S’il y a bien une licence qui m’a marqué étant adolescent, c’est Resident Evil. Avant celle-ci, je n’avais aucune idée de ce que pouvait être un véritable jeu d’horreur, et cela même si certaines licences utilisaient déjà des mécaniques horrifiques bien avant la sortie de la PlayStation. On pourrait citer Clock Tower ou encore Alone in the Dark, ce dernier ayant largement inspiré Shinji Mikami lors de l’élaboration de son Resident Evil, surtout en ce qui concerne le game design.
En mai 1998, soit il y a un peu plus de 20 ans, est arrivée chez moi la suite des aventures de Jill, Chris, Barry et Rebecca, une séquelle prenant la tangente vis-à-vis de son aîné, en nous proposant le même univers, mais avec de tout nouveaux personnages. Ami de la flippe et du pipi au lit bonsoir, voici pour vous le nouveau numéro de Jeu de Légende, avec cette fois-ci en star incontestée : Resident Evil 2.
Resident Evil 2 : Voyage au bout de l’enfer
Il faut replacer les choses dans leur contexte. Au moment où Resident Evil 2 est arrivé dans le lecteur CD-ROM de ma PlayStation d’époque, j’allais sur mes douze ans. Je venais de sortir du premier épisode à peine traumatisé et en bonne santé mentale, même s’il m’arrivait de ramasser de l’herbe dans les jardins publics de Paris pour m’en faire un stock en cas d’attaque zombie.
Il était donc bien normal que je me plonge allègrement et sans appréhension dans ce deuxième opus, avec bien entendu, l’approbation de mon paternel. Ceci étant dit, bien que j’ai idolâtré Resident Evil 2 pendant longtemps, ce n’est pas pour autant qu’il m’avait fait mourir de peur, même si certains jump-scares étaient arrivés à me faire sauter au plafond et y rester collé un bout de temps.
Car la particularité de ce Resident Evil 2 est qu’il n’est plus dirigé par Shinji Mikami, qui passe ici producteur, mais par un certain Hideki Kamiya.
Pour la petite histoire, ce grand monsieur du jeu vidéo japonais est l’une des têtes pensantes de Platinum Games aujourd’hui et a dirigé des jeux tels que Devil May Cry, Bayonetta ou encore Viewtiful Joe et un chef-d’oeuvre du nom d’Õkami. Un CV qui en impose et qui donne une idée de son importance dans l’univers du jeu vidéo made in Japan. Il avait aussi officié sur le premier Resident Evil en tant que game designer. Il est pour moi, au même titre que Mikami, un véritable génie qui m’a offert nombre et nombre d’heures de pur bonheur.
Pour en revenir à nos moutons, ce remaniement en tête de projet apporte aussi un changement de direction pour la licence. Car si le premier Resident Evil était un pur survival-horror, demandant de rationner munitions et soins comme si notre propre vie en dépendait, Resident Evil 2 quant à lui est pour moi le parfait exemple de ce qu’est l’équilibre idéal atteint entre action et survie dans la saga.
Beaucoup me répondront que Resident Evil 4 serait un choix bien plus pertinent, à cela je leur répondrais simplement d’y rejouer à partir de la deuxième moitié du jeu, lorsque Léon arrive sur l’île et de revenir m’en parler. Non, pour moi il n’y a que RE 2 qui a réussi à concrétiser ce rêve du jeu parfait mêlant horreur, action et survie, et je vais vous expliquer pourquoi.
Welcome to Raccoon City
Raccoon City est une belle petite bourgade de 100 000 habitants nichée dans le Midwest des États-Unis. Il doit surement y faire bon vivre, avec son environnement boisé et montagneux propice aux randonnées et promenades en amoureux. Oui, ça devait être une chouette ville Raccoon City, mais malheureusement, on n’est pas ici pour la découvrir sous un bon jour, mais bien sous son plus mauvais.
L’histoire débute donc le 29 septembre 1998, soit deux mois après les événements du premier Resident Evil. Léon S. Kennedy est une nouvelle recrue de la police de Raccoon City, le RCPD, et arrive au volant de sa jeep en ville pour son premier jour de boulot. Au même moment, Claire Redfield débarque elle dans la bourgade pour retrouver son frère Chris, dont elle n’a aucune nouvelle depuis deux mois.
