Depuis 2002 le studio indépendant français Asobo roule sa bosse dans le milieu en enchaînant les participations à de gros AAA en parallèle de la création de jeux originaux. Le studio a en effet bossé sur des projets d’envergures tels que ceux de The Crew 1 et 2 ou encore Quantum Break et développé des titres comme FUEL, tout en travaillant en étroite collaboration avec Microsoft concernant des projets sur Hololens. C’est mine de rien un acteur important du jeu vidéo français depuis ses débuts, même si opérant dans l’ombre, chose qui devrait changer radicalement avec la sortie prochaine de A Plague Tale: Innocence.
A Plague Tale: Innocence – The French Last of Us
Se lancer dans A Plague Tale: Innocence c’est se lancer dans une aventure narrative rythmée et intense qui puise son inspiration dans des jeux tels que The Last of Us, Ico, ou encore le dernier God of War. Cela pour la simple et bonne raison qu’il mise tout sur la relation entre une sœur et son jeune frère qui vont devoir apprendre à se connaitre et travailler de concert pour surmonter les épreuves qui les attendent. Si on parle ici d’inspiration, c’est que A Plague Tale: Innocence est bien plus que cela et propose un univers dark fantasy charmeur avec une histoire prenant place au moyen-âge.
On y incarne une fille de bonne famille de 15 ans, une certaine Amicia de Rune, qui se retrouve à devoir s’occuper de son petit frère Hugo de 8 ans après que leur parent furent assassinés par l’Inquisition. L’adolescente va devoir alors échapper aux tueurs de l’Église, tout en protégeant son jeune frère, et faire avec une peste surnaturelle qui ravage la région, poussant la population à devenir particulièrement craintive et agressive.
La peste aux poils noirs
Notre version preview nous a permis d’accomplir trois chapitres de A Plague Tale: Innocence, ce qui nous a déjà donné un très bon aperçu de ce que le jeu d’Asobo propose. En termes de narration déjà, il faut savoir que le jeune Hugo est atteint d’un mal rare et était couvé avant les événements présents par la mère des deux jeunes gens, Béatrice de Rune. Il ne sortait quasiment jamais de sa chambre et avait peu de contact avec d’autres personnes, qu’elles soient de sa famille ou non.
En cela, la narration se concentre sur la relation qui se noue entre les deux orphelins et sur la découverte du monde extérieur par Hugo, ce qui n’est pas sans rappeler la petite Ellie de The Last of Us. On a donc droit à nombre de cut-scenes et dialogues mettant en scène nos deux héros, ainsi que d’autres servants à tisser le fil d’une histoire qui semble soignée et intéressante pour ce que l’on en a vu. La mise en scène est plutôt réussie, le jeu d’acteur plutôt bon, reste que pour un jeu qui se déroule en France, on regrette qu’il ne soit pas localisé intégralement en français en proposant des doublages dans la langue de Molière.
Mais ne soyons pas mauvaise langue, ceci n’est finalement qu’un petit détail. Cela n’enlève en rien les efforts accomplis par les développeurs pour nous pondre un univers médiéval de qualité, tout en y imbriquant un côté surnaturel qui fonctionne et qui semble lié à la maladie du frère d’Amicia. La peste dont est atteinte une partie de la population n’est donc pas naturelle et semble transmise par des rats provenant tout droit des enfers. Se déplaçant par centaines et fondant sur les gens tels un tsunami, ils sont l’incarnation du mal qui ronge la région et sont dévastateurs. Leur seul point faible est la lumière et il va falloir en jouer pour se sortir de situations paraissant désespérées.
Jamais sans ma fronde
En jouer oui, car les passages durant lesquels on se retrouve confronté aux rats sont en fait des casse-têtes consistant à devoir se frayer un passage en créant des sources de lumière pour repousser ou éliminer la vermine. Si cela peut paraître assez simpliste, ce qui est vrai, le procédé fonctionne néanmoins plutôt bien, même si on craint que sur le long terme il ne faille proposer autre chose pour varier un peu les plaisirs au risque de rendre ces rencontres trop monotones.
