Découvert en 2022, A Little to the Left avait su attirer notre œil grâce à son esthétique minimaliste permettant de mettre en avant différents puzzles a priori intéressants, mais aussi grâce à la mise en avant d’un chat bien chapardeur ajoutant une touche de folie et de mignonnerie à l’ensemble. Mais il n’a su attirer que notre œil à l’époque, et il faut bien avouer que, sans doute à cause de son statut de « petit jeu », il nous était complètement sorti de la mémoire, éclipsé par d’autres productions plus tape-à-l’œil.
Mais voilà qu’il se rappelle à nous aujourd’hui, avec sa sortie sur nos bonnes vieilles consoles PlayStation depuis le 15 février dernier (le titre étant déjà accessible sur Nintendo Switch depuis le 8 novembre 2022) pour la bagatelle de 14,99 euros. Pas d’excuse pour cette fois, donc. Le pas est franchi et nous nous lançons dans les puzzles d’A Little to the Left, en espérant qu’ils soient aussi malins que ce coquin de minet.
(Test de A Little to the Left réalisé sur PlayStation 5 à partir d’une version commerciale du jeu)
Alignement parfait
Il faut que tout soit bien rangé. Quand on achète de nouveaux jeux, des livres ou des Blu-ray, il faut que sur nos étagères, chaque titre soit dans le même sens que les autres, bien aligné, et, évidemment, parfaitement classé. Si vous vous reconnaissez dans cette description, alors A Little to the Left est potentiellement fait pour vous. Son concept est simple : il faut ranger de façon cohérente les objets disposés à l’écran.
Il n’y a rien de plus à comprendre, ce qui n’empêche pas le titre de nous proposer des niveaux nous obligeant à nous creuser les méninges. Car si on part d’un concept extrêmement simple, et que les écrans de jeu sont dépouillés de toute forme de distraction visuelle, la résolution des différentes énigmes n’est pas toujours aussi évidente qu’il n’y paraît.
Alors évidemment, surtout au début, il n’y a pas vraiment de quoi fouetter un chat (enfin, sauf s’il commence à s’immiscer dans nos affaires avec sa grosse patoune). Classer des livres du plus grand au plus petit, aligner les pots correctement, regrouper les objets par couleur, tout cela n’implique que peu de réflexion, mais très vite, d’autres niveaux font appel à bien plus d’investissement de notre part pour atteindre le rangement optimal.
Ainsi, on se prend assez vite au jeu, surtout toqués comme nous sommes, à essayer de comprendre la logique attendue. Parfois même, la résolution n’est pas unique, ce qui permet de rendre certains puzzles encore plus intéressants. Nous parlions du classement de livres précédemment, du plus grand au plus petit, mais si on prête attention à leurs couvertures, on peut remarquer que, selon un autre alignement, une sérigraphie apparaît et permet de conclure autrement le niveau.
Alors, on bouge des trucs à chaque stage, on range des machins dans cette maison ô combien bordélique et on découvre des niveaux de plus en plus complexes par la ou les résolutions à trouver ou par la quantité d’actions à effectuer pour les solutionner. Enfin, rien de bien insurmontable, et pas non plus de quoi se retrouver complètement bloqué, d’autant qu’A Little to the Left propose la possibilité de tout simplement passer le puzzle récalcitrant, sans contrepartie, et d’atteindre le suivant.
Le système d’indices inclus dans le jeu est cependant particulièrement décevant. Non pas qu’il soit regrettable qu’il y ait la possibilité d’obtenir une astuce pour trouver une solution, mais dans A Little to the Left, le concept d’indice consiste surtout à nous donner directement la solution à l’énigme, gâchant du même coup tout son intérêt. Une option à utiliser avec une grande parcimonie, donc.
À ranger dans le placard ?
Il nous est impossible de ne pas évoquer Unpacking qui utilisait ce même concept dans le cadre des déménagements successifs d’une femme tout au long de sa vie. Et, clairement, A Little to the Left ne soutient absolument pas la comparaison. D’un point de vue technique déjà, mais aussi par l’ambition qu’il s’en dégage, ne serait-ce que par le nombre de situations disponibles.
Globalement, A Little to the Left fait très « jeu mobile », et pour cause, le titre est aussi disponible (gratuitement) sur iOS et Android. Ainsi, le titre du studio Max Inferno n’est qu’un simple portage de la mouture mobile, sans son aspect tactile, alors en le facturant près de quinze euros, il n’est pas dit que ce soit l’alignement tarifaire le plus optimal.
D’autant que le jeu se « termine » en une poignée d’heures. Il y a bien les défis quotidiens qui pourraient pousser à lancer une petite partie chaque jour, mais encore faudrait-il que les défis proposés soient suffisamment convaincants, ce qui n’est, en l’état, pas vraiment le cas. Alors attention, on ne remet pas là en question la qualité du puzzle, mais plutôt le fait que sa résolution sera bien souvent plus rapide que le fait d’allumer sa console, lancer le jeu et lancer ledit défi.
Pour autant, on ne passe pas un mauvais moment en jouant à A Little to the Left. Les niveaux sont parfois même très bien pensés et il peut être un titre sympathique à parcourir avec sa moitié ou ses enfants. Tout respire le zen, on s’adonne à notre maniaquerie sans contraintes, même pas celles du jeu qui ne sanctionne à aucun moment nos éventuelles erreurs.
Il ne faut toutefois rien y chercher de plus. Nous évoquions Unpacking précédemment qui repose sur les mêmes mécaniques, mais celui-ci proposait en même temps une réflexion autour des déménagements, nous questionnait sur la personnalité de la femme qu’on accompagnait dans sa vie et ajoutait même quelques petits défis supplémentaires par-ci, par-là.
Il n’y a rien de tout cela dans A Little to the Left. Au-delà du minou que l’on croise de temps en temps, il n’y a aucun liant entre les puzzles, aucune cohérence, et on finit par les enchaîner de manière presque automatique, sans déplaisir, certes, mais sans en tirer grand-chose non plus. Et en perdant, sur cette mouture PlayStation, à la fois le côté tactile et le mode portable, on se demande s’il y a un véritable intérêt à cette version.
Intrinsèquement, A Little to the Left est un jeu de puzzle tout à fait honorable nous proposant d’ordonner de manière la plus logique moult objets. Les niveaux s’enchaînent bien et la difficulté croissante des énigmes offre suffisamment de challenge intellectuel et organisationnel pour procurer du plaisir. Et une petite session de zénitude entre deux jeux très sérieux, ou après une journée éprouvante, ne fait jamais de mal.
Toutefois, le titre souffre selon nous de deux problèmes majeurs. Au-delà du manque de cohérence entre les stages et des indices disponibles gâchant tout l’intérêt des puzzles, c’est bien son statut de jeu mobile porté sur consoles qui nous fait tiquer. Pas d’écran tactile et pas de mode portable (à moins de posséder une PS Portal, et encore), et voilà deux attraits majeurs qui s’envolent sur cette mouture pour consoles.
Mais c’est surtout le prix demandé pour accéder au jeu qui nous paraît disproportionné. Alors certes, pour une quinzaine d’euros, nous accédons à une multitude de niveaux plus ou moins intéressants, mais quand de l’autre côté, sur mobile, le jeu est gratuit, on s’interroge sur la pertinence de cette version console. Sans remettre en question ses qualités, il nous est difficile de conseiller A Little to the Left sur PlayStation, et encore moins au prix fort.