Une fois arrivés dans Raccoon City par des chemins différents, nos deux héros tombent vite sur des créatures agressives qui tentent de les tuer. Il semblerait que ces dernières soient en réalité les habitants de la ville transformés en zombies, ou plus communément appelés aujourd’hui dans le lore Resident Evil : des armes biologiques. Toute la cité semble plongée dans les ténèbres, il ne semble plus y avoir âme qui vive, juste des silhouettes errantes aux râles provenant d’outre-tombe.
Léon et Claire se rencontrent alors pour la première fois lorsque la demoiselle s’échappe d’un bar rempli de morts-vivants et tous deux décident de gagner le commissariat de police pour trouver des réponses à leurs questions. Sauf qu’après avoir été percutés par un camion citerne dans lequel le chauffeur se transformait en monstruosité, ils se retrouvent une nouvelle fois séparés et décident de se rendre chacun de leur côté au commissariat de Raccoon City.
Voilà pour la petite histoire. La particularité étant ici qu’on peut la suivre de deux points de vue différents, comme c’était déjà le cas dans le premier opus d’ailleurs. On pourra choisir d’incarner Léon ou Claire et autant vous dire que les choses changent radicalement en fonction de notre choix. Que ce soit le déroulement de l’histoire, le routing ou encore les personnages rencontrés, c’est bien plus qu’un simple mode facile et normal cette fois-ci.
Car pour l’anecdote, et même s’il y a des variations là aussi dans le cheminement, à la base si on avait le choix entre incarner Jill Valentine ou Chris Redfield dans Resident Evil, c’était parce que jouer avec notre belle et jeune policière d’élite était considéré comme un mode facile. Chose jugée un brin sexiste à l’époque et à tort de mon point de vue, car Jill accomplit tout de même pas mal d’exploits sans aide durant le jeu et fait figure de femme forte.
Tous les chemins mènent à Raccoon City
Sur le scénario de Resident Evil 2, nous n’allons pas trop en dire, surtout parce qu’à l’heure où l’on écrit ces lignes, le remake devrait débarquer d’ici pas longtemps et il ne serait pas bon de spoiler plus que nécessaire les personnes qui le découvriront via ce dernier. Ce que je peux vous dire par contre, c’est que l’histoire est bien plus intéressante du côté de Claire Redfield, déjà parce qu’elle noue une relation avec une petite fille du nom de Sherry Birkin (clin d’œil mesuré à Aliens), mais aussi parce que le déroulé est bien plus glauque. Entre des histoires de famille horribles, le chef de la police complètement fou et tout le background Umbrella, on en a pour notre argent.
Concernant Léon, hormis l’apparition de Ada Wong, présente pour la première fois dans la licence, et les prémices d’une histoire d’amour, le scénario suit un tracé que nous jugerons plus classique. On en apprend beaucoup sur le virus et cela se veut moins intimiste qu’avec Claire. De toute façon, ce choix est effectué dès le départ entre celle qui cherche son frère et est donc présente pour raison personnelle, et celui qui est venu accomplir son devoir et est à Raccoon City par obligation professionnelle.
J’ai personnellement bien plus apprécié le scénario de Resident Evil 2 dans sa globalité que je n’avais aimé celui du premier épisode. Non pas qu’il était bâclé, mais il restait fort classique et s’il y avait quelques tentatives d’approfondissement des personnages, c’était la plupart du temps assez sommaire. Même si Barry Burton sortait clairement du lot. Ici, s’il est toujours question de dangereuses expérimentations génétiques effectuées par Umbrella Corporation, de nombreuses sous intrigues s’imbriquent naturellement au tout et enrichissent un scénario presque copier/coller du premier, mais à plus grande échelle.
Les personnages sont aussi mieux travaillés et plus caractérisés, ils ont des aspirations, des craintes, mais les surpassent et se montrent forts. Alors on est loin d’un Silent Hill (de Konami), cela reste du Resident Evil, mais pour 1998 c’était franchement bon, voire très bon. Certes, certains dialogues ont vieilli et prêtent parfois à sourire, cependant les péripéties traversées par nos deux compères sont elles toujours au goût du jour, tant on a ici le droit au meilleur de ce que le survival-horror pouvait offrir à cette époque.
