À vomir. La réponse d’Activision Blizzard aux dernières semaines de contestation des testeurs QA (assurance qualité) de Raven Studios, et à la création du syndicat qu’ils ont demandé, est simplement à vomir. L’éditeur a investi toute son énergie et des moyens exceptionnels dans le but de réduire à néant les espoirs des employés du studio.
Pour rappel, il y a de cela trois semaines, les salariés de Raven Studios annonçaient, après plus d’un mois de grève en raison de conditions de travail délétères et de licenciements gratuits, leur intention de créer un syndicat : la Game Workers Alliance. Pour pouvoir se faire simplement, celle-ci nécessite l’approbation de l’éditeur propriétaire du studio, sans quoi la démarche impose de passer en justice (ce qui prendra plusieurs années).
La première réaction de l’éditeur fut parfaitement dans le prolongement de leur comportement durant la grève : des paroles vides de sens, annonçant « prendre en considération la demande ». Cette considération a depuis laissé place à des actes injustes et écœurants.
Seulement, trois jours après le communiqué de création de syndicat, l’éditeur imposait à l’ensemble de l’équipe de testeurs QA la répartition de ses membres entre les différents services du studio, de l’animation aux opérations de production. La raison annoncée, on ne peut plus cynique, était la suivante : diviser pour mieux régner « l’alignement sur les bonnes pratiques des autres grands studios d’Activision ».
Le lendemain, Activision Blizzard partageait officiellement sur les réseaux sa décision de ne pas reconnaître le syndicat espéré par les employés du studio, ne laissant à ceux-ci que la possibilité de passer devant la NLRB, l’agence dédiée aux problématiques de syndicalisation aux États-Unis d’Amérique.
Mais, comme si ses intentions n’étaient pas assez claires, les actions entreprises par l’éditeur par la suite pour saper les possibilités de syndicalisation sont encore moins honorables.
Une semaine après l’annonce de création de la Game Workers Alliance de la part des testeurs, Chris Arends, Vice-Président QA d’Activision Blizzard, exprimait toute sa désapprobation quant à l’utilité des syndicats en des termes dénigrants sur un channel Slack interne privé.
Un syndicat ne fait rien pour nous aider à produire des jeux de classe mondiale, et le processus de négociation n’est généralement pas rapide, réduit souvent la flexibilité, et peut être contradictoire et conduire à une publicité négative. Tout cela pourrait nuire à notre capacité de continuer à créer des jeux de qualité. – Chris Arends, Vice-Président QA d’Activision Blizzard
Dans la continuité, il semblerait que plusieurs sub-channels aient été créés pour mieux introduire ces directives auprès du Management, et ainsi s’assurer de la direction de la politique interne.
Et parce qu’apparemment, l’honneur n’était pas encore mort aux yeux de l’éditeur, certains employés de chez Raven Studios ont eu le droit, la semaine dernière, à une formation obligatoire, durant laquelle leur a été présentée une panoplie d’informations trompeuses quant à la syndicalisation, pour mieux les dissuader d’adhérer au mouvement des testeurs QA. Une véritable propagande anti-syndicat dont la rapidité de mise en place ne laisse aucun doute quant à l’importance de celle-ci aux yeux d’Activision Blizzard.
Une autre annonce récente, dont le timing paraît assez impromptu, est qu’Infinity Ward sera le lead studio derrière le Call of Duty de cette année, dans la valse désormais habituelle des studios dans la création des différents opus de la série. Plus surprenant, le studio prendrait aussi la direction de Call of Duty: Warzone qui, jusqu’à présent, était géré par Raven Studios. Il ne s’agit probablement là que d’une coïncidence, mais cette nouvelle ressemble étrangement à une punition infligée au studio pour limiter sa visibilité et son implication au sein des différentes productions.
La réponse d’Activision Blizzard à la création de la Game Workers Alliance est on ne peut plus menaçante : elle représente tout ce que l’on peut craindre d’une situation où l’éditeur et le studio sont en désaccord. Le premier, mastodonte financier, peut s’appuyer sur sa toute-puissance administrative pour imposer sa vision du business model, quand bien même elle ne respecterait à aucun moment les personnes derrière les productions.
Si le rachat d’Activision Blizzard par Microsoft est validé par les autorités antitrust dans les mois à venir, espérons que Xbox Game Studios décidera de s’impliquer dans cette histoire afin d’y trouver une solution convenable pour tous les partis. En l’état, ce n’est certainement pas sous la tutelle d’Activision Blizzard que la Game Workers Alliance verra le jour.
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