Contra, dans l’imaginaire collectif des vieux briscards comme votre Humble Narrateur, c’est deux Schwarzy bien musclés qui vont mettre des peignées à des aliens (ou des cyborgs, selon la version) dans des titres où les armes sont à acquérir selon les besoins ou opportunités du moment, le tout dans des jeux à scrolling horizontal en 2D nerveux (avec éventuellement des séquences vues de dos pour varier les plaisirs). La licence a vécu des hauts et des bas au fil des années depuis sa naissance en 1987, et l’on s’intéresse aujourd’hui au petit dernier de la tribu, Contra: Rogue Corps. Nous avions testé récemment pour vous un Contra-like, disons, Blazing Chrome, qui pour le coup ressemblait bien plus à un Contra que notre Contra de ce jour…
La série en a connu, quelques titres en 3D, avec l’efficacité ou le fail que l’on sait si l’on s’intéresse à celle-ci. Penchons-nous donc sur cette nouvelle itération, qui délaisse elle aussi sans vergogne le style de ses ancêtres pour taper dans le shooter 3D. Un Contra sorti de l’action/platformer 2D, ça marche quand même encore, ou bien ? Allons voir ça…
(Test de Contra: Rogue Corps réalisé à partir d’un exemplaire Nintendo Switch fourni par l’éditeur).
Contra actuel
Contra: Rogue Corps, c’est un nom et un scénario qui font écho à ceux qui restent probablement les deux meilleurs opus de la série. Hard Corps, pour le nom, l’épisode Mega Drive très sympa et très chaud qui permettait de choisir son perso, et Contra III: The Alien Wars, l’épisode SNES, car il reprend son scénario, 7 ans après les faits évoqués dans ce volet si excellent. Tout ceci vous est exposé dans la démo d’intro du jeu, une démo à l’ancienne, donc ne vous attendez pas à une déferlante cinématique de malade ; Contra: Rogue Corps assume son statut le liant à une licence antique de ce point de vue-là.
Cette fois aussi, vous avez directement le choix entre 4 personnages pour partir au combat. Kaiser est le Rambo-like classique de cette série, Gentleman est un insecte de taille humaine assez véloce, Miss Harakiri est une mignonne qui se balade avec un alien logé sur son ventre, et Grosse Bête est un gros cyborg en forme de panda. Ces différences ne sont bien entendu pas qu’esthétiques, et chacun possède des qualités et des défauts propres, ainsi que des armes et des coups spéciaux qui leur sont également uniques.
Après une séquence d’intro qui pose les bases du gameplay, vous vous retrouvez dans une sorte de hub récurrent, au sein duquel vous allez pouvoir faire plusieurs choses avant de partir friter du vilain E.T : améliorer vos armes ou en acheter de nouvelles au fil du temps, faire subir une opération à votre perso pour le booster lui aussi, ou encore partir en mission, soit solo, soit en multi local jusque 4, soit en multi en ligne, et éventuellement participer à des parties classées où vous affronterez d’autres joueurs.
Un aspect éloigné des Contra classiques
Contra: Rogue Corps se présente sous la forme d’un shooter 3D en vue de derrière/dessus, comme mentionné précédemment, et au rendu visuel et audio daté. Pour résumer, il s’agit plus ou moins d’un twin-stick shooter, un style assez populaire sur mobile notamment pour sa simplicité d’accès sur écran tactile. Ici, le stick gauche vous permet de déplacer le personnage, et le stick droit oriente la direction de vos tirs ; classique et efficace. Vous pouvez ajouter à ceci la possibilité de switcher entre vos deux armes d’un simple geste, ainsi qu’une esquive rapide qui peut également déstabiliser les adversaires immunisés à vos armes classiques, et vous avez une bonne idée de ce qui vous attend.
Ce Contra, concrètement, est un jeu à couloirs et à arènes. Vous arpentez des décors restreints en fonçant droit devant vous et en défouraillant comme un cochon sur les hordes parfois conséquentes d’ennemis, avant de vous retrouver bloqué par une porte dans un lieu clos, qui ne s’ouvrira qu’une fois que vous aurez fait le vide (les plus anciens gamers se souviendront de l’iconique Smash TV). Une fois le stage achevé et le boss dézingué, vous recevrez une note qui viendra sanctionner votre performance selon plusieurs critères (temps restant, on y revient tout de suite, mais aussi objets récupérés appelés Esprits Maudits qui disparaissent si vous ne vous grouillez pas assez pour les ramasser, ou encore nombre d’ennemis tués).
Dans ce jeu de couloirs, la caméra fait sa vie comme elle le sent, se plaçant tantôt près du joueur, tantôt en hauteur et éloignée en cas de hordes trop importantes, pour une meilleure visibilité. En général, quand la caméra dans un jeu de ce genre agit de manière erratique, c’est un défaut qui gêne le joueur. Ici, bonne surprise que cette caméra ; elle est très dynamique mais se place toujours au bon endroit pour que vous ayez le meilleur angle de vue possible. Un bon point pour Contra: Rogue Corps, pour le coup.
