Le moins que l’on puisse dire, c’est que tinyBuild a le flair lorsqu’il s’agit de débusquer des titres indé au potentiel intéressant. Outre leur propre jeu développé en interne, No Time To Explain, on leur doit également, entre autres, les très bons Party Hard et Punch Club. Aujourd’hui, c’est sur une production évoquée dans nos colonnes il y a de cela quelques semaines que nous allons nous pencher : The Final Station. Un titre mêlant pixel art façon 8/16 bits, survivalisme, univers post-apocalyptique, gestion et action en 2D, ça ne se refuse pas, mais seulement si c’est bien conçu et réalisé. Est-ce le cas de The Final Station ? Allons voir tout cela de plus près…
The Final Station : un mix de genres efficace
Station to station
The Final Station vous immerge dans un univers froid et ténébreux, dans lequel seules quelques poches de survivants humains subsistent, confrontées sans cesse aux assauts d’infectés fantomatiques, une triste situation faisant suite à un mystérieux événement subvenu une centaine d’années plus tôt, et qui semblerait devoir se répéter de façon imminente. Dans ce monde dévasté au bord de l’extinction, seul un moyen de transport demeure viable pour parcourir de grandes étendues désolées sans être la proie des créatures qui le peuplent désormais : le train. Justement, vous incarnez un conducteur de locomotive fraîchement rentré de congés, et qui va devoir reprendre la barre malgré son manque d’enthousiasme flagrant. Vos premiers pas dans The Final Station vous amènent donc à piloter un tout petit convoi, dont vous serez le seul passager et qu’il vous suffira d’amener à bon port en vous tournant les pouces et en attendant l’arrivée à la prochaine gare. Pas terriblement palpitant, certes, mais comme vous vous en doutez bien, le jeu ne se résume absolument pas à ce guilleret voyage bucolique.
Concrètement, il se divise en deux phases distinctes. En gare, vous aurez l’opportunité de vous promener dans les environs, de discuter avec les personnages présents, d’acheter des provisions, de trouver des items cachés que vous pourrez vous garder ou revendre, bref, ces sessions sont dédiées à l’exploration, et c’est là également que vous trouverez un code vous permettant de voyager jusqu’à la station suivante. Mais aussi, c’est là que vous serez confronté à diverses formes d’infectés, plus ou moins véloces et agressives, et dont il vous faudra vous défaire. De fait, si les premières gares visitées ne seront guère dangereuses, petit à petit, vous pourrez constater la présence de plus en plus flagrantes de militaires ainsi que de médecins et de personnes malades, annonçant un retour inévitable du fléau qui avait ravagé la civilisation plusieurs dizaines d’années auparavant. Heureusement, vous n’êtes pas totalement dépourvu de ressources pour combattre.
Trainspotting
Outre une attaque au corps à corps, suffisante pour éliminer les créatures les plus lentes, vous aurez également accès à des armes à feu, mais attention : les munitions sont comptées, et l’on n’en trouve qu’assez peu, alors veillez à ne pas gaspiller vos cartouches sur des adversaires médiocres ; au pire, fuir représente parfois une alternative convenable pour qui souhaite ménager son stock de bastos. Le gameplay est plutôt simple et accessible, mais l’on sent bien, lors de ces phases de combat, que le jeu a d’abord été conçu pour être joué au clavier+souris, et la visée au stick n’est pas spécialement d’une grande précision ; ceci dit, rassurez-vous, on s’y fait rapidement, mais pour avoir pratiqué le jeu sur PC avant d’acquérir la version console, je trouve que The Final Station manque un peu de minutie en ce qui concerne l’orientation de l’arme sur console de salon. Passons. Comme nous vous l’expliquions plus haut, la phase pédestre ne constitue qu’une partie (certes conséquente) du gameplay. La seconde se focalise sur les voyages en train.