Tout comme les quelques courses poursuites, contre rats ou humains, que nous avons effectuées. Elles sont certes excellemment mises en scène, mais on espère là aussi qu’il n’y en aura pas à chaque chapitre. Cependant, on ne peut pas dire que cela nous ait ennuyé, loin de là puisque A Plague Tale: Innocence semble savoir bien équilibrer ses différentes séquences de gameplay. Il se trouve d’ailleurs que l’on est en face d’un véritable jeu d’infiltration avec tout ce que cela implique d’éléments de diversions, de hautes herbes faisant office de cachette, d’une fronde comme arme silencieuse et d’une IA pour le moment assez foireuse.
A Plague Tale: Innocence propose finalement des phases de jeu assez classiques, et ce n’est pas le duel contre une armoire à glace ou les quelques séquences de coopération avec notre jeune frère qui vont changer cela. Armé de notre fronde, nous devons avancer dans l’ombre, car une moindre erreur et c’est quasiment le game over assuré. Il est clair que dit comme ça le jeu peut paraître difficile, mais ce n’est pour le moment pas le cas, la faute encore une fois à une IA qui se laisse berner par le même vieux caillou lancé au même endroit un nombre incalculable de fois.
Attention, si l’on parle de classicisme, on ne parle pas de mauvaise exécution, car le jeu s’en sort plutôt bien, est agréable à prendre en main et réussit ce qu’il entreprend souvent avec brio. On a aussi pu entrevoir un système de craft semblant complet et la probable utilisation de pouvoirs via Hugo, ce qui approfondirait le côté coopération entre les deux personnages qui se résume pour l’instant à résoudre quelques énigmes ou à tenir ou non la main du plus jeune pour le guider.
La beauté moyenâgeuse
Pour finir, il nous faut lâcher quelques mots sur la proposition graphique de A Plague Tale: Innocence. Il va sans dire que l’on ne s’attendait pas à trouver là un véritable étalon graphique et pourtant le jeu est plutôt beau, affichant de jolis décors qui s’accompagnent d’une direction artistique soignée misant sur une authenticité et un réalisme sur l’imagerie. Asobo n’a nullement cherché à édulcorer son propos et il arrive bien souvent que le titre se montre assez fort, notamment lorsque l’on croise les rats.
On ressent aussi aisément les côtés crasseux et cruels du moyen-âge et on se dit alors que le terme » âge sombre » sied à merveille à ce que l’on a sous les yeux. Pourtant, il se dégage une beauté plus marquée et tranchant singulièrement avec le reste lorsque l’on arpente quelques sentiers en pleine nature, ce qui crée un contraste assez saisissant, entre la majestueuse forêt et le village rongé par la peste et la colère de ses habitants.
Techniquement, nous n’avons rencontré aucun problème majeur sur l’early build qui a été mis à notre disposition. On a par contre eu droit à quelques bugs d’affichage ou de collision, notamment entre Amicia et Hugo lorsqu’ils se tiennent la main. Aussi, il faut ajouter que nous avons été surpris par la gestion de la lumière et notamment du feu durant notre essai, et on peut l’affirmer, si A Plague Tale: Innocence ne va pas marquer les esprits de par sa réalisation technique, il n’a pas pour autant à rougir de ce côté là.
Pour le moment nous sommes agréablement surpris par A Plague Tale: Innocence qui semble tenir toutes ses promesses. Les trois chapitres que nous avons pu jouer nous ont à la fois captivés et surpris de par une maîtrise artistique et une authenticité rare. Certes, si pour le moment quelques griefs demeurent, notamment au niveau de l’IA, l’expérience proposée semble suffisamment équilibrée et cohérente pour que tous les espoirs soient permis.
Le jeu nous a également charmé de par son écriture et sa mise en scène, le tout porté par un scénario qui tient en haleine et promet beaucoup, alors que le cadre du moyen-âge plongé saupoudré de dark fantasy fait merveille. On espère enfin que la relation entre Amicia et Hugo continuent sur sa lancée, car il semble que cela soit la pierre angulaire narrative de ce A Plague Tale: Innoncence qui fait bien plus qu’éveiller notre curiosité.