Au loin sonnaient de mystérieuses cloches. Alors que je veillais au chevet de mon Second que mon chirurgien venait à peine de recoudre, mon officier chargé du canon hurla qu’une barge pirate se tenait à l’horizon, et tentait de nous mettre en portée de tir. Après avoir donné les quelques ordres habituels, le combat qui aurait dû être de longue haleine fut brusquement arrêté. Un tentacule d’une taille incroyable venait de s’abattre sur l’ennemi, brisant le navire en deux. Évidemment, la panique s’ensuivit immédiatement à bord de mon bateau déjà trop abîmé : deux de mes marins se jetèrent à l’eau pour y être immédiatement cueillis par la créature, alors que mon tireur était incapable de recharger notre canon. Je mis immédiatement la barre vers Londres, seulement à quelques miles de là. Au loin sonnaient toujours de mystérieuses cloches.
Test de Sunless Sea sur PC
1888 : Année sombre
Avant tout chose, il est indispensable de préciser que Sunless Sea prend place dans l’univers de (l’excellent) jeu par navigateur Fallen London. Si vous avez du temps devant vous, je vous conseille d’ailleurs de tester un peu le titre avant de vous plonger dans ce test pour mieux aborder l’univers de ce jeu d’aventure/exploration très lovecraftien. Si vous êtes paresseux, vous devrez vous contenter du résumé que je vais vous faire : Londres est devenue « Fallen London », absorbée dans un monde sans lumière appelé le « Neath » et se situe maintenant sur la côte d’un vaste océan nommé « Unterzee ».
Au début de votre partie, il faudra choisir quelques caractéristiques de votre personnage : son passé, son nom, la manière dont vos officiers doivent vous appeler mais surtout son but. J’ai, au début, parcouru la Zee dans le but de retrouver les os de mon père. Empli de l’optimisme du premier voyage, je finis par dévorer mon équipage avant d’être tué par des pirates. La deuxième fois s’est nettement mieux passée : mes matelots ont tenté une mutinerie à cause de mes actes de piraterie. Je les ai absolument tous laissé mourir de faim avant d’aller recruter un équipage complet à Londres, en racontant une terrifiante histoire sur ce qui les avait tués.
Bref, vous l’aurez compris, Sunless Sea est un jeu dont l’ambiance est particulièrement sombre, et n’espérez arriver à une happy end sans agir de manière tout à fait reprochable avant.
La Zee ne pardonne pas
Au cours de vos voyages, vous rencontrerez toute sorte de formes de vies, hostiles ou non. D’amusants cochons d’inde géants aux effrayantes araignées, de nombreuses formes de vie plus ou moins humaines peuplent les îles que vous croiserez. Entre celles-ci, seulement une profonde obscurité, d’autres navires hostiles ou non mais surtout des méduses agressives, des requins géants et des crabes anormalement grands. Ce monde est inhospitalier et vous et votre équipage en êtes bien conscients : au-delà de la gestion du carburant, des vivres, l’une des caractéristiques les plus intéressantes du jeu est clairement la jauge de « Terreur ». Celle-ci, limitée jusqu’à 100 activera certains événements spéciaux concernant vos personnages. Par exemple, il est arrivé à mon capitaine d’imaginer un tentacule géant emporter un de mes hommes, alors qu’il l’avait en réalité poussé par dessus bord. La terreur peut bien entendu être réduite ou augmentée via différents événements (une bonne nuit de sommeil sur terre pour la diminuer, une mauvaise rencontre pour l’augmenter). Attention cependant, la terreur peut laisser des séquelles invisibles mais indélébiles à votre capitaine, rendant votre quête bien plus difficile.
Seule largesse du jeu par rapport à sa difficulté, votre capitaine décédé pourra laisser une partie de ses possessions à un héritier : enfant, frère/soeur etc. Que ce soit votre carte, une partie de votre argent ou même votre équipage, votre héritier partira toujours avec plus de chances de réussir que vous.
Lovecraft, es-tu là ?
Au-delà des aspects purement gameplay du titre, l’écriture est une des forces de Sunless Sea. En effet, les lecteurs de science fiction à la Lovecraft se retrouveront très vite en terrain connu : l’écriture est généreuse, bien imagée et fait constamment appel à l’imagination des joueurs. Si les quelques (magnifiques) artworks présents dans le jeu peuvent aider celle-ci, il faudra aimer lire (et dans la langue de Shakespeare, s’il-vous-plait) pour apprécier, et venir à bout de Sunless Sea.
Si l’écriture pouvait se suffire à elle-même, les développeurs ont eu la charmante idée de passer du temps à accorder à l’univers du jeu une patte graphique étonnante, sinon unique. Si quelques îles ne peuvent se pavaner d’originalité, d’autres lieux flattent non seulement la rétine de beauté, mais aussi de découverte. L’aspect de ce monde trop sombre fait immédiatement penser à Lovecraft à ses environnements chtoniens. Quel plaisir.
Enfin, la bande-son du jeu n’est pas en reste. Si elle n’est pas continuellement présente, les différentes pistes s’accordent parfaitement à l’ambiance de Sunless Sea, et flattent nos tympans alors que nos yeux lisent d’innommables atrocités.
Conclusion de Sunless Sea
Impardonnable, sombre, cynique. Sunless Sea est non seulement à mettre uniquement dans les mains des joueurs chevronnés, ou en tout cas courageux, mais aussi aux amateurs de Dark Fantasy appuyée par un imaginaire lovecraftien. Le titre nécessitera aussi une très bonne maîtrise de l’anglais et un certain amour pour la lecture pour pouvoir être apprécié. Si vous convenez à tous ces pré-requis, je ne peux que vous conseiller sur ce titre de Failbetter Games, disponible pour une vingtaine d’euros sur Steam.