Ultime solution pour se déplacer de façon sécurisée dans ce monde en perdition, le train vous permettra de parcourir de longues étendues entre deux stations, mais une fois encore, si les premiers voyages seront plutôt relax, il vous faudra par la suite intégrer une certaine forme de gestion des ressources qui viendra trancher agréablement avec le côté action/recherche des phases d’exploration. Ceci dit, cet aspect tactique s’avère suffisamment accessible et limité pour ne pas blaser les réfractaires aux jeux de gestion. Il s’agira essentiellement de contrôler la machinerie du train pour ne pas perdre trop de vitesse, de communiquer avec vos collègues histoire de savoir ce qui vous attend sur votre trajet, de vous assurer que vos diverses cargaisons, de plus en plus conséquentes au fil du voyage, demeurent en bon état, et que les passagers que vous aurez choisi d’accepter à votre bord en parcourant les stations ne manquent point de nourriture ni de soins médicaux (d’où l’intérêt de faire des emplettes lors des arrêts en gare). Tout ceci s’imbrique de manière harmonieuse avec les scènes d’action/recherche pour offrir au joueur une expérience variée et fort plaisante. Néanmoins, si les mécaniques de The Final Station s’avèrent plutôt simples à appréhender, n’allez pas pour autant en conclure que le jeu sera une promenade de santé.
Dark and long (dark train)
En effet, le die and retry sera de mise, heureusement que les checkpoints sont assez nombreux histoire de ne pas se retaper plusieurs minutes de galère à chaque décès. La faible quantité de munitions ainsi que le nombre et l’agressivité croissants des infectés auront bien souvent raison de votre pauvre conducteur survivant, d’autant qu’un petit élément de gameplay vient ajouter une certaine forme de challenge à l’ensemble : lorsque vous ouvrez une nouvelle pièce, vous ne voyez pas à l’avance ce qui se trouve à l’intérieur. Vous pouvez donc avoir la bonne surprise de trouver du loot ou des personnages amicaux, mais aussi, vous pouvez tomber sur une salle remplie de créatures qui se jetteront sur vous aussitôt le pas de la porte franchi. Un aspect très bien amené, qui instille un stress constant lorsque l’on visite une station. On apprend ainsi à mémoriser la quantité d’adversaires, la position des lieux d’évacuation ainsi que la gestion des balles et des kits de soin, pour repartir de plus belle en se souvenant de ses erreurs. On apprend la patience, l’observation. En dépit de son aspect rétro bien pixelisé et de son gameplay en 2D, The Final Station n’est pas Broforce ; ici, foncer tête baissée et défourailler à tout va ne pourra vous causer que des soucis…
D’ailleurs, loin de la bande-son bien badass affichée par ce dernier, vous n’aurez droit qu’à des bruitages environnementaux, ainsi qu’à quelques musiques planantes et discrètes, qui ne manqueront pas de vous évoquer un merveilleux passage du film Le Voyage de Chihiro. D’autant que (du moins à mes propres yeux) la scène du train est la plus réussie du film ; mais fermons la parenthèse, pour s’intéresser cependant à la qualité technique de notre soft. Le pixel-art s’avère plutôt efficace, avec en arrière-plan de mélancoliques décors dépouillés couleur pastel assez réussis, et on appréciera également les discrets bruitages atmosphériques (aboiements, croassements, orages, tirs d’armes à feu…) qui contribuent à l’élaboration d’un univers triste et en perdition. Par contre, on émettra un gros bémol concernant l’affichage des textes, qui, s’ils conviennent sur un écran PC, sont beaucoup trop petits et peu lisibles depuis un canapé sur une télévision, il faudra souvent plisser les yeux ou se rapprocher pour profiter des messages divers. Un détail, certes, mais qui méritait d’être signalé.
Conclusion de The Final Station
The Final Station est un bon exemple de ce que peut donner un jeu indépendant réussi, réalisé en mode 8 bits comme on en trouve tant, mais parfois de qualité médiocre. Le thème est plaisant, et l’alternance entre exploration/action et gestion basique constitue un mélange qui fonctionne très bien. On pourra déplorer une taille de textes ainsi qu’un système de visée nettement plus adaptés à un joueur PC que pour une console, mais il est aisé de passer outre ces quelques défauts pour profiter comme il se doit de ce titre à la fois humoristique et mélancolique. Pour une quinzaine d’euros, vous n’aurez pas à vous en plaindre.