Nous nous étions quittés en août dernier avec un tome 3 qui répondait avec panache à toutes nos attentes, et nous attendions logiquement la sortie du tome 4 avec une grande impatience, d’autant plus que nous étions en plein milieu d’une myriade de révélations succulentes. Nous repartons donc de plus belle au coeur de Hell’s Paradise, voir si l’enfer y est toujours aussi savoureux.
(Critique Hell’s Paradise tome 4 réalisée à partir d’une version fournie par les Éditions Kazé)
Le pitch de Hell’s Paradise – (No spoil)
Hell’s Paradise met en scène la tentative de « rédemption » de Gabimaru, un shinobi du clan Iwagakure dans le Japon de l’époque Edo. Arrêté pour un crime dont il semble accepter la sentence, Gabimaru ne cesse d’appeler la mort de ses voeux depuis le fond de sa cellule. Manque de chance ou pas, la maîtrise des arts shinobi lui procure une constitution suffisante afin de résister aux tentatives de décapitation de ses bourreaux.
Mais une exécutrice très particulière surnommée « La Grande Coupeuse de Têtes », intriguée par ce shinobi immortel, va faire le déplacement pour mettre fin à la vie de Gabimaru. Cependant, après avoir jugé de son potentiel, l’exécutrice Sagiri Yamada Asaemon lui proposera un marché qu’il finira par accepter : se rendre sur une île mystérieuse dont nul n’est jamais revenu, afin d’y rechercher un élixir d’immortalité convoité par les puissants de cette époque.
Départ classique, motivations standard pour Gabimaru, ce n’est qu’une fois sur l’île que Hell’s Paradise commence à dévoiler son potentiel et surtout l’originalité qui le démarque des autres. Car tout portait à croire que l’on allait nous servir un énième battle royale sans saveur. Cependant, le mystère de départ se divise rapidement en une myriade d’embranchements intrigants sur fond de surnaturel et de folklore japonais, au coeur d’une île à la beauté paradisiaque mais où le danger peut se cacher dans la moindre particule environnante.
La critique de Hell’s Paradise tome 4 – (Voir directement la conclusion pour un avis rapide sans spoil)
À la fin du tome 3 de Hell’s Paradise, après son terrible affrontement, Gabimaru se retrouvait face à deux personnages que nous avions déjà vus précédemment : le criminel Gantetsusai qui s’était lui-même tranché la main après une piqûre potentiellement mortelle, et son exécuteur, Fuchi. Ces deux personnages sont une réponse parfaite à la fin du précédent tome, dans lequel Gabimaru savait qu’il aurait besoin de soutien dans ses affrontements à venir. On imaginait peut-être le voir retrouver son groupe initial, mais c’est cependant quelque chose de bien plus intéressant qui a été décidé par l’auteur.
Ces personnages seront nos compagnons d’aventure durant tout le tome 4, et c’est grâce et avec eux que Gabimaru réussira à traverser certaines épreuves. Nous avons donc un trio qui se met en place avec l’exécuteur incarnant une sorte de neutralité, et nos deux combattants aux personnalités totalement opposées, dont va surgir une espèce de complémentarité les tirant tous les deux vers le haut. La mise en place de la relation entre les personnages est très bien écrite, et le fait d’avoir un personnage « spectateur » au sein du trio permet de bien mettre en avant l’évolution psychologique de Gabimaru depuis le début de l’histoire.
À cela va venir s’ajouter Mei, la petite fille ayant sauvé Gabimaru à la toute fin du tome 3, et qui tentera malgré son mutisme presque total de lui apprendre comment vaincre l’ennemi qui lui fera face durant ce volume. Si l’on veut être un peu réducteur le combat ne sera qu’une manière d’atteindre un boost des capacités de Gabimaru, mais encore une fois, c’est la qualité d’écriture qui fait mouche en se servant avec une grande efficacité d’un tas d’éléments laissés de côté depuis le tome 1 pour faire évoluer le personnage.
En parallèle, nous avons une très grosse partie sur Chôbê et Tôma, qui souvenez vous, étaient tombés dans une sorte de gouffre, afin qu’une fois morts, leurs corps fournissent une substance régénératrice pour les « dieux » de ce monde. Comme cela était attendu, ils ont réussi à s’en sortir grâce à la volonté de Chôbê, mais pas que ! Car un changement s’est opéré à l’intérieur de ce gouffre, comme le dit d’ailleurs son adversaire fraîchement débarqué, celui-ci se serait « mélangé ». Le résultat est en tous cas spectaculaire puisque Chôbê contrôle désormais le Tao, une forme intérieure à laquelle un humain ordinaire ne devrait pas avoir accès, ce qui lui donne potentiellement accès à l’immortalité, nous le verrons dans la suite de Hell’s Paradise.