Le classicisme amélioré
Et des péripéties, il y en a ! Le gameplay de Resident Evil 2 est très similaire à celui de son aîné, il est juste plus souple à la prise en main, mais le personnage bouge toujours sur un axe en pivot. Il n’est pas question de pouvoir esquiver ou de faire des demi-tours rapides, ces features, comme beaucoup d’autres, seront introduites dans le trop peu reconnu Resident Evil 3 : Nemesis. Entre les deux personnages non plus, il n’y a pas de différences majeures, hormis certaines armes exclusives à chacun, mais l’apparition des blessures physiques change la donne.
S’il est toujours possible de se faire croquer quelques fois avant d’être envoyé ad patres, il va maintenant falloir faire gaffe à son état physique, car notre état de santé change, et cela impact directement notre personnage, aussi bien visuellement que concernant sa vitesse de déplacement. En état de danger, notre avatar va traîner la patte et ne plus courir, donnant son corps en repas à la moindre petite créature qui passe par là. De mon point de vue, c’est une très bonne idée qui rend certaines situations encore plus stressantes et poussent le joueur au sans faute.
Hormis cela, et les quelques nouvelles armes, comme l’arbalète avec Claire ou la mitrailleuse pour les deux, il n’y a rien de bien neuf sous le soleil. Hormis aussi le fait de pouvoir upgrader notre armement avec des pièces que l’on trouve à des endroits précis. Autre particularité, on peut laisser de l’équipement à notre collègue pour le scénario B, mais nous reviendrons là-dessus un peu plus tard.
Bon, il y a bien également la possibilité d’incarner Sherry ou Ada lors de courtes séquences, mais rien de bien transcendant. Les énigmes sont toujours à base de casse-tête ou d’objets à trouver, et nos déplacements dans le commissariat de police et autres lieux de types égouts et laboratoires souterrains sont toujours dictés par les clefs et cartes d’accès que l’on possède.
Du classique certes, mais du très bon. Resident Evil 2 améliore la formule de son prédécesseur en rendant la progression mieux rythmée et plus scénarisée. On est rarement dans le flou quant à nos objectifs, et on prend plaisir à arpenter les couloirs du commissariat qui ressemble plus à un énorme manoir qu’autre chose.
Les ennemis sont bien plus nombreux qu’auparavant, n’hésitant pas à nous fondre dessus à quatre ou cinq, et si le zombie de base est plutôt inoffensif, quoiqu’il faille faire attention, d’autres dangers rôdent.
Comme le célèbre Lickers, cette espèce de monstre décharné avec le cerveau apparent, une langue de 5 pieds de long, rapide et avec la capacité de sauter et de s’accrocher au plafond pour nous dégommer. Il lui est aussi possible de nous tuer en un coup et il rappelle en cela les effrayants Hunters de Resident Evil. Mais au contraire de ces derniers, il apparaît très vite en début de jeu, c’est même la première créature que l’on croise au commissariat si on suit le routing logique.
Une réussite visuelle et un monstre agressif à souhait, qui a marqué la saga de son empreinte. On trouve aussi les Cerbères, ces fameux Dobermans zombifiés, les araignées géantes et un truc un peu moins réussi à mon goût que sont les plantes à tailles humaines pouvant empoisonner et faire quelques dégâts.
G-Virus better than T
Mais la plus grande menace de Resident Evil 2 est sans aucun doute le virus G. Nouvelle souche développée par un certain William Birkin dans les laboratoires d’Umbrella situé sous Raccoon City, elle donne lieu à une transformation spectaculaire créant un Tyran aussi impressionnant que fort. Bien plus agile et rapide que celui de Resident Evil, il ne cherche qu’une chose, pouvoir se reproduire avec une personne du même sang que le sien (vous avez dis glauque ?).
Il apparaît sous plusieurs formes, toujours plus puissantes, et évolue donc visuellement au fil de l’aventure, délaissant de plus en plus ses traits humains pour quelque chose de plus monstrueux dirons nous. Chaque rencontre face à lui est un véritable challenge, mais aussi un grand moment épique et intense.
Parmi les boss, il n’y a pas que Birkin qui sorte du lot. Si on peut facilement mettre de côté les enfants d’Irons et du journaliste Ben Bertolucci – quand on parle d’enfants, ce n’est pas à prendre au sens littéral du terme -, on peut par contre reconnaître que la première fois que l’on tombe sur le crocodile géant c’est la panique assurée. La bête nous coince dans une espèce de long couloir étroit, sans issue, et il faut jouer de son cerveau pour s’en sortir en un seul morceau. Terrifiant !
