Resident Evil a déchaîné les passions et son succès fut tel que son huitième opus vient de voir le jour, 25 ans après la sortie du premier épisode. Cela étant, d’autres jeux porteurs de l’étiquette survival-horror ont attiré l’attention des joueuses et des joueurs, et nous vous en parlons dans ce troisième dossier consacré au genre.
En 2014, chapeauté par Shinji Mikami, The Evil Within voit le jour. Un survival-horror à l’ambiance sombre, gore et résolument dérangeante, qui ne laisse personne insensible. Nous y suivons les pérégrinations de l’inspecteur Sebastian Castellanos dans une enquête compliquée s’articulant autour de quinze chapitres ; nous devons sauver notre peau, et c’est chose ardue, car seuls un revolver et une lampe torche nous permettent respectivement de lutter contre des monstruosités innommables et de nous repérer dans ce qui apparaît comme étant des archétypes du genre, à savoir des catacombes, un cimetière, un manoir…
On peut déplorer certains aspects de The Evil Within, comme la réalisation technique quelque peu poussive (des graphismes qui laissent à désirer pour l’époque, des jeux de lumière pas toujours pertinents, des décors qui manquent parfois de profondeur, quelques bugs…), mais on ne peut nier qu’il joue à merveille son rôle de vrai survival-horror :
- La trame scénaristique est suffisamment bien ficelée pour nous maintenir en alerte.
- Les énigmes, même si elles sont peu présentes, sortent des sentiers battus.
- L’ambiance morbide et la dimension psychologique sont loin d’être ténues.
- Les munitions sont clairement limitées.
- Le bestiaire, bien qu’il ne soit pas révolutionnaire, est bien assez effrayant pour nous tenir en haleine.
- La durée de vie des chapitres est assez longue pour mettre nos nerfs à rude épreuve
The Evil Within parvient aisément, et cela dès les premières minutes du jeu, à instaurer un climat de peur généralisée, nous plaçant au cœur de la survie.
Durant l’année 2008, c’est dans l’espace que la peur s’est installée, avec le jeu Dead Space du studio Visceral Games. Nous n’en menons vraiment pas large à bord de l’USG Ishimura. Et même si le scénario reste du déjà vu, l’intérêt du jeu se trouve dans son ambiance et sa mise en scène qui se révèlent particulièrement efficaces. Les créatures qui errent dans le vaisseau, appelées les Nécromorphes, sont particulièrement effrayantes et imposantes, et elles ont la fâcheuse tendance à surgir de n’importe où, n’importe quand (coucou le xénomorphe d’Alien !).
L’immersion est accentuée par un personnage somme toute lambda, qui n’est à la base pas conçu pour le combat, et par l’absence totale de HUD nous sortant de l’action. Les développeurs ont préféré intégrer un affichage holographique in-game qui nous permet de visualiser notre inventaire, et ont implanté la barre de vie directement sur la combinaison de notre protagoniste. Nous avons aussi intérêt à surveiller nos munitions qui ne sont pas suffisantes pour prendre l’avantage sur nos ennemis qui arrivent en nombre. Il faut jongler habilement entre l’utilisation de nos armes et les deux pouvoirs qui nous sont octroyés : stase et télékinésie.
Le sound-design du jeu n’est pas en reste pour nous maintenir dans un état d’angoisse permanent ; l’OST y joue d’ailleurs un rôle essentiel tant les morceaux de Jason Graves et Rod Abernethy sont prenants et adaptés à chaque instant du jeu. Dead Space a reçu, entre autres, le prix de l’audio lors de la neuvième édition des Game Developers Choice Awards.
Même si nous pouvons évoquer le côté action/TPS de Dead Space, celui-ci reste un survival-horror et un bon. Personne ne viendra vous sauver dans l’espace…
En 2001 sort un jeu qui se présente comme étant la pierre angulaire d’une franchise dont les suites sont tout aussi marquantes, nous avons nommé Project Zero (ou Fatal Frame). Nous incarnons Miku, jeune fille à la recherche de son frère Mafuyu, disparu dans le Manoir Himuro. Nous devons faire face à des esprits et percer le mystère de la malédiction qui règne sur la demeure. La dimension horrifique est clairement présente avec ses spectres terrifiants qui surgissent à n’importe quel moment. La vulnérabilité de notre personnage est mise en exergue grâce à son allure plutôt frêle, son faciès inquiet et à la manière dont nous combattons nos ennemis : pas d’armes ici, nous sommes armés d’un simple appareil photo.
