Rétro (mais pas trop), c’est la chronique qui rebondit sur l’actualité pour revenir en arrière et évoquer l’histoire d’un jeu vidéo, ou du jeu vidéo. Pour patienter jusqu’à la sortie du nouvel Alone in the Dark, qui vient d’être repoussé à mars 2024, on revient sur les origines de la saga avec cette deuxième partie de notre dossier consacré à la série. La première partie de ce dossier est à retrouver ici.
Alone in the Dark: The New Nightmare
Après une première trilogie globalement bonne, Infogrames s’est décidé a rebooter sa licence et la modernisant au passage. Repensant son système de jeu, son gameplay, tout en apportant dans sa besace un nouveau moteur graphique proprement hallucinant pour l’époque, The New Nightmare est un des épisodes majeurs de la saga, si ce n’est son meilleur. C’est au studio Darkworks qu’incombe la lourde tâche de développer les nouvelles aventures d’Edward Carnby, firme à qui l’on doit entre autres un autre survival-horror du nom de Cold Fear (petit bijou imparfait et méconnu) sortit en 2005.
Alone in the Dark: The New Nightmare parut en 2001 sur PlayStation 1 et 2, Dreamcast, PC et même sur Gameboy Color. Attention, toutes les versions ne se valent pas et nous vous conseillons celle sortie sur Dreamcast tant elle se montre la plus réussie à tous les niveaux, même si graphiquement la mouture PS2 est légèrement supérieure, elle souffre de décalages sons et de temps de chargement embêtants.
Le scénario se veut assez classique, même si double, car comme dans le premier épisode de la saga, on a le choix dès le départ du personnage que l’on souhaite incarner : Edward Carnby ou une certaine Aline Cedrac. Tous deux vont vite se retrouver pris au piège sur l’île de Shadow Island, dans un étrange manoir qui semble être le lieu d’expérimentations surnaturelles et peuplé d’étranges et dangereuses créatures. Bien que nos deux héros aient un but commun, celui de retrouver d’anciennes tablettes pour mettre à mal les plans d’un vil méchant, leur point de départ dans cet enfer, comme leur avancée diffèrent.
Le choix entre les deux personnages influe aussi sur la difficulté. Carnby est plus fort et est plus à même à utiliser des armes pour se défendre, alors qu’Aline est elle plus fragile et son gameplay est surtout basé sur la résolution d’énigmes ou la fuite pour se sortir de situations périlleuses. Cette dualité, tout comme ces deux cheminements distincts sont l’une des forces du jeu, apportant rejouabilité et surtout deux manières d’appréhender les événements.
Niveau mécaniques de jeu, on est très proche de la formule Resident Evil, à deux trois petits détails près. On y retrouve les classiques du genre du début des années 2000, mais avec quelques concessions, comme un inventaire non restreint, et donc l’absence de lieux de stockage. La visée, les déplacements, tout est calqué sur la formule moderne de Capcom, on retrouve une certaine lourdeur et une avancée basée sur la recherche de clés et autres objets utiles. Néanmoins, le jeu se veut plus difficile, parfois frustrant, et une mécanique particulière sort du lot.
C’est en effet avec The New Nightmare que la lumière prend toute son importance dans la licence. Le moteur du jeu a été spécialement conçu pour gérer les lumières dynamiques et pour qu’elles se reflètent en temps réel sur les décors pré-calculés. C’est techniquement très solide, très beau aussi, emballé d’une magnifique direction artistique bien sombre et lorgnant vers le gothique, et les jeux de lumière sont incroyables pour l’époque.
Mais la lumière sert surtout aux affrontements. Les créatures de cet Alone in the Dark la craignent et il nous faut jouer avec cette faiblesse tout au long du jeu pour nous dépatouiller de ces vilaines bêtes qui ont surgi des profondeurs de la terre. Cela fonctionne admirablement bien et apporte un petit quelque chose qui rend l’expérience fondamentalement différente que celle que l’on a dans un Resident Evil ou un Silent Hill. Quelque chose qui rend ce nouveau cauchemar graphique et auditif unique en son genre, surtout que certains objets ne sont visibles qu’une fois éclairés, la lumière étant donc aussi un impératif à notre fouille du manoir.
