La franchise Borderlands ne va pas fort en ce moment. Après les excellents Borderlands 2 et Borderlands: The Pre-Sequel, nous avons eu un Borderlands 3 plus que tiède et une annonce d’adaptation en film qui aura suscité autant d’enthousiasme que de réserves. Il faut dire que le casting ne paraissait pas particulièrement adapté et que les rumeurs selon lesquelles la production aurait eu des difficultés à trouver la tonalité juste n’ont pas aidé à créer une quelconque forme de hype.
C’est ainsi que le film Borderlands est sorti en salle le 7 août 2024 dans l’indifférence générale, et les quelques valeureux qui sont allés voir la première séance du film, en peinant à trouver un siège dans une salle aussi vide que les attentes quant à la qualité de l’adaptation, en sont certainement ressortis déçus ou, du moins, dubitatifs.
Le film Borderlands est une bizarrerie, une pseudo histoire originale qui récupère de nombreux éléments des deux premiers jeux, les balance dans un mixer en regardant la recette des films Marvel et sert au public une mixture insipide en espérant contenter autant les fans des jeux que les néophytes.
Mais, à placer un univers aussi singulier dans le moule des films comiques PEGI 13 dans lesquels les réalisateurs se sentent obligés de faire passer dix blagues par minute, on se retrouve avec un film sans réelle identité, convenu, et qui évoque une production Marvel grimée avec un skin Borderlands.
De fait, on réalise trop facilement que les personnages les plus populaires de la franchise se retrouvent mis ensemble sans réelle raison, si ce n’est qu’ils sont appréciés des fans, et que le studio espère appâter le joueur sur la promesse de voir Lilith, Tina, Roland, Krieg et Claptrap au cinéma. Sauf que Lilith, Roland et Tina n’ont ici absolument rien à voir avec les personnages originaux.
Si les visuels, et certains détails, représentant authentiquement l’univers des jeux, tels les véhicules et les armes (une pensée, notamment, pour le sniper légendaire utilisé par Lilith et les véhicules de la Lance Ecarlate), c’est là à peu près tout ce qu’il y a de fidèle envers le matériel original.
Les sadiques que l’on croise dans le film sont des bandits lambdas de films de super-héros ; les combats sont souvent injustifiés et arrivent de manière forcée ou absurde ; l’antagoniste du film est un stéréotype ambulant associé au blasphème de mettre en lui à la fois le Général Knoxx du premier jeu et Le Beau Jack du second, en dépit de son absence de charisme et de ses répliques ridicules, et l’on s’épargnera de commenter le caméo de 10 secondes fait par le bestiaire de Pandore sur 1h40 de film. Il fallait, après tout, bien trouver le temps de nous mettre une longue scène dans les égouts de Pandore plutôt que de nous montrer…Pandore.
En somme, le film Borderlands ne réussit même pas à être un nanar et, se prenant constamment les pieds dans les lambeaux de son univers, se contente du statut de croute que l’on a absolument pas envie de revoir un jour ou même d’y penser davantage une fois sorti de la salle, alors même que l’on est soi-même un fan des jeux.
[Attention : la suite du texte contient des spoilers]
Que serait Borderlands sans Lilith la Sirène Chasseuse de l’Arche, Tiny Tina la psychopathe vagabonde, Roland le soldat stoïque et rationnel et, surtout, Pandore, la planète de toutes les convoitises, riche d’un bestiaire varié, horrifique, allant des Skags se baignant dans l’acide aux tribus de sadiques déformés sur fond de biomes divers et extrêmement dépaysants ? Oubliez tout cela, le réalisateur a décidé qu’il avait une version bien supérieure de cet univers que ce que l’on connaissait naïvement jusque-là.
Désormais, Lilith, interprétée par Cate Blanchett, est juste une chasseuse de prime badass, qui a grandi sur Pandore mais s’en est échappée, et visiblement a une relation compliquée avec sa mère. Tina, jouée par Ariana Greenblatt, est une enfant artificielle, un clone, fabriquée à partir d’une goutte de sang éridien et destinée à être sacrifiée pour ouvrir l’Arche au bénéfice de la société Atlas, dont le dirigeant, monsieur Atlas lui-même (fardeau porté par Edgar Ramirez), prétend en être le père entre deux répliques edgy trahissant de manière inattendue sa volonté de l’utiliser jusqu’à ce qu’elle meurt.
Quant à Roland, incarné par Kevin Hart, il est le personnage rigolo, un peu bête mais brave, qui initie l’aventure en kidnappant Tina et nous divertit tout au long de l’aventure avec ses blagues et ses situations comiques.
Il faut rendre aux Eridiens ce qui leur revient : les personnages de Claptrap (Jack Black) , Marcus (Benjamin Byron Davis) et Krieg (Florian Munteanu) sont, en revanche, une franche réussite, tant du point de vue esthétique que du doublage et du jeu d’acteur. Ces trois personnages sont le soupçon de Borderlands que l’on retrouve dans le film, et même si l’on déplore le fan service gras (du genre, nos héros qui portent des masques de skins déblocables pour passer inaperçus), l’on apprécie quand même d’entendre Krieg ne dire que ses répliques du jeu et Claptrap demeurer aussi caustique et cruel qu’il l’est dans les jeux.
Les péripéties du film ne sont absolument pas intéressantes, entre courses poursuites assez génériques où les antagonistes ont la gentillesse de temporiser et offrir la reddition à nos héros à chaque fois qu’ils sont acculés et combats affligeants où visiblement les soldats ennemis ne savent pas ce que c’est que de se mettre à couvert et restent debout au milieu du terrain en pleine fusillade. Si l’IA des jeux est supérieure à l’acting de soldats, où va le monde ?
Après une épopée mémorable (non) dans les égouts, lieu emblématique de Pandore et gage de dépaysement planétaire, notre bande de héros trouve au pif l’Arche où les attend un dénouement sans saveur, Marvel-esque, lors duquel le film se dépêche de nous donner l’origin story de Lilith, un combat contre l’antagoniste et un happy ending lors duquel on apprend que la paix règne désormais sur Pandora à la suite de la défaite d’Atlas.
Le problème du film Borderlands, c’est de nous resservir encore et toujours cette formule de films de super-héros comique que l’on subit depuis quelques années, qui dédramatise toutes les tragédies et thèmes sérieux avec des blagues crasses incessantes tout au long du film. De manière anecdotique, le premier jeu Borderlands est assez sinistre et sombre, c’est sans doute ce ton qu’il aurait fallu adopter pour traiter cet univers et les thèmes qu’il aborde.
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