Le scénario B de l’enfer
Si vous croyiez que le Nemesis de Resident Evil 3 était le premier big boss a poursuivre le joueur durant toute son épopée, eh bien vous vous trompiez. Je peux vous affirmer qu’il est certes puissant et envahissant, mais ce n’est rien comparé au fameux T-00. Ce dernier n’apparaît que dans le scénario B des deux personnages, qu’il nous faut donc aborder ici et maintenant.
Lorsque l’on finit le scénario normal de Resident Evil 2 et cela, peu importe le temps que l’on y met, le jeu nous propose de nous lancer dans une histoire alternative avec le personnage que l’on n’a pas incarné lors de notre premier run. Franchement, à l’époque je ne m’attendais pas à cela, en tout cas pas de cette façon là. Énormément de choses changent dans ce scénario B. Cinématiques en plus, fin différente, changement de position des ennemis, difficulté rehaussée, cheminement qui change et surtout l’apparition d’un nouveau Tyrant donc, el famoso Mister X.
Envoyé par Umbrella pour récupérer des échantillons du virus G, il n’a de cesse que de nous harceler et défonce littéralement des murs pour nous prendre par surprise. La fuite est souvent une solution viable face à lui, même si l’affrontement est possible, mais sachez qu’il ne peut être tué lorsqu’on le croise au détour d’un couloir, tout juste peut il être ralenti quelques secondes. Alors garde à vos miches, car sa grosse patate de forain peut faire de gros dégâts.
Ce scénario B et ce nouvel ennemi sont véritablement la cerise sur le gâteau. Sans compter qu’il y a en plus de nombreux objets et un mode de jeu supplémentaire, comme le mode The 4th Survivor nous proposant d’incarner Hunk, un soldat d’élite d’Umbrella, qui doit exfiltrer le virus G en se rendant d’un point A à un point B en un temps donné. Stressant et particulièrement prenant.
On a même la possibilité de jouer avec une tranche de Tofu géante, cette dernière servait de repère visuel pour les développeurs lorsqu’ils testaient les déplacements dans l’espace. Le principe est le même qu’avec Hunk, même si la difficulté monte encore d’un cran.
Resident Evil 2
Resident Evil 2 se veut aussi plus hollywoodien dans sa mise en scène, qui est plus rythmée et explosive. Le jeu se renouvelle constamment en multipliant les nouveaux ennemis, rebondissements et lieux que l’on visite. Cela fonctionne bien, on a vraiment l’impression d’être pris dans une course contre la montre mortelle et que s’échapper devient vite plus important que de découvrir le pourquoi de tout ceci.
Le tout rythmé par une bande originale franchement bonne, composée de thèmes d’ambiances instillant une réelle atmosphère horrifique.
Ainsi, si tout commence dans les rues de Raccoon City, il faudra attendre le troisième volet mettant en scène Jill pour découvrir la citée de fond en comble. Ici, on se concentre sur le commissariat et ses environs fermés, jusqu’au traditionnel laboratoire souterrain, véritable marque de fabrique de la licence. Le jeu est linéaire, mais comme son prédécesseur, nous invite à revenir assez souvent sur nos pas pour trouver clefs et autres objets ou atteindre des endroits jusque là inaccessibles.
Mais cela ne parait jamais forcé ni même ennuyant, car encore une fois, Resident Evil 2 est extrêmement bien rythmé et a du sens dans sa construction, ce que l’on y fait colle parfaitement à l’univers qui reste cohérent de bout en bout.
Il me faudrait encore et encore énormément de lignes pour continuer à vous parler et vous dire tout le bien que je pense de cette pépite de la PlayStation. Probablement l’un de mes survival-horror préférés, j’espère vous avoir donné envie de le découvrir si ce n’est déjà fait au travers de ces quelques paragraphes.
Alors certes, graphiquement il a vieilli, mais reste plutôt joli avec ses décors en 2D précalculées, et si on réussit à passer outre une prise en main assez lourde, ce qui suit n’est que pur bonheur. Comme je l’ai dit, je trouve que c’est l’épisode le mieux équilibré de la saga, sachant quand faire peur et quand nous en mettre plein la vue. C’est must have, must play, must tout. Resident Evil 2 est unique et se savoure donc en conséquence, en espérant que le remake soit à la hauteur du mythe.