Alone in the Dark: The New Nightmare a connu un joli succès critique et des ventes très correctes, sans pour autant rivaliser avec les cadors du genre. Il est néanmoins à ce jour le meilleur épisode de la saga, proposant même une mouture Gameboy Color très correcte. Un véritable must have pour les amateurs de survival-horror et qui fait parti de ces jeux cultes de l’âge d’or du genre, aux côtés des licences de Capcom, Konami et autres Project Zero ou Forbidden Siren.
Alone in the Dark (2008)
D’Infogrames on passe à Atari, et si vous voulez en savoir plus sur le pourquoi du comment, nous vous laisserons faire vos propres recherches, tant la chose est due à nombre d’acquisitions et de fusions de différentes filiales, etc. Néanmoins, on espère toujours du côté des têtes pensantes pouvoir faire d’Alone in the Dark une licence forte du jeu vidéo. La cuvée 2008, qui se veut reliée au premier épisode de 1992, est un nouveau reboot et a demandé au studio Eden Games près de 4 ans de développement.
Pourtant, il est sans aucun doute l’épisode qui a plongé la saga dans un marasme dont elle ne s’est toujours pas remise. Ambitieux, très ambitieux, blindé de bonnes idées, à la mise en scène hollywoodienne et au découpage épisodiques très serial, le jeu n’en demeure pas moins un joli ratage dont Atari aura bien du mal a se relever vu l’investissement que le jeu a demandé.
On y incarne un Edward Carnby qui se réveille amnésique dans un vieil et majestueux hôtel de New York, prisonnier d’un groupe de personnages aux motivations obscures. Très vite les choses se gâtent, la ville est attaquée par une étrange force surnaturelle qui détruit tout sur son passage et commence alors notre fuite en avant qui nous mènera très vite sur le terrain de jeu principal de cet épisode, Central Park. Du scénario, nous ne retiendrons pas grand-chose, les dialogues sont surfaits, les personnages le sont tout autant, et l’écriture, comme les rebondissements, sont d’un nanar trop premier degré pour être assumé. La filiation avec le premier jeu est là, mais ça part dans tous les sens, à tel point que l’on en rigole plus qu’autre chose.
Les mécaniques de jeu, elles, sont déjà plus intéressantes. Après la lumière, c’est le feu que craignent les créatures meurtrières (et au design parfois risibles) qui sont à nos trousses, et on a d’ailleurs tout un panel de possibilités pour se servir du feu en jeu, on peut par exemple prendre une chaise pour l’enflammer, ce qui peut aussi bien nous servir à éclairer un endroit précis ou mettre à mal ceux qui se dressent devant nous. Le système de combat reste cependant très approximatif, le mappage des touches est tout sauf instinctif, et cela se confirme surtout lors de nos combats au corps à corps.
La bonne idée de l’inventaire qui est représenté par les poches internes de la veste de Carnby est une très bonne idée, tout comme le fait de pouvoir modifier et fabriquer des armes de fortune en assemblant divers objets. Reste que dans les faits, cela hache le rythme de l’action, et cela ne rend pas le titre plus jouable. Il y a nombre d’approximations qui ne peuvent qu’énerver à la longue et tout une palanquée de bugs divers et variés qui entachent l’expérience. La visée est imprécise, même à la première personne, ce qui nous est imposé lorsque l’on tire, et surtout les déplacements de Carnby sont d’une lourdeur et d’une imprécision incroyable. Et il faut coupler cela aux très nombreux problèmes de caméras, pourtant les caméras fixes ont laissé place a une vue TPS à la troisième personne classique.
