Annoncé en été 2015 par Lab Zero Games, à qui l’on doit le très joli versus fighting Skull Girls, Indivisible se lance dans la bataille du crowdfunding en octobre de la même année. Exactement deux mois plus tard, il atteint son but et réunit 1 500 000 $, la promesse étant que si cette somme était atteinte, l’éditeur 505 Games mettrait la main à la poche pour boucler le budget et faire en sorte que le jeu se fasse.
Dès le début du projet, le jeu était ainsi très attendu. Et pour être tout à fait honnête, chez nous, c’est d’abord sa direction artistique qui nous a immédiatement séduits, et son héroïne, qui emprunte autant à Nadia (de Nadia et le Secret de l’Eau Bleue) qu’à Korra (de La Légende de Korra, le spin-off d’Avatar Le Dernier Maître de l’Air). Côté gameplay, la promesse est celle d’un action-RPG. Cependant, les premières images du jeu nous donnaient plutôt à voir un jeu de plateformes… Alors qu’en est-il vraiment ?
(Test d’Indivisible réalisé sur PC avec une version du jeu fournie par l’éditeur).
Intro(p)
L’opening du jeu est signé des studio Trigger, le studio de Little Witch Academia et de Kill La Kill, une référence en la matière. Et en effet, l’intro est très réussie : c’est beau, c’est dynamique, c’est probablement la meilleure façon de plonger dans l’univers d’un jeu. À condition que derrière, ça suive. Une deuxième intro, in game cette fois, vient mettre en place le scénario avec les outils que l’on retrouvera tout au long de l’aventure. Soit des cutscenes faites d’images fixes pseudo-animées. Et après la maestria Trigger, la comparaison est cruelle et l’excitation du joueur retombe un peu. Heureusement, l’ascenseur émotionnel repartira bientôt vers le haut grâce aux qualités graphiques du titre.
Cette seconde intro nous met en présence d’un combat aux accents galactiques, nous annonçant que l’échelle des événements que nous allons vivre est bien plus importante qu’il n’y paraît. Puis, rapidement, nous voilà transporté dans le village d’Ajna, l’héroïne du jeu, qui sera bientôt attaqué par une armée sans pitié, et le père d’Ajna sera tué. Commence alors pour la jeune fille un périple guidé par son désir de vengeance.
Dreams can come true
Avant que le jeu ne sorte, ce dernier nous était présenté comme un RPG qui mettait en scène une jeune fille capable d’absorber les pouvoirs des créatures qu’elle rencontrerait sur son chemin. Cependant, une fois manette en main, on ne retrouve pas exactement ce qu’on imaginait… Toute une série de personnages vont ainsi se joindre à la quête d’Ajna en étant aspirés dans le cerveau de cette dernière. C’est en tous cas l’astuce scénaristique employée pour nous faire contrôler, et principalement pendant les phases de plateformes, un seul personnage qui en représente six ou huit.
Truchement un peu inutile, tant nous sommes habitués avec les RPG (et plus particulièrement les J-RPG) à ne contrôler qu’un avatar qui représente tout notre “party“. Car en vérité à chaque combat, et chaque fois que le besoin s’en fait sentir, les compagnons phagocytés ressortent comme ils sont entrés. Ajna n’absorbe donc pas les pouvoirs de chacun, mais les “chacun” eux-mêmes ! Cependant, on oublie vite cette maladresse tant on est tout de suite subjugué par la beauté graphique du jeu. Des personnages aux décors, en passant par les animations, on ne sait plus où donner de la tête.
On a rêvé, plus jeunes, d’un jeu qui serait aussi beau que ses écrans de chargements ou que ses cinématiques. Dragon’s Lair devait réaliser ce rêve, mais oublia au passage d’être un vrai jeu. Indivisible se paie le luxe d’être plus beau in-game que pendant ses cutscenes ! C’est un véritable dessin animé auquel on peut jouer, c’est le rêve de tous les enfants qui jouaient en 8 ou 16 bits…
Le grand saut
Côté gameplay, Indivisible est pour moitié un jeu de plateforme, l’autre moitié étant constituée des combats, au système bien particulier. Pour la partie plateforme, on trouve l’ensemble des ingrédients du genre, avec des plateformes mobiles, d’autres qui s’effondrent, des projectiles à éviter sur le chemin… S’il faudra parfois faire usage du dash, la proposition du jeu tient surtout à deux ingrédients.
D’abord la hache, qu’on peut planter dans une surface verticale. Un tel mouvement nous permet un second saut en hauteur, et donc d’atteindre des endroits inaccessibles avec un simple saut. Cependant, la hache ne peut être utilisée qu’une seule fois par saut, et il faudra avoir reposé les pieds sur terre avant de pouvoir utiliser à nouveau cette capacité. Impossible donc d’espérer escalader des surfaces verticales en usant uniquement de la hache.
