Alors que le printemps revient et que la nature reprend peu à peu ses droits sur les rares espaces verts qui nous entourent, quoi de mieux qu’un jeu vidéo sur le thème de sa préservation pour inaugurer cette belle saison ?
C’est précisément le pari de Koira, premier jeu du studio bruxellois Tolima. À travers une aventure musicale en pleine forêt, le jeu nous invite à tisser un lien profond avec la faune locale et à protéger un chiot vulnérable. Avec Don’t Nod à l’édition, Koira promet une expérience immersive et poétique, où l’émotion prime sur la confrontation. Mais le jeu parviendra-il à marquer les esprits tout en restant ludique ?
(Test de Koira sur PC réalisé via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Un conte aux airs nordiques
Dans la peau d’une créature couleur noir charbon, vous vous réveillez dans une forêt. Rapidement, des cris déchirants retentissent : ceux d’un chiot tombé dans un piège et attaché au bout d’une corde. En lui portant secours, vous découvrez une forêt infestée de chasseurs, prêts à tout pour nuire à la faune locale.
Dès ces premières minutes, Koira pose son ambiance et ses enjeux : protéger le chien coûte que coûte et affronter ces chasseurs. Le nom vient du finnois et signifie tout simplement « chien ». On peut également y voir une référence aux « lapinkoira », les chiens finnois de Laponie. Pourquoi cette inspiration nordique ? La réponse se trouve dans la direction artistique du jeu. Entièrement dessiné à la main, Koira semble rendre hommage au travail de Tove Jansson, célèbre artiste finlandaise à l’origine des Moomins.
Conçu comme un conte, le jeu arbore à travers différents tableaux des allures de livre pour enfants : des créatures forestières aux mimiques adorables, des chasseurs dont seules les silhouettes noires se détachent sur la blancheur immaculée de la neige… Ce style graphique, doux et mélancolique, rappelle forcément Mumrik : La Mélodie de la Vallée des Moomins, sorti l’an dernier. Même si l’ambiance diffère, la technique reste proche.
La musique fait loi
Cette esthétique s’accompagne d’une bande originale aux mélodies discrètes, puisque c’est la musique au sens large qui joue un rôle bien plus important qu’un simple accompagnement : elle devient une mécanique de gameplay. Chaque créature s’exprime à travers un instrument (l’harmonica pour le chiot, la trompette pour les sangliers, par exemple).
Il vous faudra apprendre chaque tonalité pour communiquer avec elles et gagner leur confiance. Parfois, de petites énigmes devront être résolues pour activer un sanctuaire et obtenir les bonnes notes. Rien de bien difficile, mais ces pauses rythmées permettent de respirer dans une forêt où le danger gronde en permanence.
Montrer patte blanche
Les animaux ne font pas confiance aux humains, et ils ne vous l’accorderont pas aisément non plus. Il faudra continuellement faire vos preuves pour pouvoir les aider, une dynamique particulièrement marquante dans votre relation avec le chiot. Petit et craintif, il réagit aux moindres événements avec une justesse troublante.
Si vous aimez les animaux, impossible de rester de marbre face à ce petit compagnon qui se roule dans la neige et jappe pour que vous lui lanciez un bâton. Sa fragilité renforce l’attachement que l’on éprouve pour lui, et l’envie de le protéger à tout prix.
Combattre ou fuir
Dans cette forêt hostile, tous les moyens sont bons pour atteindre vos objectifs. Vous devrez souvent user de ruse pour traverser un campement de chasseurs et libérer des animaux captifs. Mais parfois, votre petit compagnon sera pris au piège, vous contraignant à jongler entre stratégie et prise de risques.
Et lorsque l’injustice devient insoutenable, la confrontation directe semble inévitable. C’est là que le jeu pose une question fondamentale : faut-il affronter ceux qui menacent la forêt sur un pied d’égalité, ou la violence ne résout-elle jamais rien ? Sanctuaire après sanctuaire, à mesure que l’on progresse, la réponse reste en suspens.
Au-delà des énigmes, Koira regorge de petits jeux intégrés à l’aventure : parties de cache-cache, construction de bonhommes de neige… Le gameplay alterne sans cesse, évitant toute lassitude, malgré un décor restreint à une seule forêt. Ces moments sont aussi des respirations bienvenues.
Koira oscille en permanence entre la poésie de ses paysages et la noirceur incarnée par les chasseurs, un équilibre parfaitement dosé qui nous tient en haleine jusqu’à la fin.
Avec ce premier jeu, l’équipe du Studio Tolima signe comme elle le souhaitait une véritable lettre d’amour au médium et une expérience émotionnelle universelle. Koira possède tout ce qui fait le charme d’un petit jeu indé réussi.
Un gameplay simple mais efficace, une direction artistique splendide, un thème plus que jamais d’actualité et un binôme attachant : sans prétention, Koira assume pleinement son aventure et prouve qu’il n’a pas besoin de plus pour toucher en plein cœur.