#BalanceTonDev’
Hélasn rien de nouveau ni de très surprenant : les critiques à l’encontre de The Last of Us Part II ont été une excellente opportunité pour les militants de la droite de venir vomir leur haine des libertés, qu’ils aient joué au jeu ou pas d’ailleurs. Le dernier jeu de Naughty Dog leur a surtout servi de prétexte et de crachoir.
On sait que la communauté des « gamers » a cette tendance à abriter en son sein bon nombre de personnages toxiques, comme on les qualifie aujourd’hui : agressifs, insultants, misogynes, homophobes… Ils ne sont peut-être pas les plus nombreux, mais ils sont certainement les plus bruyants. Il suffit d’aller faire un tour sur les forums de JeuxVideo.com, ou dans les commentaires que reçoivent les streameuses, pour s’en convaincre. Car leurs cibles préférées sont souvent les filles. Est-il nécessaire de rappeler les événements du gamergate ?
Dans cette ambiance délétère dont le jeu vidéo a beaucoup de mal à se défaire (mais essaie-t-il seulement ?), il était étonnant que le mouvement #MeToo n’ait pas gagné l’industrie. Ce n’était qu’une histoire de temps.
Depuis quelques jours, plusieurs studios sont en effet empêtrés dans des histoires de harcèlement sexuel, racisme et même de viol. Ce sont plusieurs accusations à l’encontre de Chris Avelonne qui ont allumé la mèche. Scénariste vétéran du jeu vidéo, il a débuté sa carrière chez Interplay, et a depuis participé à l’écriture de jeux comme Fallout: New Vegas, Star Wars: KOTOR 2, Divinity: Original Sin 2, Into The Breach, ou plus récemment Star Wars Jedi: Fallen Order ou Vampire: The Masquerade – Bloodlines 2. Pas n’importe qui, donc. Ce qui n’a pas empêché les différentes sociétés avec lesquelles il travaillait jusqu’à il y a quelques jours de s’en séparer devant le sérieux des multiples accusations d’agressions sexuelles dont il faisait l’objet.
Mais contrairement à l’affaire Alec Holowka (Nights in the Wood) l’année dernière, l’histoire ne s’arrête pas au licenciement du bonhomme. Meghna Jayanth, narrative-designer ayant travaillé sur Horizon: Zero Dawn ou This War of Mine, compile depuis quelques jours sur son fil Twitter des témoignages de harcèlements et d’agressions sexuelles.
Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le spectre des coupables est large. Pas étonnant d’avoir une communauté aussi toxique quand on voit le profil des gens aux manettes. Insomniac (Marvel’s Spider-Man, studio fraîchement acquis par Sony) est ainsi accusé d’avoir couvert des agresseurs pour sauvegarder des carrières en sacrifiant les victimes.
Ubisoft, de son côté, a vu plusieurs de ses employés de premier plan accusés de harcèlement sexuel et d’agressions. Le responsable des relations publiques de l’entreprise (aux États-Unis) a ainsi été accusé d’avoir un « comportement de prédateur » (« predatory behavior« ), et Ubisoft s’est séparé d’Ashraf Ismail, l’homme derrière Assassin’s Creed: Origins, Assassin’s Creed IV: Black Flag, et surtout Assassin’s Creed: Valhalla, suite à des accusations venant notamment de fans beaucoup plus jeunes. Des accusations de racisme et d’homophobie émanant de chez Ubisoft Sofia sont venues s’ajouter à la litanie de la honte.
Ubisoft a d’ailleurs publié un communiqué de presse pour tenter un damage-control du désespoir, expliquant prendre ces accusations très au sérieux et avoir fait appel à un consultant extérieur pour l’aider à mettre en place les mesures nécessaires.
Le pire dans ces affaires, c’est que – comme pour l’affaire Weinstein – probablement tout le monde était au courant. Nous-mêmes, joueurs et grand public, ne sommes même pas surpris, aussi triste que ce soit, tant les comportements sexistes sont banalisés dans le secteur. Et si les studios réagissent aujourd’hui, c’est malheureusement probablement plus pour protéger les sorties de leurs jeux respectifs (Vampire Bloodlines 2, AC: Valhalla, Spider-Man: Miles Morales, etc.) que pour créer un environnement de travail sain.
Si on apprécie que la diversité et l’ouverture d’esprit soient plus régulièrement présentes au sein des œuvres vidéoludiques, il serait temps que ces valeurs intègrent aussi les équipes de développement et l’industrie de manière générale pour ce qu’elles sont vraiment, et non plus pour leur apport marketing.