La licence de Firaxis nous revient avec l’épisode 6 de son célèbre jeu de stratégie, à savoir Civilization VI ! Avec plus de 35 millions d’exemplaires vendues dans le monde, dont 8 millions rien que pour Civilization V, il ne fait aucun doute que les joueurs attendaient ce nouvel opus avec impatience. Après une incartade dans l’espace avec Sid Meier’s Civilization: Beyond Earth et Sid Meier’s Starships, Firaxis revient à son 4X star. Face à un épisode 5 déjà très fourni en contenu et qui était largement monté en puissance et en complexité via ses deux DLC Gods & Kings (2012) puis Brave New World (2013), Civilization VI semble à première vue nous replonger avec délectation dans le monde impitoyable de la stratégie tour par tour.
Civilization VI : vers l’infini et au-delà
Prise en mains
Il est temps de créer une partie et de choisir quelle civilisation et quel dirigeant incarner. On trouve dans cet opus 20 dirigeants dès la sortie (un peu moins que son prédécesseur qui en présentait 25), ce qui nous promet déjà un grand nombre de parties pour explorer les possibilités en termes de développement de nos civilisations. Et pour la première fois (il me semble en tout cas), le jeu présente même 2 dirigeants pour une même civilisation : la Grèce antique est représentée à la fois par la Reine Gorgò de Sparte et par Périclès pour Athènes. Pour ce qui est de l’interface utilisateur, certains éléments ont été remaniés mais pas de révolution, le principal point aura été de réserver la partie droite de l’écran à la diplomatie et d’étoffer le menu en haut à gauche avec tous les aspects scientifiques et culturels. Dès le début de votre première partie vous vous apercevrez que le jeu est très fourni en contenu, certains aspects comme les religions et le tourisme culturel ayant été directement intégrés là où il avait fallu attendre les extensions dans Civilization V. On notera aussi la disparition de la victoire diplomatique au profit de la victoire religieuse, qui ne sera d’ailleurs pas plus compliquée à obtenir selon la civilisation que vous aurez choisie au départ en fonction de ses bonus dans ce domaine.
Et qu’est-ce qu’il a sous le capot ?
On peut d’ores et déjà dire que le jeu souffre des mêmes défauts que ses prédécesseurs. Il va falloir s’armer de patience entre chaque tour si vous avez une machine moyennement puissante, surtout lorsque vous avez décidé de jouer sur une grande carte avec 16 dirigeants… Prenez votre temps en allant chercher votre café ! Mais malgré toutes les améliorations graphiques apportées dans cette version, les ressources nécessaires pour le faire tourner dignement restent mesurées, et comme il s’agit d’un jeu de stratégie, les contraintes de matériel également. Au niveau purement graphique, il y a de plus en plus de contenu animé sur la carte, le moindre bâtiment, coin de forêt ou mouton recevant sa petite animation, créant ainsi un environnement très vivant. Le plus frappant à mon avis étant l’animation du brouillard de guerre de la carte elle-même, évoquant les cartes anciennes et donnant l’impression de faire partie des grands explorateurs lorsqu’elle dévoile au fur et à mesure de nouvelles terres à conquérir.
Il en va de même des cinématiques de fin de construction des merveilles, qui vous raviront en vous consolant du temps qu’a nécessité leur construction.
Pour ce qui est de la direction artistique de manière générale, beaucoup voient d’un mauvais oeil la “cartoonisation” amorcée dans le jeu mobile Civilization Revolution. Alors on aime ou on n’aime pas, mais il faut reconnaître que le character-design est très abouti, que ce soit au niveau des unités ou bien des dirigeants, qui sont très expressifs.
Tout n’est pas exempt de défauts dans cette nouvelle version et on a parfois l’impression que le jeu n’est pas complètement fini, comme lorsque l’on voit s’afficher pour la première fois le message d’amélioration d’une unité, que l’on tente vainement de passer la souris sur la notification nous spécifiant quelle quête nous est confiée par une cité-état ou encore lorsque le clic sur une icône ne veut pas nous ouvrir le menu que l’on souhaite.
Coup de pied dans la fourmilière
La vraie bonne idée de ce Civilization VI réside dans la gestion des villes. On nous propose d’étendre leur capacité, non plus uniquement grâce à des bâtiments mais via des quartiers qui s’implantent sur les cases adjacentes à la case principale, nommée centre-ville. Ces quartiers sont spécialisés et généreront des bonus (production, culture, foi ou science) en fonction des bâtiments que vous y placerez. Ces quartiers sont également interdépendants, un quartier résidentiel reçoit un bonus s’il est placé proche d’un quartier culturel par exemple. Les merveilles sont également intégrées à ce système de quartiers, elles occuperont une case également, feront profiter de bonus aux quartiers avoisinants. Mais là où quasiment toutes les merveilles étaient constructibles dans n’importe quelle ville, celles de Civilization VI sont dépendantes de la topographie de la ville, ce qui a pour effet d’empêcher l’accumulation (eh oui, finies les collections dans la capitale, hé hé). Ainsi, le joueur se retrouve à devoir faire beaucoup plus de choix concernant l’évolution de sa ville, en ne se limitant pas à créer des bâtiments le plus rapidement possible et à envoyer des ouvriers créer des aménagements en automatique, comme beaucoup d’entre nous le faisaient dans Civilization 5. Ces ouvriers sont d’ailleurs remplacés par des bâtisseurs, non automatisables et n’ayant qu’un nombre d’actions limité avant de disparaître, à l’image des missionnaires pour la foi.