Une autre façon d’utiliser la hache, c’est d’y rester suspendu après l’avoir plantée. Ce mouvement sera notamment utile quand des boules de feu ou autre projectile dangereux tenteront de nous empêcher de mener à bien les phases de grimpettes. On restera en effet suspendu à la hache le temps de laisser passer la boule de feu et de reprendre notre ascension.
Le deuxième ingrédient qui met du sel dans les phases de plateformes, c’est l’arc. Un arc un peu particulier, puisque la visée ralentit aussi le temps. On pourra de cette façon utiliser l’arc et prendre le temps de viser même en plein milieu d’un saut. Ce qui peut s’avérer utile si on a besoin, justement en plein bond, d’activer à distance un bouton qui fera apparaître une plateforme où se réceptionner… Les possibilités combinées de la hache et de l’arc rendent les phases de plateforme assez intéressantes, leur conférant même un côté puzzle game.
Ces moments platformer sont de vrais aspects importants d’Indivisible, et pas juste des phases de transition. Cependant, au cours de ses pérégrinations, notre groupe de héros fera nombre de mauvaises rencontres, autant d’occasions de mettre en œuvre le système de combat. Dans Indivisible, les combats occupent une grande partie du jeu. S’ils ressemblent à priori à des combats au tour par tour classiques, il n’en n’est rien.
Ace of turn based
Un combat dans Indivisible se joue avec 4 personnages choisis parmi ceux qui ont décidé de suivre Ajna (soit ceux “aspirés” dans son cerveau…). Chacun d’entre eux aura différentes techniques et capacités spéciales : armes de contact, armes de jet, guérison, sorts… Chacun des personnages correspondra à l’un des boutons de la manette (Croix, Carré, Rond ou Triangle) et se placera sur la zone de combat selon le bouton qui lui est alloué (le personnage qui répond au bouton Triangle sera en haut, celui qui répond au Carré à gauche…). Notez que tout ceci est paramétrable selon votre bon vouloir, sur clavier comme sur pad. Chaque personnage possède un niveau d’initiative qui lui permet d’agir plus ou moins rapidement, symbolisé par une jauge qui se remplit plus ou moins vite. Une fois la jauge pleine, on peut faire attaquer le personnage en appuyant sur le bouton qui lui correspond, auquel on peut ajouter – ou non – une direction pour lancer une capacité spéciale (charger l’attaque suivante, soigner les autres personnages plutôt qu’attaquer…).
Les ennemis attaquent de la même manière. Une fois leur jauge d’initiative (qui n’est pas affichée) remplie, ils lancent une attaque. Il n’est plus alors possible pour les personnages contrôlés par le joueur d’attaquer, et ils passent en situation de défense. Le bouton qui leur est alloué sert alors à parer, un bonus de défense est accordé si ce bouton est actionné au bon moment (juste avant l’impact). À tout cela, il faut ajouter la jauge R1 qui se remplit au fur et à mesure des attaques réussies, et se vide au gré des dégâts reçus. Une fois pleine, la jauge R1 permet à un personnage de lancer une attaque spéciale.
Des mécaniques de tour par tour, donc, mais qu’il faut effectuer en temps réel. Il faudra ainsi jongler avec les initiatives de chacun des personnages, les attaques de l’ennemi, tout en gardant un œil sur la jauge R1. Assez rapidement dans le jeu, les personnages vont évoluer, se voyant attribuer un deuxième puis un troisième point d’attaque. Les combats deviennent alors très intenses, réclamant force de concentration pour gérer à la fois les initiatives, les phases de défense, de contre-attaque, mais aussi l’ordre dans lequel faire attaquer les personnages pour infliger le maximum de dégâts (envoyer d’abord un personnage capable de briser la garde avant de lancer celui qui pourra attaquer, par exemple…).
On ne s’ennuiera pas pendant les combats, obligé de pianoter à toute allure sur la manette, tandis que le regard tentera de na pas louper d’informations. Néanmoins, et malgré toutes les bonnes idées de ce système, on ne pourra s’empêcher de les trouver un peu répétitifs, même si les stratégies pour vaincre les différents boss ne seront pas exactement les mêmes.
Indivisible est beau avant d’être bon. Il est même très très beau, à défaut d’être très très bon. Mais très bon quand même, hein ! Le jeu souffre de son mode de combat, original, dynamique et prenant, mais hélas un peu répétitif. Le système de contrôle couplé au temps réel empêchent en effet de lui donner trop de profondeur. Les phases de plateforme sont, elles, un vrai régal. On aurait ainsi aimé plus de plateforme, avec peut-être plus de monstres à éliminer de manière classique, comme dans un Shantae, et conserver le système de “tour par tour en temps réel” (??!) pour des boss et mini boss, ce qui aurait permis de retarder la sensation de lassitude.
Néanmoins, que nous ne nous fassions pas mal comprendre : Indivisible vaut largement le détour, et ses personnages, ses décors et ses animations pourraient bien devenir les références du genre. Sans oublier la musique de Hiroki Kikuta, compositeur de Secret of Mana, qui nous réserve quelques envolées elles aussi mémorables !