Le jeu vidéo est souvent perçu de façon limitante comme un simple divertissement. Assurément, il l’est. Mais il n’en reste pas moins une forme d’art qui permet d’exprimer son talent (nous parlons ici des développeuses et développeurs), mais aussi parfois (et de plus en plus souvent) de prendre position quant à des sujets dits « sensibles », de mettre en scène diverses communautés ou différents genres, ce qui permet une normalisation qui est loin d’être inutile. Et parmi cet art se trouvent des jeux qui revêtent des aspects éducatifs et pédagogiques, comme Through the Darkest of Time.
Sorti le 30 janvier 2020, soit 87 ans jour pour jour après qu’Hitler avait été nommé au poste de chancelier par le président Hindenburg et trois jours après le 75e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz, Through the Darkest of Times est un serious game qui vous plonge dans la résistance interne au nazisme dès 1933.
Différents personnages vous sont proposés, à vous de choisir celui que vous allez incarner. Vous devez recruter des partisans, récolter des fonds, des objets et des informations, saboter… Le tout sans vous faire prendre par la Gestapo. N’oubliez pas qu’il s’agit d’un jeu stratégique : tous vos choix auront des conséquences.
Il y aurait beaucoup à dire sur ce jeu développé par le studio indépendant allemand Paintbucket Games. À commencer par le sujet lui-même : la résistance interne au nazisme. Celle-là même dont on ne parle pas beaucoup, alors qu’elle fut présente au même titre que les réseaux de résistance externes.
Si l’on peut déplorer quelques couacs d’un point de vue historique (quelques erreurs de dates qui semblent cependant avoir été patchées), l’alliance de partisans d’appartenance politique divergente, ou encore « l’oubli » (?) de certains événements comme l’application des lois de Nuremberg de 1935, d’un point de vue pédagogique Through the Darkest of Times reste très pertinent et accessible.
Le jeu se divise en quatre chapitres qui suivent un ordre chronologique :
- La prise du pouvoir (1933)
- L’apogée (1936 et les J.O de Berlin)
- La Guerre ! (1941)
- La chute (1945)
Chaque semaine du jeu s’ouvre par la lecture d’actualités dans les journaux : on y retrouve des événements marquants comme la semaine sanglante de Köpenick, l’incendie du Reichstag, les premiers passages à tabac publics de juifs dans les rues, les déportations… Une fois encore, cela s’avère judicieux pour rendre le jeu éducatif, car il va de soi que les nazis ne communiquaient pas à propos de ces exactions dans les journaux.
Ne serait-ce que pour le travail de mémoire, nous ne pouvons que vous conseiller de jouer à Through the Darkest of Times. À l’instar de Republic the Revolution (dont TTDT semble s’être fortement inspiré), le jeu ne vous permettra pas de changer le cours de l’Histoire, et cela peut être perçu comme décevant d’un point de vue ludique. Mais la direction artistique compense amplement cet aspect avec des dessins originaux en noir et blanc (qui n’est pas sans nous rappeler le film La Liste de Schindler), sa narration, et sa bande-son dans le jus de l’époque.
Même si nous ne pouvons qu’imaginer ce que les résistants ont vécu, TTDT a au moins le mérite de nous donner un aperçu de ce qu’était leur quotidien, et cette expérience s’inscrit comme étant un rappel et un avertissement que l’Histoire peut se répéter.
Handy Games, l’éditeur du jeu, annonce que ce dernier est désormais disponible en version physique dans les magasins de détail.
Parce que la Shoah n’est pas qu’un détail de l’Histoire.