L’exploration dans ce lieu lugubre muni d’une simple lampe torche a de quoi affoler notre rythme cardiaque ! Le pari du studio Tecmo est réussi : une ambiance à glacer le sang appuyée par un background excellemment posé empreint de mysticisme japonais. Le personnage est si vulnérable et le processus d’identification est tel que nous nous surprenons à transposer sa survie à la nôtre. L’OST n’est pas en reste, et accentue l’angoisse. Les phases d’exploration sont typiques du survival-horror, avec une caméra fixe qui contribue à nous donner des sueurs froides… Il y a globalement tout ce qu’il faut dans Project Zero ; même s’il est assez violent, voire gore, aucune séquence du jeu n’est là pour faire de la surenchère (comme nous l’observons de plus en plus dans d’autres jeux horrifiques).
Revenons encore quelques années en arrière. Nous sommes en 1999. Mikami, fort du succès de son Resident Evil, propose un jeu clairement inspiré de celui-ci, avec des dinosaures cette fois : Dino Crisis. Celui-ci voit le jour le 29 août et nous plonge dans une base scientifique infestée de dinosaures. À la différence des zombies, ces derniers sont bien plus rapides et ne nous laissent guère l’occasion de les tromper. Très clairement inspiré de Jurassic Park, Dino Crisis a plutôt bien été accueilli et s’offrira d’ailleurs deux suites ; cependant, l’année 1999 a été marquée par la concurrence, et par un jeu particulièrement bon, à savoir Silent Hill.
Keiichiro Toyama, créateur de la célèbre saga, en aura fait frissonner plus d’un ! Même si le jeu a plutôt mal vieilli, c’est probablement l’un des meilleurs survival-horror de l’histoire du jeu vidéo. Alors en plein essor, le survival-horror tend vers plus d’action, mais Silent Hill se démarque par son ambiance glauque, pesante et malsaine :
- Le scénario : Bien que légèrement difficile à suivre, le scénario est une pépite tant il est travaillé. Intrigante à souhait, l’histoire se déroule donc dans la ville de Silent Hill, point d’ancrage de cet opus. Mêlant drame humain, ésotérisme et surnaturel, le pitch apporte une atmosphère oppressante reposant énormément sur la mise en scène.
- Le bestiaire : Malaisant au possible. Tout droit sorti de l’imagination d’Alessa, jeune femme condamnée à la damnation, des créatures telles que les Groaners, les Splithead, les Rompers, et bien d’autres, nous effraient tout au long du jeu.
- Le système de jeu : Appuyé par une vue à la troisième personne, les angles et mouvements de caméra accentuent énormément ces sentiments d’angoisse et de malaise. Aucun HUD n’est disponible (pas d’information sur votre vie, vos munitions ou autre). Notre personnage évolue dans un brouillard constant, ne nous laissant pratiquement aucune visibilité. Des passages dans des endroits étroits et sombres, muni d’une simple lampe-torche, ne sont pas sans nous procurer un certain stress.
- Un nouveau courant : Silent Hill a cela de particulier qu’il apporte au survival-horror une dimension psychologique ; le jeu mise sur les émotions et une introspection presque psychanalytique.
Les suites de ce premier opus sont tout aussi formidables et horrifiques. On se souvient avec effroi de Pyramid Head et son couteau géant ainsi que des infirmières dans Silent Hill 2, sorti en 2001. Même si Silent Hill premier du nom est une claque monumentale, le deuxième volet a concrétisé les espoirs des joueuses et des joueurs, et il est considéré comme le plus abouti de la licence.
Nous entendons d’ailleurs encore parler de Keiichiro Toyama avec la sortie de Forbidden Siren sur PlayStation 2 en 2004 (en Europe), puisqu’il en est le game designer et le scénariste. Ce jeu a cela d’original que nous incarnons pas moins de dix personnages que nous devons garder en vie. Dans un village fictif japonais, notre mission est d’échapper à la menace des Shibitos, des créatures hostiles et immortelles pouvant prendre différentes formes répugnantes. Bien qu’il faille survivre, Forbidden Siren n’est pas un survival-horror à part entière. Il fait plus penser à un jeu d’action/infiltration en milieu horrifique qu’à un survival-horror en tant que tel.
Cette tendance se vérifie d’ailleurs de plus en plus. Un peu comme si l’on oubliait les basiques du genre pour se tourner vers quelque chose de plus mouvementé, axé sur de « l’horreur à sursaut » (les jumpscares) ou sur le fait de montrer à l’écran du répugnant. Un point à développer dans un prochain dossier ?
En attendant, on vous laisse sur ces images de Keiichiro Toyama, le père de Silent Hill, travaillant à son prochain jeu. Et n’hésitez pas à nous donner vos avis concernant ce papier ou vos ressentis sur le survival-horror !