C’est un désastre qui n’est sauvé que par sa mise en scène assez soignée lors de séquences scriptées de destructions et de plateformes, ou encore de courses poursuites, mais aussi par son moteur physique Havok qui fait des merveilles, des énigmes parfois sympathiques, ainsi que par une proposition artistique potable. Notons aussi l’excellente bande-son du compositeur Olivier Derrivière qui a accompli un travail largement trop bon pour un tel jeu. Alone in the Dark 2008 est a oublier, a rayer de sa mémoire et marque le début de la descente aux enfers de la licence.
Alone in the Dark Illumination
Après le four de 2008, Atari enterra le projet de remake du premier épisode initié avec Eden Games. Néanmoins, l’éditeur n’entendait pas laisser sa licence dormir trop longtemps et compta sur le studio Pure FPS pour en relancer l’intérêt. À noter que c’est la première fois qu’un studio étranger allait développer un jeu de la saga, et c’est d’ailleurs le plus mauvais qui ait vu le jour.
Annoncé en 2014 pour une sortie exclusive sur PC en 2015, Alone in the Dark Illumination est un actionner coopératif jouable jusque 4 joueurs simultanément proposant donc autant de classes distinctes. Le Chasseur (Edward Carnby), la Sorcière, le Prètre et l’Ingénieur. Tous disposent d’une campagne propre, ainsi que de capacités uniques. Ici, on abandonne réellement le survival-horror pour quelque chose de plus classique baignant dans l’action. Sorte de mix bâtard d’un Left 4 Dead et d’un Alan Wake, puisque la lumière de nos lampes sert à repousser nos ennemis, le jeu n’a rien à offrir.
C’est simple. Il est moche, buggé, injouable, aussi captivant qu’un épisode de Derrick (et encore ce n’est pas rendre justice à l’Allemand) et n’est jamais réellement sorti de sa phase de bêta. Voilà qui marque pour près de dix ans la fin des aventures d’Edward Carnby.
L’espoir Alone in the Dark Remake
Nous sommes fin 2023 et dans un mois environ à la date où nous écrivons ces lignes au printemps prochain, le remake du premier Alone in the Dark va voir le jour. Initié par THQ Nordiq qui racheta les droits de la licence après la faillite de Atari, le titre est développé par Pieces Interactive. Il se veut être un retour aux sources modernes à la vieille formule du survival-horror imaginée par Frederic Raynal.
Le scénario est donc de base le même que l’épisode de 1992 et on nous laisse toujours le choix d’incarner Edward Carnby (David Harbour) ou Emily Hartwood (Jodie Comer) qui devront tous deux s’échapper du manoir Decerto. Un retour aux sources donc aussi bien en termes d’ambiance, que de mécaniques de jeu, et qui se veut être par la même occasion le retour en grâce de la licence auprès des joueurs et de la presse. Nul doute que l’on vous en reparlera dans quelques temps, mais en attendant, il nous faut conclure notre petit dossier concernant cette saga qui aura connu des hauts et des bas.
Oui, Alone in the Dark est une licence culte du jeu vidéo
Si la saga n’a pas toujours été à la hauteur de ses ambitions et des attentes, elle a été l’instigatrice d’un genre, le survival-horror, et de mécaniques de jeu qui ont toujours cours en 2023. Frederic Raynal, son génial créateur, a été à la fois visionnaire et avant-gardiste, et ses successeurs ont pour certains réussi à pérenniser son œuvre à travers les âges, tout en proposant des visions différentes. On retiendra une première trilogie qui est globalement bonne, et un Alone in the Dark: The New Nightmare qui réussit son pari de renouveler la licence en son temps.
Alors certes, la saga Alone in the Dark jouit d’une aura assez puissante encore aujourd’hui auprès des fans de survival-horror, mais si le remake se plante, il se pourrait alors qu’elle signe là définitivement son arrêt de mort, car cela fait très longtemps qu’un jeu ne serait-ce que correct n’a vu le jour, et il serait temps.
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