Les voyages psychiques sous psychotropes ont toujours été un terrain fertile pour les imaginations les plus fantasques. De Alice au pays des merveilles à Las Vegas Parano, ce ne sont pas les œuvres rythmées par d’illicites aventures mentales qui manquent. What Happened s’inscrit clairement dans ce registre, pour entamer son histoire avec Stiles, votre personnage qui prend allègrement un carton de LSD, afin de se laisser porter par ses plus grands tourments cauchemardesques, et autre joutes verbales avec son inconscient dans un combat intérieur incessant.
(Test de What Happened réalisé sur PC via une copie du jeu fournie par l’éditeur)
Very Bad Trip
Après un temps de chargement assez long, mais unique au démarrage, vous commencerez votre périple dans le lieu de prédilection de Stiles : les toilettes du lycée (lieu principalement visité durant la totalité du titre), desquels il semble coutumier pour ses escapades interdites. C’est ici que vous assisterez aux prémices du long bad trip qui vous attend, à base de souvenirs revisités entremêlés de peurs profondes qui vont de pair avec cette période charnière dans une vie, l’adolescence.
Vous commencerez par vous perdre parmi les couloirs de votre établissement scolaire, dans lesquels on pourra assister à des tranches de vie de l’adolescent, aussi bien amoureuses qu’amicales. Ce sera l’occasion de mettre parfois en avant un comportement dangereux, à travers le personnage de Stiles et de sa consommation de stupéfiants incontrôlée, qui l’aura mené aux événements étranges auxquels il se confronte.
Fort heureusement, le titre sait parfois changer radicalement d’ambiance, pour explorer des thèmes plus profonds à travers de brèves réminiscences de ses parents. Celles-ci sont en réalité une invitation à explorer des mondes plus colorés qui, en plus d’alléger l’ambiance, réduit aussi drastiquement le gameplay dans ce qui s’apparente à de basiques mini-jeux.
La jouabilité plutôt simpliste se réduit principalement à l’exploration des lieux et l’interaction avec les éléments nécessaires à la progression, tels que des clés à trouver qui représenteront une bonne partie de votre première heure de jeu, ou des ampoules qui, en plus d’éclairer les lieux, permettent d’altérer la réalité environnante afin de progresser.
On retrouvera également des notes qui détaillent la psyché du protagoniste et ses angoisses, ainsi que sur les relations qu’il entretient avec ses proches, des détails bienvenus afin de saisir un peu mieux l’origine des menaces.
Un cauchemar sans fin ?
Répétez cette boucle, et vous aurez composé les quatre à cinq heures de What Happened, à l’exception d’un ou deux objets spécifiques à récupérer, et quelques séquences de niveaux immergés qui ne modifient rien de plus que l’aspect visuel. Il faudra compter sur la beauté des fragments de rêves parfois parcourus à vive allure pour maintenir notre attention tout au long de l’histoire contée. Sans oublier les bonnes surprises de mises en scène horrifique, qui ne manqueront pas de faire sourire les habitués du genre à chaque tentative de screamer.
Car ce seront bien les souvenirs hantant votre songe qui formeront vos obstacles, souvent représentés par des mains associées à des traumatismes. Une fois attrapé par l’une d’entre elles, Stiles s’enfonce dans les abysses, là où un étrange labyrinthe l’attend en guise de mort. Il ne s’agit pourtant pas d’un game over à proprement parler, car le joueur pourra revenir à la « réalité » s’il trouve la sortie.
Ce qui au premier abord sonnait comme une idée intéressante pour remplacer la fin de partie, via un réel niveau spécifique aussi oppressant que confus, devient malheureusement vite redondant, voire crispant. Surtout lorsque les hitbox et contrôles hasardeux vous envoient directement dans une nuée d’ennemis imprévisibles.
Si on ne peut pas faire l’éloge de la maniabilité, l’ambiance et l’univers déstructuré du jeu restent du plus bel effet. En effet, ces derniers donnent une ambiance onirique à l’enchaînement des scènes, passant tantôt d’une direction artistique très enfantine qui vous plonge dans des environnements rayonnants, à une brutale descente dans les limbes de votre esprit.
Le sound-design ajoute une couche plus que bienvenue à l’aspect immersif du titre pour vous inciter à fuir les inlassables bruits de pas qui vous poursuivent partout où vous allez, parmi l’obscurité de tunnels sans fin ou des salles cryptiques à l’ambiance mortuaire. La narration n’est pas en reste non plus, malgré quelques lacunes de rythme pouvant donner une sensation de lenteur par moment. Elle ne manque pas de fulgurances pour multiplier les situations marquantes, appuyées par des dialogues parfois brutaux, mais jamais vides de sens.
What Happened repose sur une formule de jeux narratifs ayant su faire ses preuves au cours de ces dernières années, particulièrement pour les développeurs indépendants souhaitant principalement raconter une histoire. Le titre est similaire à des œuvres telles que What Remains of Edith Finch ou Everybody’s Gone to The Rapture, dans une ambiance inspirée d’un Silent Hill ou de The Evil Within.
L’histoire du jeu saura maintenir les joueurs adeptes de ce style, sans jamais vraiment surprendre durant ses quatre heures de durée de vie (voire huit pour ceux souhaitant expérimenter les deux fins). Il n’en reste pas moins une expérience intéressante, à réserver à un public averti en quête d’escapades angoissantes, à parcourir dans le noir le plus total.