Matthew Karch, actuel PDG de Saber Interactive, déclare dans une interview accordée au journaliste Stephen Totilo que l’ère des jeux vidéo AAA au budget faramineux arrive à son terme. Pourquoi Karch oriente son discours dans ce sens ? Et pourquoi les AAA (et les AAAA) ne seront peut-être qu’un souvenir d’ici quelques années ?
Auréolé du succès de Warhammer 40.000: Space Marine 2, Saber Interactive et son PDG savent de quoi ils parlent en matière de budget de développement. Nous apprenions il y a quelques temps que les aventures de Demetrian Titus avaient coûté un peu moins de la moitié du budget alloué au développement d’un certain Doom Eternal.
Space Marine 2 est donc un excellent exemple de jeu qui, malgré un budget modeste, a réussi à se hisser dans le haut du panier des ventes. Avec presque 6 millions de copies écoulées, cet opus de Warhammer 40.000 est le parfait représentant actuel du jeu AA qui, malgré un budget alloué au développement plus limité que ses confrères, répond à une demande bel et bien présente tout en prenant le temps de peser l’impact des décisions prises lors du développement.
Mais sur quelle donnée se base Matthew Karch pour prédire cette fin ? Il ne faut pas observer bien loin en arrière pour se rendre compte que les derniers AAA développés se sont souvent soldés par des échecs. Le tristement célèbre exemple de Suicide Squad: Kill the Justice League est un cas d’école qui aura fait perdre plus de 200 millions de dollars à la Warner. Il en est de même avec un exemple plus récent. Dragon Age: The Veilguard et son budget de développement estimé entre 150 et 200 millions de dollars, creuse l’écart avec un chiffre de vente inférieur à 50% des estimations.
A contrario, et en plus du phare bodybuildé en armure bleue que représente Space Marine 2, nombreux sont les AA qui ont su allier coût de développement réduit et travail de fond impeccable. Asobo avec la saga A Plague Tale en est un parfait exemple. Avec un budget de 10 millions d’euros pour Innocence et 25 millions pour Requiem, ils se seront vendus respectivement à plus d’1 et 3 millions d’exemplaires. Comme quoi allier expérience purement solo et budget restreint n’est pas forcément synonyme d’échec.
En se basant sur ces données, nous ne pouvons que comprendre les déclarations de Matthew Karch qui parle ouvertement de cette course absconse au plus gros budget et de son impact :
« Je pense que l’ère des jeux AAA à 200, 300 ou 400 millions de dollars est révolue. Je ne pense pas que ce soit nécessaire. Je ne pense pas que ce soit approprié. Je ne sais pas comment le dire au mieux… Je pense que s’il y a quelque chose qui a contribué davantage à la perte d’emplois, c’est le budget de plusieurs centaines de millions de dollars. »
Tout est dit. En déployant des sommes astronomiques dans le développement de nombreux AAA, les studios mettent en péril l’intégrité de leurs équipes. Suite aux échecs successifs de nombreux blockbusters du jeu vidéo, les studios n’ont d’autres choix que de licencier de nombreux employés pour éponger les pertes. Une technique pour le moins malhonnête et irréfléchie avec cette illustration parfaite de la maxime « foncer tête baissée ».
Les joueurs sont lassés des jeux services ? Pas grave pour la Warner et Rocksteady, ils basent tout de même Suicide Squad sur ce principe. Et comme signe de rétropédalage, mais également en aveux d’échec, Rocksteady et Warner décident de revenir à la base de leur succès en déclarant se mettre au travail sur un nouvel opus solo de Batman.
Effectivement, peut-être que l’ère des AAA et AAAA touche à sa fin. Les représentants de cette époque sont aujourd’hui synonymes d’échec pour les studios mais également un miroir de l’incompréhension des décideurs quant à ce que les joueurs attendent. La sortie de GTA VI viendra probablement jouer le rôle de contre-exemple, mais à l’heure actuelle la vision de Matthew Karch nous semble être la plus plausible.
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