« C’est un très gros jeu et nous avons le sentiment que les gens vont vraiment voir à quel point il est vaste et complet. C’est vraiment un triple… Un quadruple A qui sera efficace sur le long terme. »
Yves Guillemot, PDG d’Ubisoft
Joueurs, joueuses, nous vous présentons le quadruple A ! Dernière invention d’Ubisoft, elle concerne son projet imminent nommé Skull and Bones, un jeu-service de piraterie en développement depuis de nombreuses années. Effet d’annonce parmi les effets d’annonce, les triples A sont donc dépassés, vive les quadruples A ! C’est en tout cas de cette manière qu’Yves Guillemot s’est senti obligé de présenter le prochain jeu de son studio.
Mais pourquoi une telle déclaration ? Sont-ce véritablement les ambitions du jeu, l’ampleur de son monde et les possibilités de son gameplay qui poussent le patron de la firme à user de tels termes ? Nous ne pourrons pas le savoir avant d’avoir le jeu entre nos mains, bien entendu, mais il y a fort à parier que ses propos servent avant tout à justifier le prix de vente du titre.
Yves Guillemot n’a pas innocemment encensé Skull and Bones puisque cette déclaration a pour devoir de répondre aux critiques émises par les joueurs à l’encontre de son tarif jugé trop élevé. L’entreprise souhaiterait après tout le mettre en vente à 79,99 €, un prix qui a de quoi agacer puisque, nous le rappelons, le titre est un jeu-service. De fait, il est attendu de sa part qu’il se vende sur un modèle à base de micro-transactions, de suivi de contenu et autre battlepass.
Souvent, ce modèle se base sur un jeu vendu moins cher, voire la plupart du temps disponible en free-to-play. Il paraît dès lors difficile de justifier le plein tarif, d’autant plus que ce dernier est déjà très critiqué depuis la nouvelle génération de consoles. Et encore, nous ne parlons ici même pas de toutes les informations qui ont filtré sur le développement du jeu et qui ont révélé de très nombreux problèmes, au point de nous faire pendant longtemps craindre une annulation. Rien qui n’incite véritablement à acheter un jeu à plein tarif…
La solution paraît alors toute simple et elle a tant été usée jusqu’à la corde qu’elle en devient pour beaucoup ridicule : il faut promettre toujours plus. L’expérience sera si surprenante, novatrice, ambitieuse et démesurée que nous allons dépasser les standards actuels des grosses productions et atteindre le tout nouveau statut de quadruples A. Très bien, mais cette déclaration, au-delà de susciter le doute, car nous peinons à croire en un tel bouleversement, ne va-t-elle pas à contre-courant de l’état du marché ?
Licenciements sur licenciements, fermetures de studios sur fermetures, le marché du jeu vidéo traverse une crise dont la cause n’est pas étrangère à la trop imposante expansion des ambitions des jeux à gros budget. Toujours plus grand, toujours plus fort et bien sûr toujours plus cher, à la fois en coût budgétaire et humain. Ce modèle ne peut que finir par s’effondrer sur lui-même, comme nous l’a tristement démontré l’année 2023, ce que 2024 n’est pas près de démentir. Pourtant, les gros studios se sentent obligés (certainement parce que d’une certaine manière, ils le sont) de toujours renchérir.
En réalité, nous ne doutons pas qu’Ubisoft a sans doute besoin d’afficher un tarif à 79,99 € pour Skull and Bones. Nous ne pouvons pas tout mettre sur le dos d’une supposée cupidité, car nous ne doutons pas un instant que le projet a eu un coût faramineux. Une fois de plus, nous argumentons alors en la faveur de la sobriété, à la fois pour la santé de l’industrie, mais aussi pour la qualité des productions. Toujours ajouter plus de contenu n’est pas un parti pris d’artiste, mais d’expert en marketing. Il serait peut-être temps qu’Yves Guillemot se souvienne qu’il compte parmi ses rangs de nombreux créatifs et non pas seulement des comptables…
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