Le système de recherche et le système de dogmes ont aussi droit à leurs retouches. Et en premier lieu il s’agit de l’Eureka pour la recherche et de l’Inspiration pour les dogmes. Cet événement est déclenché si vous remplissez un objectif particulier pour chaque recherche ou dogme non-encore obtenu, et là c’est le jackpot : un rabais de 50% du nombre de tours nécessaires. De quoi se donner envie de lire les petites lignes et d’aller fouiller vos arbres d’évolution.
D’ailleurs, comment ça vos arbres d’évolution?
C’est là le deuxième gros changement dans la gestion de notre civilisation. Les doctrines et les idéologies ont fusionné dans le système de dogmes mentionné précédemment, le tout remis sous la forme d’un arbre dont les branches sont débloquées par la culture que vous accumulez. C’est à la fois une bonne idée car le système un peu brouillon quoi qu’intéressant apparu dans Brave New World se voit amélioré par l’ajout d’un choix de gouvernement, mais on peut regretter qu’ils n’en aient pas profité pour fusionner également la recherche en partant du principe que les sciences dites dures et les sciences sociales rayonnent de concert.
En résumé, il va falloir s’impliquer beaucoup plus pour transformer notre première cité en une civilisation florissante !
Et la stratégie dans tout ça
“Les historiens se trompent, cherchent des causes compliquées aux guerres alors que depuis nos balbutiements, il n’y a que des batailles d’égo” Fuzzati
Un des grands reproches faits à Civilization V était la difficulté à mettre en place des stratégies diplomatiques efficaces face aux autres dirigeants tant leurs objectifs étaient difficiles à discerner. Maintenant, ils semblent enfin se conformer à une certaine logique (parfois même un peu trop) et acceptent de redevenir amicaux même après une dénonciation ou un conflit, si tant est que l’on prenne le temps de refaire des échanges avec eux. Et comme dans la citation plus haut, on reste tout de même sur l’impression commune à beaucoup de jeux de la licence que les conflits se déclenchent uniquement lorsque que l’on s’oppose au leitmotiv de l’un ou l’autre des dirigeants adverses ou vous accusant de bellicisme alors que vous les empêchez simplement de répandre leur religion dans vos contrées. Une fois en conflit, vous découvrirez certaines nouveautés du système de combat. Par exemple, les villes ne sont plus capables de se défendre seules tant que vous n’avez pas développé de remparts antiques, donc pensez bien à laisser une unité de combat à distance dans chacune de vos cités.
La gestion des villes par quartier a aussi un impact sur la stratégie de combat, si le fait de réduire en cendres un quartier ennemi affaiblit globalement votre adversaire, il en va de même pour vos quartiers. Ce qui vous obligera à ne plus attendre bien à l’abri de vos murs que les unités adverses se cassent les dents sur vos défenses pendant que vous les pilonnez patiemment.
Les unités militaires reçoivent elle aussi leur lot de nouveautés, et en premier lieu une innovation qui va ravir nombre de joueurs. Si Civilization IV rendait possible l’empilage d’unités sur une même case, Civilization V rendait totalement impossible la constitution de groupe d’unités. On assistait alors à de vrais embouteillages à l’abord des villes en état de siège, obligeant à faire attention d’amener les unités de combat rapproché au contact de la ville en premier lieu puis à disposer ses catapultes et archers dans le deuxième rideau.
Les développeurs proposent ici un compromis, vous permettant, au fur et à mesure de votre progression dans les ères du jeu, de créer des régiments puis des armées en fusionnant deux puis trois unités ensemble. Ces groupements d’unités permettent de rendre des unités relativement faibles capables de soutenir un combat face à une unité simple plus moderne qu’elles.
On peut regretter néanmoins que le système d’évolution des unités proposé dans Civilization Beyond Earth n’ait pas été intégré à ce jeu. Il donnait la possibilité au joueur de choisir à quoi ressemblerait une unité à l’adoption d’une technologie la faisant évoluer ou en fonction de la voie choisie. Ici, on retrouvera le système ayant fait ses preuves de remplacement d’une unité par une autre plus évoluée moyennant un coût en or.
Conclusion Civilization VI
Tous ces éléments font de cet opus un successeur digne pour Civilization V et une bonne nouvelle pour cette licence qui fête ses 25 ans. Comme tout 4X qui se respecte, il s’agit d’un jeu qui aura sans nul doute une commercialisation longue et prospère, proposant des DLCs corrigeant les défauts actuels et proposant de nouvelles expériences de jeu. Au rang des choses qui peuvent vraiment paraître pénibles, on souhaitera rapidement que les développeurs trouvent une solution pour que les victoires culturelles ou religieuses ne soient plus aussi faciles, car à l’heure où j’écris ces lignes je n’ai toujours pas eu la joie de construire un hélicoptère de combat ou de déclencher une guerre nucléaire, obtenant toujours une des deux victoires précédentes à l’orée du 20ème siècle même dans des niveaux de difficulté avancés.
Merci à blt909 pour son aide apportée.