Encore une fois, il est rare qu’un combat ne soit là que pour faire joli, et l’affrontement entre Chôbê et l’être surnaturel venant d’arriver va totalement servir le propos à la fois par les dialogues, mais aussi par le visuel, illustrant parfaitement le changement que l’on vient de décrire. Ajoutez à cela un petit flashback très rapide juste pour remettre les choses en contexte, car ne l’oublions pas, Tôma est le frère exécuteur de Chôbê, ce qui n’est pas rien. Et pour finir sur ce passage, c’est la première fois réellement que l’on entrevois le but à atteindre par le gouvernement, à savoir l’élixir d’immortalité.
Et en parlant de cet élixir, nous apprenons ensuite exactement comment ce dernier est produit, et autant dire que nous n’étions pas prêts. Si vous êtes vraiment là par hasard et dans la hype du tome suivant, attention, ce qui suit est un énorme spoiler, mais que nous ne pouvons fatalement pas occulter tant cela est important d’un point de vu scénaristique.
Nous allons donc revenir sur Mei, cette petite fille mutique et fragile, bien que dotée de certains pouvoirs qu’on ne comprend pour le moment pas. Cette petite sera le centre et le point scénaristique culminant du combat entre Gabimaru/Gantetsusai et les deux êtres surnaturels dont on sait à présent qu’ils sont des prêtres. Petit à petit les langues vont se délier et l’on va apprendre que cette enfant était recherchée par les assaillants depuis des centaines d’années. Mais pourquoi, nous direz-vous ?
Eh bien il faut savoir que pour contrôler le Tao de manière « naturelle » il faut pratiquer un entraînement strict dont l’aboutissement est le coït. Déjà, on commençait à voir que ça sentait pas très bon pour notre petite Mei. Cette dernière avait alors été marquée comme du bétail, afin de servir l’entraînement sexuel aux prêtres (des créatures répugnantes il faut le souligner), ce qui les mèneraient au Tao. Et à ce moment là tout s’emboîte (sans mauvais jeu de mots) à merveille. Habituellement dans un shonen l’élément déclencheur d’un level up du héros est causé par la mort d’un personnage, ce qui est vu et revu. Mais là c’est beaucoup plus subtil, le tome a fait monter la sauce tout du long, et au point culminant Gabimaru se transcende car tout converge vers cet instant précis.
On nous rappelle alors que sa femme avait été marquée par son clan, ce qui lui fait bien évidemment penser à Mei. On constate par sa posture et ses paroles qu’il a enfin accepté sa part d’humanité en venant en aide de manière instinctive à Mei. Au coeur de l’action il apprend les horreurs dont elle sera victime s’il ne fait rien, ce qui provoque une sorte de déclic dans sa tête… Et quand le climax arrive, les dessins retranscrivent vraiment très bien la puissance de Gabimaru, mais aussi sa part d’humanité qu’il arrive enfin à accepter, après toute une vie d’actes meurtriers et de conditionnement au service de son clan.
Et justement côté dessin vous allez être servi car on reste sur un standard de qualité très élevé, avec encore une fois d’excellentes idées, sauf qu’il s’agit ici d’un tome bourré de révélations. Cela veut dire que vous découvrez de nouveaux designs de personnages, qu’on voit de nouveaux environnements, et surtout les combats sont naturellement encore plus dingues qu’auparavant, notamment celui de Chôbê, absolument superbe.
Alors là vraiment, Hell’s Paradise tome 4 nous a vraiment fait plaisir à tous les niveaux. Sans vouloir tomber dans l’excès d’enthousiasme, il faut bien le dire, ce volume n’avait clairement pas de défauts apparents, et l’on a pris un plaisir fou à le lire, d’autant plus qu’on s’attendait à quelque chose de bien, mais pas autant que ça.
On y trouve alors tous les ingrédients pour en faire un volume incontournable, des révélations nombreuses, impressionnantes et pertinentes, des combats superbement mis en scène, des personnages ayant tous une grande part d’importance dans le récit, des visuels à tomber, et surtout un héros qui se révèle vraiment beaucoup plus captivant que le personnage de shonen ordinaire.
Non, vraiment, si vous hésitiez à vous lancer, nous pouvons maintenant vous confirmer que Hell’s Paradise est une oeuvre qui mérite que l’on s’y intéresse, et qui devrait encore nous surprendre si on en croit les toutes dernières pages de ce tome.