Rétro (mais pas trop), c’est la chronique qui rebondit sur l’actualité pour revenir en arrière et évoquer l’histoire d’un jeu vidéo, ou du jeu vidéo. Avec ce numéro, on profite de l’annonce du prochain Double Dragon Gaiden: Rise of The Dragons pour dresser un rapide historique de la série et voir s’il est encore pertinent aujourd’hui de tenter de la ramener sur la grande scène du jeu vidéo.
En ce début du mois de mai 2023, l’une des plus anciennes licences de beat’em up est revenue avec l’annonce d’un nouveau titre. Nommé Double Dragon Gaiden: Rise of The Dragons, ce jeu coopératif nous proposera de refouler un monde bouleversé par la racaille et de repartir à la castagne avec, entre autres, les célèbres frères bagarreurs : Billy et Jimmy Lee. Et à cette occasion, pour ce frais départ, la franchise opère quelques changements. Le premier, c’est évidemment la passation des droits de la saga à l’éditeur du récent Afterimage, Modus Games. Quant au second, il se résumera à l’introduction d’éléments roguelite. La formule opèrera-t-elle ? Réponse l’été prochain, à une date encore tenue secrète.
Cependant, cette résurgence aura de quoi étonner. Car la dernière fois que l’on a tenté de remettre la série sur le devant de la scène, Arc Système Works (l’éditeur historique) s’était complétement pris les pieds dans le tapis avec un Double Dragon IV qui, plutôt que de venir en fanfare, a porté un coup direct au prestige acquis par la série depuis sa naissance dans les années 80. Est-ce donc à dire que du côté de Modus Games, on est confiant quant à une renaissance digne de rappeler les grandes heures de la saga ?
Une série encore exploitable ?
C’est en 1987 qu’apparaît Double Dragon. Et évidemment, comme le veut l’époque, ce départ s’effectua sur borne d’arcade, tout comme pour l’autre création de Yoshihisa Kishimoto : Renegade, ou plutôt Kunio-Kun dans son pays d’origine, sorti un an plus tôt sur la même plateforme, cela va de soi. Reprenant le modèle de son prédécesseur tout en apportant des améliorations, le titre sera considéré comme un modèle pour le genre et accèdera logiquement à la renommée. S’ensuit donc des portages sur les consoles de salon – nouvellement arrivées –, mais aussi tout un tas de projets autour : Double Dragon II, III, Super Double Dragon, etc.
Il va sans dire : la licence avait acquis une solide réputation. Et, évidemment, ça attira l’œil de certains, dont celui de producteurs américains. Cependant, l’adaptation sortie en 1994 dans les salles obscures (avec Marc Dacascos, Scott Wolf et Alyssa Milano en vedettes) fut très loin d’être concluante, empruntant plutôt l’allure d’une exploitation opportuniste destinée à se mettre les fans dans la poche. Toutefois, elle ne manqua pas d’attirer l’attention, mais pour de toutes autres raisons. Car, comme le film Super Mario Bros. (pas le nouveau, hein ?), elle accéda facilement au statut de nanar, et comme toute production de ce genre, on rit de bon cœur.
Au fil du temps, dans les années 90, la série commença à s’essouffler. Peut-être était-ce là le signe qu’elle appartenait déjà au passé et que, face à une concurrence de chez Capcom (Final Fight) ou de chez Sega (Streets of Rage) par exemple, elle avait du mal à tenir la comparaison… Une discrétion qui se fit de plus en plus grande dans la décennie suivante, où elle s’est principalement illustrée avec le portage du premier jeu sur la Game Boy Advance et la parution de Rage of the Dragons sur bornes d’arcade. Et puis, il faut dire qu’à cette époque, le beat’em up, du moins dans sa forme « classique », était en passe d’être de l’histoire ancienne.
Il aura fallu attendre 2012, l’année de ses vingt-cinq ans d’existence, pour revoir la franchise sur consoles de salon avec l’opus Neon. Et la réception fut plutôt partagée, mais pas aussi catastrophique que l’épisode suivant : le fameux Double Dragon IV de 2017, qui, même s’il a bénéficié des têtes pensantes du premier opus, est tout simplement conspué. Dans ce dernier, certains y voyaient même un moyen malhonnête de ses ayant-droits pour notamment surfer sur la célébration de la trentième année. C’est simple, cette nouvelle itération apparaissait aux yeux des critiques et joueurs comme une redite un peu mal exécutée, voire absurde, des tout premiers épisodes. Un dernier fait d’armes peu glorieux qu’aura à cœur de faire oublier son nouveau propriétaire, Modus Game.
Un nouveau départ est-il donc envisageable ? On peut espérer que ce changement de main lui fera le plus grand bien, un peu comme pour Streets of Rage IV, lequel a été considéré comme un excellent hommage orchestré par Dotemu. Et cette éventualité est même très envisageable. Car, bien qu’il semble avoir peu de jeux à son actif, le développeur Secret Base est apparemment assez à l’aise dans le domaine du beat’em all rétro. En tout cas, son dernier essai (Streets of Red) – qui remonte néanmoins à plus de cinq ans – s’est révélé assez concluant, si l’on se fie aux rares avis que l’on peut trouver sur la toile.
Toutefois, il ne faut pas se faire trop d’illusions. Si succès il y a, ce ne sera assurément pas tapageur, la splendeur de la série étant aujourd’hui bien amoindrie, et ce, depuis un petit moment déjà. Le regard qu’on lui porte désormais est un peu similaire à celui que l’on dirige vers nos aïeux, un regard respectueux admiratif et parfois plein d’émotions, à condition d’être un fan de la première heure ou tout simplement un curieux amoureux des productions rétro en pixel art.