suites : la redondance. C’était à prévoir, mais Nioh 2 se veut bien trop redondant, surtout que le jeu est sacrément long. Comptez environ une cinquantaine d’heures pour tout boucler. Finissons avec trois notes positives. D’abord, les boss sont toujours d’excellente facture et engendrent des combats frénétiques. Ensuite, la bande-son offre des morceaux mémorables servant au mieux le côté épique du jeu. Enfin, le jeu reste très coriace (die and retry oblige), il faudra donc s’armer de patience pour en venir à bout.
Nioh 2 est loin d’être une suite digne. Le jeu se contente de reprendre les éléments à succès du premier opus sans prendre de risque. Les maigres apports liés au gameplay ne suffisent pas à convaincre et à annihiler ce sentiment de déjà-vu qui nous accompagne tout au long de l’aventure. Nioh 2 manque clairement d’identité et appuie jusqu’à épuisement sur ses mécaniques. Une redondance en ressort, signe que la saga arrive définitivement à son terme.
À qui s’adresse le jeu ? À cette question, nous répondrons aux vrais passionnés de la série (aux affamés du gameplay) et aux nouveaux joueurs. Ceux qui ont déjà joué au premier sans réellement accrocher, vous pouvez passer votre chemin, le second chapitre est bien trop similaire.