C’est une première au sein des grands éditeurs de jeux vidéo américains : les testeurs QA (Assurance Qualité) de Raven Software, le studio derrière les derniers Call of Duty et propriété d’Activision Blizzard, ont créé un syndicat : la Game Workers Alliance. Il s’agit là de l’une des revendications d’un mouvement de grève entamé début décembre, faisant suite au licenciement de près d’un tiers de l’équipe de testeurs QA du studio du Wisconsin. Ces départs, non volontaires, sont d’autant plus difficiles à accepter pour les contractuels que des augmentations de salaire leur avaient été promises à plusieurs reprises sur les mois précédents.
Activision Blizzard, dont l’acquisition surprise par Xbox a été annoncée en début de semaine, est empêtré dans des affaires juridiques depuis le mois de Juillet suite à une enquête ayant attesté d’une culture « frat boy », de harcèlement sexuel et de discrimination. Dans une déclaration à Techcrunch, l’éditeur a annoncé prendre en considération la requête du studio Raven Software, tout en le remettant en perspective eu égard à sa taille au sein de la compagnie, et aux avantages accordés aux employés.
« Au sein d’Activision Blizzard, nous restons à l’écoute de nos employés et leur offrons les salaires, les avantages et les opportunités professionnelles nécessaires pour attirer et retenir les meilleurs talents du monde. Au cours des deux dernières années, nous avons notamment augmenté de 41 % la rémunération minimale des employés QA de Raven, étendu les congés payés, élargi l’accès aux prestations médicales pour les employés et leurs proches, et transformé plus de 60 % du personnel temporaire de Raven QA en employés à temps plein. » – Management d’Activision Blizzard, à propos de la création du syndicat de Raven Software
Dur de se satisfaire d’une réponse pareille, surtout quand on connaît l’historique d’intimidation de l’éditeur et les comportements toxiques répétés en interne qui sont à l’origine des poursuites judiciaires. On ne peut qu’espérer que le rachat par Microsoft et la probable mise à l’écart du PDG actuel, Bobby Kotick, réclamée par les salariés depuis plusieurs mois, parviennent enfin à améliorer cette situation.
Pour asseoir sa nouvelle position dominante, et rendre pérenne sa stratégie d’achat de studios, Microsoft a tout intérêt à changer le regard actuellement porté sur Activision Blizzard. Cela doit commencer par une écoute des différents acteurs du milieu et une parfaite compréhension des facteurs ayant conduit à cette situation, afin de pouvoir rétablir un cadre de travail digne des jeux produits.
« Je vais être honnête, je n’ai pas beaucoup d’expérience personnelle avec les syndicats. […] Je ne vais donc pas essayer de passer pour un expert en la matière, mais je dirai que nous aurons des conversations sur ce qui leur permet de faire leur travail au mieux, ce qui, comme vous pouvez l’imaginer dans une industrie créative, est la chose la plus importante pour nous. » – Phil Spencer (PDG de Xbox Game Studios)
Car si la réputation des studios ne suit pas, le joueur averti s’en détournera. Preuve en est que sur les trois mois qui ont suivi l’annonce de la poursuite judiciaire, World of Warcraft a perdu près d’un million de joueurs.