Avec le temps va, tout s’en va
Par contre, ce qui arrive n’est pas un élément positif pour le jeu, mais cela restera à l’appréciation de chacun, donc parfaitement subjectif. Votre Humble Narrateur a toujours détesté jouer à des jeux imposant un timer, préférant prendre son temps pour flâner et avancer à son rythme, plutôt que de rusher dans l’urgence avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Cette manie du timer était nettement plus présente à l’ère 8/16 bit que de nos jours, et c’est tant mieux (encore une fois, avis personnel). Contra: Rogue Corps a malheureusement adopté ce système de compte à rebours à respecter.
Là où elle est gênante, cette deadline, c’est dans la longueur des missions. Celles-ci (par ailleurs trop peu nombreuses) prennent en moyenne une vingtaine de minutes, dirons-nous, avec un timer calqué plus ou moins sur cette durée. Seulement quand vous perdez contre un boss bien résistant, après 20 minutes de combat acharné face à des armées hostiles, à quelques secondes près à cause du timer, et devez vous retaper tout le stage, croyez bien que ça donne souvent envie d’arrêter de jouer. Et oubliez l’idée d’aller rendre visite au Grand Trône de Céramique ou vous faire un café en faisant pause dans votre partie : même en solo, le jeu en pause (que ce soit via la touche + ou le menu Home) continuera à vider le sablier seconde après seconde, inéluctablement… Comme dans nombre de jeux à timer, on se demande alors : quel était l’intérêt d’implémenter ça dans ce titre ? Frustrant.
Contra-riétés
Le timer n’est malheureusement pas le seul défaut du jeu, qui reste par ailleurs plutôt plaisant à parcourir, mais rageant sur certains points qu’il nous faut évoquer avant de vous laisser le choix de claquer votre PEL dedans ou non. On commencera par la barre de vie, ou plutôt la vitesse à laquelle celle-ci se dégrade. Les adeptes des Contra le savent bien, généralement, il n’y a pas de seconde chance dans cette série, on prend une seule balle, on est mort. Dans Contra: Rogue Corps, on a droit à une barre de vie. Seulement les vagues d’ennemis sont tellement massives qu’il est très rare de s’en sortir sans dégâts, et seuls quelques petits bonus de vie très épars vous sauveront la peau.
Ensuite il y a la surchauffe. Chaque arme finit plus ou moins par surchauffer à force d’être utilisée, à des rythmes variables indiqués par une jauge, mais incontournables. Du coup, conséquence du point mentionné ci-dessus, on se retrouve souvent démuni en plein milieu d’un assaut, entouré d’adversaires vindicatifs et à courir de-ci, de-là en attendant la fin des précieuses secondes de recharge qui vous permettront de tirer à nouveau. Pas dérangeant dans un Gears, mais dans un Contra avec autant d’ennemis, ça devient vite pénible.
On mentionnera enfin, et à la louche, d’autres petits détails déplaisants qui peuvent pencher dans la balance pour quelqu’un d’un peu tatillon et pas disposé à investir dans un jeu sans savoir où il/elle met les pieds au préalable. Comme la répétitivité des stages, inévitable à cause du format couloir que nous évoquions plus haut. Ou encore les gains d’expérience et d’argent bien trop lents pour un jeu d’action (on n’est pas dans un J-RPG, nom de nom). Pouce vers le bas aussi pour les menus de progression des armes ou du perso, assez insipides pour qu’on les zappe sans autre forme de procès et qu’on retourne au baston sans avoir pris le temps de s’intéresser aux éléments d’évolution.
Contra: Rogue Corps n’est pas un si mauvais jeu. Si on reste sur les attentes (légitimes) des joueurs de retrouver ce qui a fait le succès de la série, à savoir des run’n gun en 2D bien vifs, on est forcément très déçu. Si on le prend comme un shooter 3D très classique, en oubliant son nom, on peut en revanche y prendre un peu plaisir. Ce qui n’occultera malgré tout pas ses défauts qui, cumulés, risquent fort de fâcher le joueur.
On évoquera alors le timer pénible, la surchauffe des armes qui peut vous laisser dans le pétrin, et d’autres petits détails décrits ci-dessus qu’il vous faudra prendre en compte si le jeu vous faisait de l’œil. Aucun d’entre eux n’est rédhibitoire, mais ils s’avèrent malgré tout assez présents pour y réfléchir à deux fois avant de passer à la caisse, donc à vous de voir si ces points sombres vous empêcheraient d’investir ou non. Car malgré tout, encore une fois, le titre est plutôt plaisant manette en mains.
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